Chapitre 18

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Je continue à ressasser tout ce qui s'est passé aujourd'hui. J'ai appris à voir certaines personnes autrement. Je ne suis pas sûre de pouvoir encore me fier à mon jugement. Les gens nous blessent, nous brisent, mais ne sont pas capables de réparer leurs failles. Celles-ci restent invisibles aux yeux des gens, mais sont belles et biens présentent dans notre corps. Parfois, je me demande pourquoi je réagis de telle ou telle manière. Par exemple, pourquoi suis-je sujette aux crises de panique? Et bien, à force de fouiller dans mes souvenirs j'ai fini par mettre le doigt dessus. Enfin j'espère que ce n'est que ça... Sûrement voulez-vous savoir de quoi il en retourne? Je vais faire court pour vous expliquer.

C'était il y a maintenant cinq ans, juste avant de partir en internat. Je venais de finir de débourrer Ibiscus. Mes parents étaient désireux de nous changer d'écurie moi et lui. C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés dans une écurie de saut d'obstacles le long de l'autoroute. Après quelques jours, je m'étais liée d'amitié avec le propriétaire des lieux. Nous nous entendions vraiment très bien et étions très complices. C'est également avec lui que Ibiscus et moi avions réalisé nos premiers sauts. Je montais au même moment pour des marchants de chevaux. Je me faisais la main en quelques sortes. Au fur et à mesure, obtenant des classements, je finis par me faire remarquer par le sélectionneur de l'équipe qui me connaissait déjà de mes années poneys. Il me proposa une place dans l'équipe. Je l'acceptai sans hésitation. A mon grand malheur, le propriétaire de l'écurie où logeait Ibiscus avait également une fille cavalière et n'espérait qu'une chose: que sa fille fasse partie de l'équipe. Dès qu'il sut que j'avais obtenu la place, il commença à me mener la vie dure. Notre complicité du début avait volé en éclat tout ça à cause d'une place en équipe. Le propriétaire de l'écurie, qui s'appelait Edmond, commença à lancer des rumeurs à mon sujet. Par exemple, il a été dire sur les paddocks que je maltraitais les chevaux, que je me dopais et eux aussi par la même occasion, que sans lui je ne serais jamais rien devenue, et caetera. Bref, il m'avait mené la vie dure. Bien entendu suite à cela, ma place dans l'équipe avait été remise en question par beaucoup de magazines. Pour prouver que les rumeurs étaient fausses, le sélectionneur envoya un médecin ainsi qu'un vétérinaire à l'improviste pour passer quelques tests. J'obtins gain de cause. Après cela, je me pensais tirée d'affaire. Pendant mes quatre jours d'absence, mes parents s'étaient engagés à aller sortir Ibiscus au pré tous les jours et à le longer un peu. Eux le firent. Là n'était pas le problème. Le lundi, jour de retour, je me rendis aux écuries bien heureuse de le retrouver. Lorsque j'ouvris la porte du box, il cabra. Edmond arriva par derrière et Ibiscus sembla effrayé en le voyant.

— Clémence, ik denk dat het beter is als je met je paard van stal verandert. Hij is te gevaarlijk.

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— Clémence, je pense que c'est mieux si tu changes d'écurie avec ton cheval. Il est trop dangereux.

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Je l'avais regardé avec des yeux de merlan fris. Me demandait-il vraiment de changer d'écurie? Ce jour-là, je n'avais pas su quoi lui répondre. Dès qu'il fut parti, j'avais appelé mes parents en pleurs en leur demandant de venir au plus vite avec le van. C'est ainsi qu'Ibiscus se retrouva à la maison dans le jardin et que mes crises d'angoisse commencèrent. A cause d'Edmond, j'ai perdu toute confiance en l'humain. Je n'avais plus confiance en eux. Il m'avait prouvé que les humains retournaient leurs vestes extrêmement facilement. Depuis ce jour, je ne faisais plus confiance à personne - mis à part Marie. Du coup, maintenant vous savez pourquoi je fais des crises de panique.

Je suis toujours avec Ibiscus dehors lorsque j'entends une voiture arriver. Je ne bouge pas. Je ne veux pas que quelqu'un me voit ainsi faible. Je veux garder mes démons pour moi. Personne ne doit connaître leur existence. Ils n'appartiennent qu'à moi. Des pas s'approchent du pré. Je sèche mes yeux et relève la tête pour me retrouver face à... ma mère. Pourquoi? Pourquoi me voit-elle dans mes moments de faiblesse?

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