4. C A M I L A

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Elle m'a elle même forcé à jeter mon téléphone dans le ravin, je l'ai sentis glisser d'entre mes doigts et j'ai entendu le carreau s'écraser contre la roche, c'était le seule moyen de savoir où j'étais et elle l'a détruit, de toute manière vu l'endroit, il ne doit pas avoir beaucoup de réseau, nous sommes en pleine montagne, les hauts sapins cachent la maison avec grâce, n'empêche c'est vraiment beau, dommage que je sois là parce que j'ai été enlevé par une folle. 

Après avoir lâché mon portable dans le vide, elle m'a forcé à me retourner, elle pointait une arme, mon cœur a cessé de battre quand je l'ai vu retiré la sécurité. Elle a sourit car ma terreur devait se lire sur mon visage et de sa voix plate, elle a dit "profites du soleil et de l'air frais, c'est la dernière fois, ne tentes jamais de t'échapper, à pied il te faudrait des jours pour sortir de cette forêt, et vu comment t'as l'air naïve, tu te perdrais au bout de cinq minutes, même avec un plan." Même si se faire attaquer comme ça n'est pas plaisant, elle a raison, je n'ai pas du tout le sens de l'orientation, je serais déjà perdue et dévorée par les loups à l'heure qu'il est si j'avais tenté quelque chose. Enfin bon, tout ça pour dire que j'étais de nouveau dans la chambre, j'attendais que cette femme m'apporte à manger, mon ventre gargouille.

Enfin, la porte s'ouvre sur Émeraude, elle me regarde toujours avec ses yeux neutre, elle me tend mon plateau repas et part s'asseoir sur la chaise en face du lit. 

  - Tu ne sors pas ? Je demande timidement, je ne savais pas trop comment elle pouvait réagir, elle était impulsive et imprévisible.

  - Il y a un couteau dans le plateau. Elle dit alors que je fronce les sourcils. 

  - Et ? Je fais cherchant à comprendre.

La femme aux cheveux corbeau soupire.

  - Je te pensais plus réfléchie pour une psy. Elle remarque, alors que je baisse la tête, honteuse. Si tu y avais pensé et visiblement ce n'est pas le cas, avec ce couteau, tu aurais pu forcé la serrure de ta porte, on sait jamais ce dont est capable une faible créature sans défenses. 

  - Je ne suis pas si faible. 

Émeraude ricane avant de m'ordonner de manger. Je ne me fais pas prier, j'engloutis mon assiette, c'est vraiment étrange, elle ne parait pourtant pas si méchante, il faut se méfier des apparences donc je fais gaffe, elle a l'air d'avoir une certaine force pour une femme, mais elle parait aussi légèrement plus jeune que moi, peut-être 22 ou 23 ans.

  - Arrête de me fixer ainsi. Elle me reprend, la tête toujours tourné vers la fenêtre

  - Je te reconnais tu sais. Je lui dis alors qu'elle reporte son attention à moi. Tu es la femme à ma fenêtre d'il y a deux jours. 

Elle sourit.

  - Exact. Annonce-t-elle simplement. Comment sais-tu cela ?

  - Tes yeux je les ai reconnu ce matin. Jeudi, tu étais avec deux autres femmes, une métisse et une noire. Elles ne sont pas avec toi ? Je demande

Elle tique quand j'annonce leur couleur de peau.

  - Ne les appelle pas par une couleur de peau Cabello. Elle me menace.

  - J'ignore ton prénom et le leurs, comment veux-tu que je les appellent ? Je demande, c'est une question rhétorique, je sais qu'elle ne me fournira pas de réponses, elle tient à son identité. 

Sa mâchoire se contracte.

  - Mais, je crois avoir comprit au moins un truc. Elle continue de me regarder, signe qu'elle m'écoute. Tu travailles pour une organisation ou un truc du genre, "les yeux voient" je suppose, et soit tu es cette "L.J", soit "L.J" à chercher a me prévenir.

Elle hausse les sourcils sans doute surprise de voir que j'avais compris ça, je suis psy tout de même, je lis les gens facilement, même si pour elle c'est difficile de savoir à quoi elle songe, tellement son regard est neutre.

  - Impressionnant. Elle note. Tu n'es pas si bête finalement.

Je souris doucement, je vais prendre ça pour un compliment.

  - Je fais en effet partir d'une organisation, nous avons un objectif, ces filles et moi et tu es un élément majeur de cette mission. Elle en dévoile un petit peu.

  - Finalement, tu n'es pas méchante, juste faussement agressive. Je dis, réprimant un rire.

Un sourire courbe ses lèvres, un sourire amusé. Elle hausse les épaules.

  - Je veux pas que tu te sentes mal ici. Elle me dit en se levant. Malheureusement, on ne peut pas te laisser partir, alors tu vas devoir rester enfermée dans cette chambre pendant un temps indéfini, en temps voulu, tu sortiras, et si tout se passe bien tu seras libre. Maintenant je dois partir, bonne nuit Jolie Brune..

À son surnom, mon ventre se contracte, on ne m'avait jamais appelé comme ça auparavant, ça changeait des "Mila" ou des "bébé" surjoué de Shawn pour pouvoir avoir mon corps.

  - Attends ! Je la retiens avant qu'elle ne ferme la porte, le plateau en main. Tu veux toujours pas me dire qui tu es ? Je réessaie.

Elle me regarde, ses yeux sont fascinants, je ne parviens pas à m'en défaire, je me perds à l'intérieur. Ils ont une couleur si particulière, si propre au personnage qu'elle dégage, je veux bien croire qu'elle n'est pas méchante, mais elle semble réellement vide, comme si quelque chose lui empêchait de montrer qui elle était véritablement, qui était cette vraie personne. Si je veux sortir d'ici avant de me faire tuer pour x raisons, je vais devoir apprendre à la cerner, je claque discrètement ma langue contre mon palet, ça ne va pas être tâche aisée.

  - Je suis cette L.J. 

La porte claque avant que je ne réplique, si elle m'a demandé de prendre garde, c'est qu'elle cherche seulement à me garder vivante, enfermée mais vivante. Je pense à Ally qui doit être morte d'inquiétude, je la vois courir dans tout les sens, envoyer des dizaines, des centaines de messages, essayer de m'appeler et tomber sur le répondeur, contacter Shawn, voir que lui aussi ignore ou je suis, enfin peut-être que lui s'en fiche, mais pas Ally, la savoir dans cette état me fait tellement mal, je veux la voir, la sentir, je veux retrouver ses bras, son sourire, sa joie, son rire, je veux la retrouver elle, elle et tout ce qu'elle a à m'offrir. Et si je rentrais jamais ? Et si elle n'obtenait jamais ce qu'elle veut et qu'elle me tue pour pas que je dise à la police que j'ai été séquestrée et, sans doute prochainement violentée ? Je serais dévastée avant de périr, une balle dans le cœur, je ne peux vivre sans mes amis, sans ma vie professionnelle et carrée. Que vont dire mes collègues lundi ? Que va dire Sasha jeudi quand il verra que je ne suis pas là ? Je vais tout perdre et ça me fout les jetons, je suis perdue au beau milieu d'un forêt tellement haute qu'on peine à voir le ciel, je suis dans un chalet, dans un chambre ou la porte est scellée. Je n'ai jamais eu aussi peur de toute ma vie, même les menaces de Shawn font pâle figure devant tout ça, j'ai encore rien subit physiquement mais je me sens déjà faible, si j'ai toujours gardé la tête haute, c'était pour Ally, elle a toujours cru en moi, même quand je lui ai dit que je n'aimais pas Shawn, même quand je lui ai dit que les filles attiraient mon regard, même quand ma mère est morte et que je croyais mourir, elle était là. C'est grâce à ma meilleure amie si je suis encore là, alors loin d'elle, je ne sais pas si je vais tenir, je m'en sens incapable, je suis trop faible sans mes repères, sans mes défenses, si elles tombent, je perds ce masque de supériorité que j'ai toujours eu avec moi, parce que je suis supérieure, "tu es plus grande que tous les géants de ce monde" disait mon père, il me l'a toujours répété quand je menaçais de baisser les bras. Mais sans Ally, sans la force de mon père, j'ai peur de lâché prise, j'ai peur de me laissé mourir comme je l'ai tant de fois fait, sauf que là, personne ne sera là pour me sauver..

Regard. (Camren)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant