Le prix de ton âme

Chapitre dix-huit

Edenn alluma son ordinateur, plongée dans l'obscurité de sa chambre. Elle attendait que le logiciel se lance, les jambes repliées contre sa poitrine, en position accroupie sur sa chaise de bureau. Les recherches à la bibliothèque lui avaient ouvert des pistes, mais bon nombre d'énigmes restaient à résoudre. L'apparition mystérieuse de cet homme blond l'avait beaucoup désorientée et lorsqu'elle était rentrée chez elle, la rousse s'était soudainement rappelée d'un élément important.

Soit son imagination lui jouait des tours, soit elle avait déjà vu cet inconnu. Elle s'était tournée et retournée dans son lit, tentant de se remémorer où est-ce qu'elle avait bien pu le croiser, sans réel succès. Cependant, ses iris écarlate ne cessaient de la tourmenter et lui évoquait un souvenir douloureux. La jeune femme passa une main sur son visage et soupira alors que l'écran d'accueil s'ouvrait devant elle.

Bien, les choses sérieuses pouvaient commencer. Elle pianota sur son clavier des mots clef et entama la seconde partie de ses péripéties. Pendant plusieurs heures et en ignorant son estomac affamé, la goule fouilla les profondeurs d'internet, nota tout ce qui lui paraissait utile ou intéressant, sans oublier d'inscrire le lien du site où elle débusquait les informations.

Les mentions de Ruth et d'Abrahel étaient peu nombreuses mais existaient bel et bien. Qui avait mis à jour les pages du web, ça elle l'ignorait cependant, l'auburn remerciait intérieurement les individus qui avaient enrichi les études. Au bout du compte, elle ne s'en sortait pas si mal, bien qu'elle ne se sente pas convaincue ou rassasiée de savoir. Un voile de secrets opaque et profond couvrait encore sa conscience et elle détestait cette sensation. Elle referma son appareil et se frotta les yeux, rétines explosées à cause de la luminosité de la machine.

– Edenn, tu descends ? cria alors Yugyeom, la tirant de ses pensées.

– J'arrive !

Ni une ni deux, l'étudiante claqua la porte de son alcôve et descendit les escaliers quatre à quatre, les marches craquant sous son poids. Ysabeau était assises dans le canapé, l'air profondément concentrée dans une partie d'échecs contre son ami. Ces moments familiaux se raréfiaient de plus en plus compte tenu des derniers évènements, leur tutrice s'absentait davantage aux conseils des clans et lorsqu'elle rentrait, Edenn sentait son désarroi face à l'ampleur des dégâts.

Elle encaissait les chocs sans jamais fléchir le genou et c'était pour cette raison que la rouquine l'admirait. Ysabeau était et restera toujours une force de la nature, un roc qu'aucun torrent ne parvenait à éroder. Malgré les nombreuses disputes qu'elles avaient eues, l'universitaire la respectait énormément et regrettait les décisions parfois dangereuses qu'elle avait pu prendre.

En la regardant bouger son pion, Edenn se souvint des tragédies qu'ils avaient traversé tous les trois. Les pertes qu'ils avaient essuyé, les blessures qu'ils avaient soigné, les chagrins qu'ils avaient apaisé... Autant de cicatrices qui s'exprimaient au travers de leur parcours chaotique et dont Edenn aimait ramener au présent afin de ne jamais les oublier.

– Prends ma place Edenn, elle me bat encore à plate couture, grommela Yugyeom, ce qui ne manqua pas de faire rire leur mentor.

La demoiselle ne put s'empêcher de glousser et tapota son épaule en guise de réconfort. Cela ne servait à rien, le mangeur d'essences était aussi têtu qu'une mule et ne supportait pas la défaite. Elle s'installa donc à sa place et contempla le plateau. Effectivement, c'était plutôt mal barré... Comment diable avait-pu perdre un cavalier et un fou en si peu de temps ? Bien qu'Ysabeau soit douée à ce jeu, il se débrouillait d'habitude.

– C'est à toi de jouer Edenn, fit sa garante en pointant les pièces de bois.

– J'essaye de voir où est-ce qu'il s'est planté, chuchota la chasseuse, les prunelles balayant les positions des pions.