3. Le pistolet

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Absalom franchit la porte de la salle du trône du palais royal de Tolone. Tous les regards se tournèrent aussitôt sur lui. Le mage fut traversé par un sentiment de honte en voyant l'admiration et la confiance qui brillaient dans leurs yeux. Il ne les méritait pourtant pas. S'ils savaient ce qu'il avait fait... Ou plutôt ce qu'il n'avait pas réussi à empêcher.

Sa main se crispa sur le parchemin qu'il venait de recevoir de la reine Flavie. Il était l'unique responsable du terrible événement qui y était annoncé. Oui, il n'aurait jamais dû laisser Athanasios vivre. A quoi bon préserver une vie si cela risquait d'entraîner la mort de tant d'autres ?

Le pistolet qu'il avait naguère trouvé en possession du mage noir lors de sa capture au château d'Aspignan le troublait tout autant. Que faisait cette technologie terrienne sur Mundus ? Se pouvait-il – et cette simple supposition suffit pour faire frissonner le mage – se pouvait-il que les elfes noirs se soient procurés des armes à feu ?

La voix du roi Jean s'éleva.

— Absalom, le salua-t-il avec un sourire bienveillant. Soyez le bienvenu ici, comme toujours.

Le mage s'inclina respectueusement.

— Sire, je vous en remercie. Je suis cependant porteur de biens mauvaises nouvelles.

La salle du trône était bien remplie. Les membres du Conseil du roi étaient réunis au grand complet derrière les grands officiers de la Couronne. La reine Mathilde était présente aux côtés de son époux. Hugues, le prince héritier, se tenait un peu à l'écart, l'air de s'ennuyer un peu. C'était un petit jeune homme d'à peine 16 ans, aussi maigrichon que son père était volumineux.

Absalom prit une profonde inspiration avant de reprendre la parole.

— Les elfes blancs ont remis à Athanasios le flacon de ses souvenirs.

Un silence stupéfait et horrifié s'ensuivit. Le roi Jean avait froncé les sourcils.

— Pourquoi la reine Flavie aurait-elle donné à notre ennemi ce qu'elle nous avait promis de garder précieusement ?

Absalom soupira.

— Parce que j'avais oublié que les elfes blancs n'étaient pas réellement nos alliés et qu'ils suivaient en priorité leurs propres intérêts. Athanasios a rendu au peuple des elfes sa princesse héritière. Comment la reine Flavie aurait-elle pu refuser cet échange ?

Des exclamations de colère s'élevaient dans toute la salle.

— Les elfes sont tous des traîtres, aussi bien les blancs que les noirs ! tonna le connétable Gauvin. Ils travaillent de concert à notre perte !

Le roi leva la main pour réclamer le silence.

— Athanasios a donc récupéré ce flacon. Mais a-t-il pu ingurgiter ses souvenirs ?

Absalom n'hésita pas.

— Cette possibilité est à craindre.

Le jeune homme sans mémoire qu'il avait rencontré lui avait d'abord semblé être une personne douce, réellement horrifiée par celui qu'il avait été. Néanmoins, la dernière fois qu'il avait été en sa présence, il avait découvert une facette très différente et bien plus inquiétante de ce dernier.

— Athanasios est donc réellement de retour ? demanda la reine Mathilde. Sera-il exactement semblable à cet homme terrible que nous avons eu tant de mal à combattre ?

— Je l'ignore, reconnut le mage. Je n'avais encore jamais jeté le sort d'amnesia. Je n'ai donc aucune idée du résultat que donne la réintégration des souvenirs. Sans doute faut-il prévoir le pire.

Daemoniaci. La geste d'Arthur Montnoir, livre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant