38. Les projets d'Athanasios

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J'entendis qu'on toquait à ma porte et Arthur entra sans attendre ma réponse. Ses yeux brillaient d'un mélange de fatigue et d'exaltation.

— J'ai réussi, s'exclama-t-il. Je l'ai enfin vaincu.

Il s'approcha de moi et planta sur mes lèvres un baiser possessif. Je le laissai faire en me raidissant. Le moindre contact que nous avions me répugnait mais il se fâchait lorsque je cherchais à le repousser. J'avais peur de lui. Peur du mal qu'il pouvait me refaire à chaque instant.

— De quoi parles-tu ? lui demandai-je avec une certaine indifférence.

Il releva lentement sa manche gauche.

— Regarde donc.

Pendant quelques secondes, je me demandai juste pourquoi il agitait ainsi son bras devant mes yeux. Puis j'ouvris de grands yeux.

— La malédiction. Elle a disparu !

Il fit tourner sa main sur elle-même, contemplant sa peau immaculé.

— Oui... Et pas seulement...

Je compris alors ce que cela impliquait. La malédiction ne pouvait être levée que par la mort de son invocateur.

— Absalom... Est-ce que tu l'as...

Un sourire cruel étira ses lèvres.

— Oui. Absalom ne se mettra plus jamais en travers de mon chemin.

Je sentis mon cœur se serrer. Je me rendis compte à quel point j'avais compté sur Absalom pour arrêter Arthur et venir me sauver.

Le jeune homme fronça les sourcils et attrapa mon menton entre ses doigts.

— Réjouis-toi donc, m'ordonna-t-il sèchement. Nous n'avons plus d'ennemis.

Je ne répondis pas. Je me demandais souvent s'il s'imaginait réellement que j'étais de son côté.

— Tu as toujours des ennemis en nombre, remarquai-je. L'ensemble des humains, pour commencer. Et ces Purificateurs qui s'en prennent à tes alliés les elfes.

Arthur se laissa tomber à côté de moi. Je me tendis comme un arc sans pour autant m'éloigner.

— Les humains sont méprisables, cracha-t-il. Ils ne pourront jamais faire le poids devant mes armes terriennes. Je les écraserai en un rien de temps. Quant aux Purificateurs... Ils ont toujours fait ce que je voulais.

Je fronçais les sourcils, perdue.

— Que veux-tu dire ?

Il me sourit. La guérison de son corps semblait l'avoir mis suffisamment de bonne humeur pour me faire des confidences.

— Pour mener à bien mes projets, j'ai besoin des elfes. Et allier les elfes blancs et noirs est le meilleur moyen de multiplier par deux le nombre de mes alliés. Pour cela, ils devaient avoir une menace commune. C'est de ce principe que sont nés les Purificateurs.

Je compris alors. La vérité, l'horrible et abominable vérité me sauta soudain aux yeux.

— C'était toi, murmurai-je. Les Purificateurs qui s'en sont pris aux elfes... C'est toi qui les a créés. Toi qui les diriges. Toi qui as fait assassiner la reine des elfes blancs.

Arthur ne répondit rien. Il me contemplait d'un air impassible.

— Oui, c'était toi, répétai-je. Tu voulais exciter les elfes contre les humains parce que tu avais besoin d'eux. Mais comment as-tu fait ?

Il leva les yeux vers le plafond.

— Curieusement, c'est Rose, ma chère petite sœur, qui m'en a donné l'idée. Elle parvient à manipuler les esprits. Or nous sommes tous les deux des daemoniaci. J'ai compris que je pourrais un jour ou l'autre imiter ses capacités. Et j'ai réussi sans grande difficulté. L'esprit des humains est si faible, si malléable. J'ai pu ensorceler des humains pour les convaincre de s'en prendre aux elfes. Je les ai aidés à s'introduire dans la Montagne blanche et la Forêt noire. Je leur ordonnais ensuite de se suicider afin d'éviter que le sort soit brisé s'ils étaient interrogés.

Daemoniaci. La geste d'Arthur Montnoir, livre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant