Chapitre 16. « Serais-tu fier, si tu étais là ? »

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~ Leah ~

Quelques heures seulement s'étaient écoulées depuis le départ de Grand-mère mais mes pensées tourbillonnaient toujours sans me laisser le moindre répit. Cependant, je fis de mon mieux pour ne pas perdre de temps inutilement et réussir à terminer une bonne fois pour toutes mes bagages. En effet, il s'était avéré qu'une seule valise n'allait pas suffire à contenir toutes mes affaires puisque je m'étais mise en tête de ne rien laisser, ou presque, derrière moi après mon départ à l'Union des Dons. Inutile de préciser que cela ne signifiait pas pour autant que j'allais effectivement utiliser plus de la moitié des babioles qui se trouvaient dans mes bagages.

Malgré tout ce rangement que je m'imposais pour me changer les idées, mon esprit ne cessait jamais de revenir aux paroles de Grand-mère. Je ne savais pas vraiment comment réagir face à tout ce qu'elle m'avait révélé. Plus j'investissais de l'énergie à tenter de déchiffrer un quelconque sens dans tout cela et moins je comprenais de choses. J'avais l'impression qu'une nouvelle couche de mystère s'était déposée sur la précédente, qui englobait la découverte de mon don meurtrier et la nature de ce dernier. Pourtant, ces mystères-là m'échappaient complètement alors je ne voyais pas d'autres solutions que d'adopter une attitude passive par rapport à tout cela, ce qui revenait à accepter, en quelque sorte, ce qui m'arrivait sans en questionner le moindre aspect.

Si je dois avoir des réponses, elles arriveront en temps et en heure. Pas la peine de gaspiller inutilement ma santé mentale à réfléchir vainement.

Ma technique fonctionnait, un peu.

Allongée sur mon lit, regardant le plafond blanchâtre de la pièce, je savourais mes dernières heures dans ma chambre. Le courant d'air qui traversait de temps en temps la fenêtre allait très sûrement me manquer. De plus, mes moelleuses couvertures imprégnées de mon odeur me sembleront probablement lointaines dans quelques jours. Et Roxane ne sera pas assez proche pour me remonter le moral grâce à ses mimiques.

Je poussai un soupir de lassitude. Il me fallait supporter ce chamboulement de mes habitudes si je voulais enfin avoir la chance d'apprendre à me contrôler, à gérer toute cette monstruosité qui coulait à l'intérieur de moi, tout cela rien que pour avoir la possibilité de prétendre à nouveau que j'étais normale.

Machinalement, mon regard se dirigea vers ma table de chevet, à ma droite. Un grand cadre noir y était posé, juste à côté de ma lampe allumée éclairant avec peine l'endroit. Au centre de ce cadre se trouvait une vieille photographie me représentant accompagnée de quelqu'un d'autre, un autre fantôme de mon passé. Elle avait été prise quelques années plus tôt, à l'époque où je n'avais que dix ans et où l'innocence dégoulinait de chacune de mes pores. Un univers parallèle par rapport à celui dans lequel je vivais, à présent.

Si seulement j'avais su...

Je me laisse emporter par l'élan de la balançoire où je suis assise. Nathan se trouve sur celle de gauche et monte bien plus haut que moi, malgré toutes mes tentatives pour le rattraper. Il ne semble même pas être fatigué de l'effort qu'il produit, tout le contraire de moi. Cela ne m'empêche pas pour autant de sourire avec enthousiasme.

Quelques allées et venues plus tard, j'abandonne et laisse mes jambes pendre en-dessous de moi. En attendant que le siège ralentisse et que je puisse descendre, je regarde Nathan. Il a les yeux fermés et arbore une expression de bien-être absolu sur le visage qui fait battre davantage mon cœur la chamade. Dès que son siège va vers l'avant, il tend les jambes. Dès que son siège repart en arrière, il les replie. Cet enchaînement en est presque envoûtant.

Je l'ai forcé à venir faire de la balançoire avec moi et, au final, il prend plus de plaisir que moi.

Tant pis... je pense.

Hypnose, tome 1, Notre Rencontre. | ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant