Carmen :
L'homme en noir me tenait le bras, le serrant si fort que je craignais qu’il ne le brise. J’avais l’impression de n’être qu’une bête de foire et cette sensation était parfaitement humiliante.
Richard et mon " acheteur " tournaient autour de moi. Je sentais même les mains de Richard qui se baladaient sur mon corps. Je ne pouvais pas réagir, au risque de m'en prendre une en public.
Je fermai les yeux en refoulant mes larmes lorsqu’il pose une main sur mes fesses. Le bourreau les malaxa lentement, rapidement aidé de son autre main. Je serrai les dents, ne supportant pas qu’il me touche.
— Comme vous pouvez le voir, elle possède des fesses fermes et résistantes, déclara Richard sans la moindre hésitation. Je suis certain qu’elle vous conviendra parfaitement, monsieur Castavovitch.
— C’est à moi d’en décider, répliqua froidement l’homme.
Même sa voix m’effrayait. Je réprimai un frisson d’horreur. Cet homme était tout bonnement terrifiant. Richard tomba un peu de son piédestal.
— Loin de moi l’idée de vous faire attendre, monsieur. Quand désirez-vous l’emporter ?
— Immédiatement.
— Souhaitez-vous un paquet ? Vous pouvez bien sûr emporter la cage si vous ne voulez pas de problème pendant le voyage.
— Contentez-vous de prendre votre argent et laissez-moi m’en occuper, le rembarra l’homme.
— Bien, monsieur Castavovitch, répondit nerveusement Richard. Vous av...
— L'argent est sur votre compte en banque. Maintenant, laissez-nous.
— Vous voulez que l'on vous la charge dans votre coffre ? osa tout de même mon bourreau.
— J’ai dit : laissez-nous.
Richard baissa la tête sans ajouter un mot. Un bref sentiment de victoire m’envahit, que je m’empressai de dissimuler. C'était la première fois que Richard pliait devant quelqu’un. Toutefois, ma joie s’évapora aussitôt que je vis Castavovitch se diriger vers moi.
Le ténébreux Russe ne me regarda même pas, ne me prêta aucune attention, et lança un regard noir au garde qui me broyait encore le bras. Celui-ci baissa aussitôt les yeux et me lâcha précipitamment, avant de partir sur un ordre de mon “acheteur" sans protester.
Monsieur Castavovitch me regarda enfin mais dès que nos yeux se croisèrent, je baissai les miens. Il posa une main dans mon dos et je ne pus retenir un léger gémissement de douleur. Les lacérations causées par le fouet étaient encore un véritable supplice.
Léandre :
Remarquant à quel point cette femme était terrorisée et surtout blessée, je serrai les dents. Sa peau vibrait sous mes doigts à cause de ses tremblements. Initialement, je n’étais pas venu dans cet endroit pour acheter une de ces femmes mises en vente, encore moins une créature telle que celle que j’avais sous les yeux.
Non, initialement, j’avais atterri ici dans l'unique but de découvrir ce qui se tramait dans cette vieille usine. L'un de mes amis m'avait raconté que l'on vendait illégalement des femmes ici, à Moscou. Alors, je ne l’avais pas cru, mais Vlad m’avait certifié que ce n’était pas des mensonges.
« Puisque tu ne me crois pas, va le constater par toi-même, Léandre. Reviens me voir lorsque tu l'auras vu de tes propres yeux » m'avait-il dit.
Persuadé que ce n’était qu’une plaisanterie, j’avais suivi ses indications, je m’étais rendu dans cet usine désaffectée et ce que j’avais vu ce soir me laissait sidéré.
Treize femmes étaient montées sur la grande scène, à peine vêtues, enfermées dans des cages que je pensais réservées aux animaux des cirques. Les douze premières avaient parues ravies de se trouver là où elles étaient. Elles se pavanaient sans retenue dans leur mince espace, frottant leur poitrine contre les barreaux, aguichant les hommes par leurs gémissements et leurs cris de plaisir. Je les voyais encore sourire avec suffisance lorsque les sifflements d’origine masculine leur étaient dédiés. Et en effet, plus d’un semblait ravi d’assister au spectacle que ces demoiselles offraient.
Elles n’avaient été que douze à agir de la sorte… car la treizième, celle qu’ils avaient appelée leur “perle”, avait été complètement différente des autres.
Loin de paraître heureuse à sa place, la peur se lisait sur son visage aussi aisément que son malaise. Elle était restée debout dans sa cage, se tenant devant le public masculin comme si sa dernière heure était venue ce soir, devant l’assistance masculine, comme si l’on décidait de sa mort.
Elle n’avait pas manifesté la moindre envie d’être vendue. Son regard était vide, ses membres crispés, ses mains se tordaient dans son dos.
Je ne devais que m’asseoir au fond de la salle et attendre la fin des enchères. Mon seul rôle dans cette pièce consistait à vérifier les dires de mon ami, rien d’autre. Il avait suffi que cette fille apparaisse devant moi pour que tous mes plans soient balayés.
D’une beauté fatale, elle dépassait toutes les femmes que j’avais pu rencontrer...
Tout chez elle m’avait aussitôt ensorcelé : son corps gracieux et parfait, bien qu’enlaidi par sa maigreur et ses cicatrices, ses longs cheveux châtains ondulés dont la douceur de soie éclipsait l’évidente saleté, son visage ovale et délicat. Les traits de celui-ci m’avaient complètement fasciné : un nez fin et légèrement retroussé, des lèvres roses et pulpeuses, ses iris d’un bleu pâle magnifique sertis d’éclats d’émeraude.
Même les blessures qui couvraient son corps n’avaient pas eu raison de son succès. J’avais dû me battre pour l’avoir, et peu importait l’argent que j’avais perdu pour l’obtenir.
J’étais conscient, en la voyant trembler et s’attendre au pire, qu’elle pensait que je l’avais tirée de son horreur pour l’y replonger plus profondément. Je n’imaginais pas toutes les tortures qu’elle avait subies, et sans doute même avait-on profané son corps puisqu’elle avait crié alors que je l’avais à peine touchée.
Jamais je ne pourrais abuser d’elle de la sorte.
Il était hors de question d’agir ainsi avec elle. Je ne voulais que l’aider à reprendre sa vie en main, à dépasser sa peur des hommes. Je voulais lui prouver que tous n’étaient pas mauvais en lui tendant la main pour la tirer de son tourbillon infernal. J’étoufferais les souvenirs qu’elle gardait de Richard Pendez et peut-être de ses prédécesseurs, s’il y en avait eu.
J’ignorais quelle raison me poussait à faire preuve de pitié envers elle. Quelque chose en elle m’avait tout de suite attiré, m’exhortant à l’aider à traverser les décombres qui constituaient sa vie. Toutefois, je ne comprenais pas ce qu’était ce quelque chose. Je ne comprenais pourquoi je me sentais à ce point concerné par les problèmes de cette fille.
C'est un véritable mystère.
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𝕊𝕒𝕦𝕧é𝕖 𝕡𝕒𝕣 𝕦𝕟 𝕚𝕟𝕔𝕠𝕟𝕟𝕦 ⁽ᴿᵘˢˢⁱᵃⁿ ˢᵃᵍᵃ ²/ᵀᵉʳᵐⁱⁿé⁾
RomancePendant trois longues années, elle fût torturée par Richard Pendez. La russe se devait de supporter les coups et viols de celui-ci. Elle subissait alors, se terrant dans le silence, lutter ne lui servait à rien contre ce monstre. Le temps passait et...