Chapitre 20

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« Quoi de plus complet que le silence ? »

- Honoré de Balzac

Eroz lui souriait. Il avait son sourire pervers et répugnant. Tout le monde se taisait. Ses sbires attendaient ses ordres en tenant fermement les nouveaux prisonniers de Tennesia. Soudain, Eroz s'écarta d'Éléonore et agrandit son sourire. Il prit alors son air sadique qui lui collait à la peau.

— Sujet numéro deux, dit-il tout simplement.

Un garde vint instantanément vers la princesse et attrapa son bras droit. Elle tenta de se débattre tandis qu'un autre homme arriva pour aider le premier à la maintenir.

— Lâchez-moi !

Elle lança son regard le plus noir à Eroz.

— Ne l'abîmez pas, se moqua-t-il.

Éléonore fut alors emmenée vers les marches. Elle observa une dernière fois Alrick qui ne cessait de la fixer, impuissant.

Dans le couloir régnait un calme plat. Mais les cris étouffés de douleur d'Alrick brisèrent le silence. Elle s'arrêta net et se débattit autant qu'elle le put. Les deux hommes serrèrent un peu plus leurs doigts autour de ses bras. Elle cria alors de rage :

— Qu'est-ce que vous allez leur faire ? Ils n'y sont pour rien !

Aucune réponse.

— Si vous voulez me tuer, faites-le tout de suite !

Elle ne reçut aucune réponse, une fois de plus. Dans un élan de colère, elle donna un coup de coude au garde qui se tenait à sa gauche. Il lâcha alors son bras. Éléonore en profita pour saisir l'épée du Tennesien, encore rangée dans son fourreau. Simultanément, elle écarta l'autre garde d'un coup de pied puissant. Elle recula et se mit en position de défense, son épée en avant.

— Tu fais une énorme bêtise.

Mais elle n'entendit rien. Le Tennesien sans épée n'osa pas avancer tandis que son homologue se jeta sur elle. La princesse para le premier coup et contre-attaqua instantanément. Elle y mit toutes ses forces. Le son des épées qui s'entrechoquaient envahissait tout le couloir. L'épée d'Éléonore vint soudain taper le poignet de son adversaire. La douleur le fit lâcher son arme. La princesse en profita pour s'approcher de lui et mettre un coup de poing violent dans son visage. Le Tennesien tomba à la renverse. Fière d'elle, elle leva la tête pour défier du regard le second garde. Mais il n'était plus là. Éléonore n'eut pas le temps de faire un pas. Elle gisait déjà par terre, inconsciente, son adversaire derrière, une massue à la main. Du sang s'écoulait lentement de son crâne. Pour la première fois depuis des jours, elle était coupée de la réalité, ne pensait à rien. Elle était comme éteinte.

Que c'est joli le silence.

*

Alrick percuta brutalement le sol de la cellule. Il venait de se faire jeter par deux Tennesiens, suivi de près par le corps toujours inerte de Troy. Il passa sa main sur sa lèvre ouverte. Le goût de sang dans sa bouche se mélangeait au goût âpre de sa colère. Il secoua son équipier, dans l'espoir qu'il se réveille, en vain. Il posa ses yeux sur son arcade. Une sève rouge foncé s'échappait avec abondance. Alrick ragea, se leva d'un bond et se colla à la grille de sa cage fermée à double tour. Soudain, Eroz sortit de l'ombre tel un fantôme, accompagné de deux gardes. Il s'approcha de la cellule, détaillant de haut en bas Alrick qui n'avait pas lâché les barreaux de la grille. Le roi de Tennesia ordonna tout à coup une torche pour pouvoir mieux voir son visage.



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