Chapitre 21

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« La mort n'est pas la pire chose dans la vie : le pire, c'est ce qui meurt en nous quand on vit. »

-Maxime Ducret

La joue écrasée contre le sol toujours aussi froid, Éléonore passa une main tremblotante sur son visage. Ses doigts effleurèrent sa bouche entrouverte avant de s'échouer sur son lit de pierre. Elle ne se sentait même plus vivante. Simplement, elle respirait. Son cœur battait lentement, fatigué par ses efforts pour continuer de gérer un organisme à bout de force.

« Eroz est ton maître » souffla le murmure dans ses oreilles. Éléonore ne savait même plus si cette voix existait réellement. Cette phrase s'encrait dans son cerveau, progressivement, douloureusement. Elle tenta soudain de se retourner mais chaque mouvement, chaque inspiration trop profonde était un supplice. Elle décida donc de rester comme elle était : allongée, fatiguée, détruite.

Le son grave de la voix revint alors. Dans sa tête, elle tournait en boucle, comme un tourbillon infernal. Ses pensées ? Elle n'en avait presque plus. La fausse mélodie émise par ce murmure s'imposait d'elle-même, désormais. Éléonore caressa la fine couche d'eau qui glissait sur le sol. La prochaine vague mortelle n'allait pas tarder à arriver, elle en était certaine. L'interminable exécution ferait son grand retour une énième fois, afin de la noyer. Enfin, presque. La phrase quitta alors quelques secondes ses pensées. Éléonore vit le visage d'Eroz. Il devait être très intelligent. C'est un grand homme, s'entendit-elle penser avant de pouffer dans un soupir térébrant. Elle réussit, grâce à un élan de courage, à se retourner. Elle souleva sa tête de quelques centimètres avant de la faire retomber violemment contre la pierre.

« Tu dis n'importe quoi ! » se réprimanda-t-elle en se cognant de nouveau le crâne.

Et comme si ses pensées étaient connectées à l'eau brûlante, elle entendit le bruit sourd de la machine qui se remettait en route. L'heure était arrivée. Elle allait se noyer.

Lorsqu'elle fut presque totalement submergée par la mort, elle ouvrit les yeux pour lui faire face. Et elle eut une dernière parole en tête avant de se laisser emporter par la douleur :

Eroz est mon...

*

Alrick et Troy se dépêchaient pour retrouver Éléonore, sans jamais s'arrêter. Les battements de leurs cœurs rimaient avec le rythme de leur course folle. En tournant à gauche, ils tombèrent dans un couloir étroit, plus court que les autres. Là, un garde se tenait debout, la main agrippant le manche de son épée. Les deux hommes ne cessèrent pas pour autant de courir vers le Tennesien qui venait de se mettre sur la défensive, son arme pointée vers eux.

— Arrêtez-vous ! leur cria-t-il.

Il était indécis. Il ne savait quoi faire entre les imiter ou les attendre de pieds fermes. Il choisit rapidement la seconde option et fléchit ses jambes, prêt à se battre contre ces intrus.

Alrick se jeta le premier dans la gueule du loup. Les épées s'entrechoquèrent furtivement. Le son se propageait sur toute la hauteur du couloir. Troy vint aider son partenaire, inondant leur adversaire de coups, plus forts les uns que les autres. Le guerrier fut bientôt submergé. Alrick réussit à faire envoyer valdinguer l'épée de l'adversaire. Le Tennesien, désarmé, leva les mains sans attendre en s'écartant des deux Galïens qui semblaient déterminés et remplis de rage. Mais Alrick fit quelques pas en avant, prêt à planter son épée dans sa chair. Il saisit son arme avec les deux mains pour avoir plus de force. Mais il sentit soudain la main de Troy attraper son poignet pour l'arrêter. Alrick lui lança alors un regard interrogateur.

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