« La vérité, l'âpre vérité. »
- Stendhal
— C'est l'assassin de ton frère, Éléonore.
— Quoi ? lâcha-t-elle dans un souffle, le fixant avec un air de dégoût.
Comment pouvait-il utiliser son frère ? Son propre fils ! Eroz. C'était Eroz qui avait tué Loïs !
Elle se recula alors d'un pas, et secoua légèrement la tête, ne sachant même plus quoi dire. Skalias la sentait partir. Elle ne le croyait pas. Ses yeux, bientôt emplis de larmes retenues depuis trop longtemps le dévisageaient. Ça faisait mal. Le roi avait mal.
— Ecoute-moi, finit-il par dire en tendant sa main vers sa fille qui se préparait à quitter la salle.
— Non ! Tu es vraiment prêt à tout pour satisfaire le caprice de Troy !
— Mais Troy n'a rien à voir là-dedans. Par contre Alrick...
Skalias souffla du nez, serra les poings. Il prit alors sa voix la plus autoritaire, la plus dure. Celle qui impressionnait tous ceux qui l'avaient entendu, même sa fille.
— Alrick a trahi le Royaume. Je ne comprends toujours pas comment mais il a réussi à savoir nos intentions.
— Quelles intentions ? demanda Éléonore qui voulait que tout ça se termine.
— Nous voulions attaquer Tennesia par surprise. Tu le sais. Nous étions prêts. Galïa s'était préparée pendant des mois.
Le roi commença à marcher. Il fit quelques pas vers la droite, attiré par la lumière éclatante qui comblait la pièce.
— Si personne n'avait prévenu Eroz, toute l'armée ne se serait pas éteinte.
Éléonore sentit son cœur se serrer. Tellement fort. Sa bouche s'entrouvrit naturellement. Elle ne respirait plus. Même déglutir lui était impossible. Un seul son inaudible sortit entre ses lèvres tremblantes.
— Éléonore... murmura Skalias, en voulant serrer sa fille dans ses bras.
— Alrick... arriva-t-elle à prononcer avec difficulté, en retenant le mieux qu'elle le pouvait ses sanglots. Alrick a... donné nos plans à Eroz ?
En le disant, un sentiment la prit de toute part : la rage.
— Oui, répondit simplement Skalias avant d'expliquer qu'il avait ensuite pris la fuite.
Galïa avait découvert sa trahison et la suite, elle la connaissait déjà.
Éléonore n'attendit pas une seconde de plus avant de quitter la pièce. Elle courut. Elle poussait sur ses jambes autant qu'elle le pouvait. Dans ce long couloir, Éléonore ne se souciait plus de rien. Ni de l'immensité, ni de la beauté, ni du calme. Car tout son corps bouillait. Ses yeux étaient couverts d'un voile humide tandis qu'elle entendait la voix de son père lui dire qu'Alrick avait tué son frère. Rien n'avait de sens. Surtout quand la réalité venait éclater les souvenirs d'un souffle chaud sur ses lèvres. Quand cette pitoyable vérité lui donnait la rage de la vengeance. Quand elle se rendit compte qu'Alrick se tenait sur le pont, et elle, en haut des larges marches du Palais.
Sa respiration s'accéléra alors. Il regardait le fleuve dans lequel les cendres de son frère s'étaient échouées. Éléonore s'avança rapidement vers lui. Ses bottes raclaient le sol, alertant Alrick qui se retourna. Il fit un sourire en coin, se demandant ce que Skalias lui avait dit. Il sortit du pont, détaillant de mieux en mieux son visage. Pourquoi avait-elle les joues rouges ? Le regard aussi sombre que la nuit ? La mâchoire serrée ?
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Betrayed
ParanormalDepuis des mois maintenant, le royaume de Galïa est à la recherche d'un traître nommé Alrick. Alors que tout le monde s'agite à l'annonce de sa récente arrestation, Eléonore, la fille du roi, reste indifférente. Tout ce qui compte, c'est s'entraîner...