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Les vêtements, de rage, furent jetés à terre. Jayu ne s'accorda pas même de garder son caleçon. Lui aussi rejoignit son uniforme de collégien chiffonné. Un costume censé exciter le client, habits de jeunesse. Debout, devant un miroir grave et insensible, il s'observa plus directement qu'il ne l'avait jamais fait, se tortura à parcourir ce dans quoi il devait vivre. De haut en bas, il y avait ce corps d'ange, cet enfant parfait et sage, cette anomalie.

S'approcher, poser une main sur le froid miroir et constater la réalité : être soi-même aussi lisse que la surface d'une glace. Ne pas trouver sur son corps les avantages des aspérités. Lisses étaient ses membres longs, la peau de son menton, le devant de son cou. Il chercha en vain à gonfler ses biceps. Tâter le muscle et remarquer sa finesse. Puis, faire glisser ses doigts sur son thorax, y sentir les côtes saillantes.

Enfin, il osa poser ses mains sur son sexe. Devant ses testicules imberbes, il fit rouler son pénis entre ses doigts. Il avait l'impression de rouler une cigarette. Il en jugea la taille : elle ne dépassait pas celle de son auriculaire. Si Jayu n'avait pas vu tous ces hommes à poils, il aurait pu ignorer l'aspect original de son sexe. Mais en l'occurrence, il savait.

Il plongea ensuite dans la noirceur de ses pupilles et se fit le reproche de n'être qu'un mâle inabouti. Le miroir lui renvoya sa haine. Ses poings se fermèrent, jusqu'à ce que ses ongles marquent l'intérieur de ses paumes closes.

Quand il avait pris la décision d'avouer ses sentiments à Hyuna, il n'avait pas eu peur que son amour soit à sens unique. Il avait même peu d'illusion à ce sujet. Il aurait accepté de vivre avec elle, de partager sa vie sans qu'elle ne soit capable de lui rendre l'amour qu'elle lui inspirait. Il aurait accepté de rester à une certaine distance, si c'était ce qu'elle souhaitait, de ne jamais prendre la place de l'amant.

Mais, c'était une chose de renoncer à l'amour de Hyuna et une autre d'accepter de la céder. Impossible de rester philosophe en regardant quelqu'un devenir son amant. Il allait en souffrir. Il en souffrait déjà. Il aurait voulu provoquer un duel contre ce mec, mais il n'en ferait rien. Par lâcheté, par réalisme, parce que massacrer son rival ne ferait pas de lui un homme. Ça ne le rendrait pas moins petit, pas moins malingre. Même victorieux, il serait toujours sans intérêt pour Hyuna.

À présent qu'il savait avec qu'elle genre d'homme elle aimait flirter, il ne pouvait rien faire, à part maudire son reflet, nu devant son miroir.

Les gangsters ne grandissent jamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant