Chapitre 10: Rendez vous

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« Un départ sans un mot, c'est pire qu'un abandon, le silence est une trahison. »

Marc Levy

2019, Paris, 10e arrondissement, samedi 24 aout

Ce soir, je vais dîner dans un célèbre restaurant du 8e arrondissement avec Gabriel pour cela j'ai enfilé une robe blanche échancré au niveau des hanches, enfilé des escarpins noirs, tracé un long trait d'eye liner et mis un rouge à lèvres rouge carmin. Pour ma coiffure, j'ai décidé de boucler mes cheveux tout simplement.

J'ai décidé d'envoyer un message à Gabriel après notre entretien, on a parlé tranquillement et de fil en aiguille, Gabriel m'a invité à diner.

Ce soir, c'est compliqué pour moi de me rendre de chez moi (18e) au restaurant à tel point que pour faire ce trajet je mets 1h, heureusement j'avais de l'avance.

Quand j'arrive devant le restaurant, je galère pour trouver une place comme toujours à Paris. Gabriel est là alors je me dépêche, il porte une chemise blanche et une veste noire par-dessus, un jean et des baskets. Je restai planter là le temps de réfléchir si je devais lui faire la bise ou pas. J'avançai d'un pas et lui fis la bise contre toute attente. Il n'avait pas changé de parfum, le même qu'avant, cela m'avait manqué.

-Ça va ? demanda-t-il

-Comme il y'a dix minutes, lui répondis-je en rigolant

Gabriel me prit le poignet ce qui me provoqua des frissons, je ne sais pas s'il le remarqua mais moi je l'avais bien remarqué. La seule question que je me posais était : « c'est quoi ce bordel ? ». Il m'emmena à l'intérieur et demanda notre table (qu'il avait apparemment réservé, suis-je si prévisible ?). Toujours en me tenant la main. Il me tira la chaise comme un gentleman. Je m'assis.

-Je ne pensais pas que tu voudrais me revoir, me chuchota Gabriel.

-À vrai dire moi non plus, murmurai-je à mon tour.

-Je ne mélange pas travail et vie privée. D'habitude, continuai-je

-L'interview était bien écrite. Tu as un vrai talent. Ce que tu as marqué, ça m'a touché.

-C'était la vérité. Je ne m'étais pas attendue à ce que tu me donnes ton numéro.

-Tu m'as bien plu et tu m'as rappelé quelqu'un aussi.

-Ah bon, qui ?

-Une fille de mon ancien lycée, c'était mon ami aussi, elle te ressemblait beaucoup, avec plus de formes, elle s'appelait Ambre, raconta-t-il

-Je peux te dire que ce n'est pas moi, dis-je en rigolant

Ironiquement, c'est sûr. Mais il est passé crème celui-là. Même pas il s'en est rendu compte. Seulement c'est moi.

-Alors comme ça, tu as 26 ans ? me demanda-t-il pour couper le silence

-Et oui. 1 quart de siècle +1.

-Tu ne les fais pas. On dirait plus que tu as une vingtaine d'année.

Ce sujet ne me plaisait pas vraiment, la prochaine question aurait surement été sur ma date de naissance et j'aurais été une nouvelle fois contrainte à lui mentir. Et aussi bizarre que cela puisse paraître je n'aimais pas lui mentir. Même si j'aimais les prendre pour des cons.

-Tu repars bientôt à l'étranger prendre des photos ?

-Non, je prends une pause, je dois lancer mon studio, j'ai des interviews à faire, donc non pas tout de suite mais d'ici un an et demi. Ça me manque un peu quand même.

-Tu m'étonnes, combien as-tu fait de pays en tout ?

-Je ne les compte plus depuis longtemps. Brésil, Argentine, USA, Groenland, Danemark, Inde, Japon, Vietnam, Australie, Afrique du Sud, Congo et beaucoup d'autres.

-Ouah, tu as fait tous les continents. Quel est le voyage qui t'a le plus plu ?

-Mon trip dans le Sahara pendant 3 semaines, ça a été le plus émouvant mais aussi le plus enrichissant. Il y'avait aussi Malte, qui est une île que l'on ne connait pas vraiment et pourtant elle renferme une histoire et des paysages à couper le souffle. J'aimerais bien y retourner. Avec toi peut être, me dit-il en me faisant un clin d'œil

Je rigolais naïvement, consciente qu'il était en train de me draguer.

-Et toi, où as-tu voyagé ? me demanda-t-il cassant le blanc qui s'était installé

-Pas autant que toi, l'Angleterre, le Maroc, l'Italie, l'Espagne, le Portugal. Et c'est tout.

-Pourquoi as-tu voyagé si peu ?

Euh...ok

-Mes parents sont morts, je suis une enfant de la DDASS, on n'a pas le temps pour les voyages dans ce cas-là.

Bip...bip...bip.... Le détecteur de mensonges sonne.

-Oh je suis...

-Ne t'excuse pas, je ne veux pas de ta pitié, j'en ai eu assez dans ma vie.

Cette dernière phrase provoqua un blanc dans notre conversation, plus personne ne parlait. C'était un mensonge pour la DDASS mais c'était vrai j'avais eu trop de pitié dans la vie et j'en pouvais plus. Gabriel baissa la tête et seul le bruit de sa fourchette raisonnait dans ma tête. J'attrapai mon verre de vin rouge et en but une gorgée.

-Désolée, je n'aurais pas dû te parler comme je l'ai fait.

Le pire n'était pas que je l'avais dit, le pire était que je le pensais. J'étais désolée, vraiment, pour ce qui allait se passer.

-Je comprends, ne t'inquiète pas.

-Mais tu vois, cela a toujours été comme maintenant, les excuses, la pitié, vingt ans que je l'endure.

Il ne répondit pas, il n'y avait pas de réponses de toute façon. Tout ce qu'il y'avait été des non-dits et je tenais à ce que cela reste comme tel.

Quelques instants plus tard et dans un silence interminable, le serveur revint, prit nos assiettes et repartit.

-Bon, changeons de sujet, t'es marié, t'as des enfants ? lui demandai-je

-Penses-tu vraiment que si j'étais marié je serais en ce moment, ici et avec toi ?

-Tu gagnes 1 point.

-Et non, je n'ai pas d'enfants et je n'ai pas la mère non plus. Et toi ? répliqua-t-il

-Ni père, ni mari, ni enfants.

-On est seuls tous les deux alors.

Le serveur revint nous porter les desserts et l'addition.

En deux temps et trois mouvements, on avait englouti nos desserts et on se retrouvait dehors. Nous nous fîmes la bise en nous promettant de nous revoir.

TOUT GÂCHEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant