Chapitre 16 : Cimetière

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« Les cimetières sont pleins de gens irremplaçables qui ont tous été remplacés. »

Georges Clemenceau

2020, Paris, 18e arrondissement, dimanche 15 mars

-Suis-moi, lui implorais-je quand il fut debout.

La peur qu'il détache les autres me traversa l'esprit alors que je continuai à avancer.

J'avais confiance en lui étrangement alors je ne me retournai pas. Je me demande encore si c'était de la naïveté ou tout simplement de la pure connerie. Sûrement les deux.

Je refermai la porte et la lumière derrière nous.

-Tu vas me relâcher comme ça aussi facilement ? me demanda Gab quand on monta les escaliers.

-Qui a dit que je te relâchais ?

-Alors pourquoi je suis là ?

Pourquoi était-il là ? Même moi je ne savais pas.

-SI je suis honnête, je te dis que je ne sais pas. Je dois aller au cimetière et...

-Pourquoi moi ? me coupa-t-il

-Parce que c'est toi.

Secrètement, j'aurais aimé dire « parce que tu m'as fait aimer tout ce que je détestais, toi par exemple ».

Maintenant je le savais, j'étais tombée amoureuse de lui alors que je me le refusais. J'étais amoureuse de lui alors que je le détestais. Comme le dicton le disait : « il n'y a qu'un pas entre l'amour et la haine ».

-Ce n'est pas une réponse, Ambre, dit-il en rigolant.

-Je ne peux donner que celle-là. Alors tu devras t'en contenter.

-Pourquoi tu ne m'as pas dit pour ta fille ?

-Parce que Jade n'a pas d'enfants, lui dis-je droit dans les yeux.

-Je ne pensais pas que tu étais Jade avec moi.

-J'étais Jade avec tout le monde, répondis-je froidement, la Jade qui demeurait en moi reprenait le dessus.

Prise d'un énorme doute, je lui demandai :

-Tu ne tenteras pas de t'en aller, s'il te plaît ? J'ai besoin de toi pour la fin.

-Je ne tenterais rien, Ambre. Je ne t'abandonnerais pas une deuxième fois.

-Merci.

-Comment s'appelle-t-elle ?

-Qui ? lui demandai-je sur la défensive

-Ta fille.

-Louna. Elle s'appelle Louna.

Il hésita quelques instants puis me questionna :

-Pourquoi ?

-Parce que j'adore ce prénom. Elle a été mon rayon de soleil dans la nuit noire, comme la lune. Alors ce prénom a été comme une évidence.

-C'est beau. Tu veux qu'on y aille ?

J'hochai la tête, pris les clés poser dans la marmite, lui jetai un bref regard et refermai la porte derrière nous.

-C'est sa fille, n'est-ce pas ?

Une nouvelle fois, j'hochai la tête pour seule réponse. Lui comprit de suite. C'était sa fille et en hochant la tête je venais de lui renvoyer son erreur en pleine face.

-Je suis désolé, me dit-il une nouvelle fois.

Je souris franchement parce que je ne savais pas comment réagir, le geste fut instinctif. Notre relation de toute façon était plus basée sur ce qu'on ne disait pas plutôt que ce qu'on disait. Nos plus belles paroles resteront celles que l'on n'arrive pas à prononcer.

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