Chapitre 18 : Par jalousie

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« La jalousie n'est pour une femme que la blessure de l'amour propre. »

Anatole France

2009, Paris, 9e arrondissement, mercredi 18 novembre

Aujourd'hui, je suis une nouvelle fois seule pour manger au self, personne ne veut s'asseoir à côté de moi même quelqu'un que je ne connais pas, je commence à m'y habituer bientôt un mois que tous les jours cela se passe comme ça. Mes parents ne sont pas au courant que plus aucun de mes amis m'adressent la parole, ils ne savent pas non plus que tous les soirs je fais semblant d'appeler Alice alors que je parle à un téléphone éteint parce qu'Alice ne répond qu'une fois sur six quand les amis pour qui elle a pris parti ne sont pas là pour elle, pour la juger, pour me juger. Mes parents ne savent pas non plus que je pleure le soir dans mon lit, pour ma vie, pour mon harcèlement parce que cela se nomme comme tel, pour ma mère beaucoup trop parfaite qui elle ne remarquera jamais rien, pour mon père qui la suivra dans n'importe quelle situation. Et comme toujours mes parents ne remarquent rien.

Au lycée, on ne m'adresse pas la parole, je suis la bête noire, la peste, le choléra, la fille qu'il faut éviter sous peine d'attraper une de ses maladies incurables. Mes anciens amis ne me parlent pas sauf Maël, Chloé et Alice, quand les autres ne sont pas là. Elena ne supporte ni mon regard ni ma présence ce qu'elle me fait bien comprendre. Mila et Maddy, les inséparables, suivent comme de bons toutous, Alice jamais loin derrière. Chloé ne traîne plus qu'avec les gars, elle m'adresse la parole quelques fois. Romain s'est écarté de tout le monde, il ne parle plus beaucoup à ce que je vois. Il n'y a que Cameron et Maël qui arrive à lui décrocher quelques mots. Maël lui reste comme d'habitude, il parlait à tout le monde comme si de rien n'était. Emma n'était pas revenue depuis l'aveu de Maël soit 5 jours. Gab restait le garçon solitaire, sans avis, neutre, sans vrais amis, là sans être là. Jordan ne me parlait pas de toute façon il ne m'avait jamais parlé avant. Cameron ne me parlait pas non plus, il me souriait quelques fois quand il me voyait seule à la cantine notamment. Logan m'évitait le plus possible, il ne répondait plus à aucun de mes appels et messages pourtant j'en avais laissé beaucoup, Dieu seul sait combien, je savais aussi qu'il les voyait. Rien n'avait bougé pour autant.

Je m'approchais de mon casier en sortant du self comme d'habitude personne n'osait soutenir mon regard. J'eus une certaine appréhension que mon casier regorge de peinture ou de farine comme dans les films heureusement on n'était pas dans les films, je pris alors mon sac de sport et me dirigeai vers le gymnase, je serais sûrement la première arrivée dû à mon avance de 35 minutes. Alors je ne décidai pas d'aller me changer mais de m'installer dans le gymnase où je regardai le cours précédent. Je fuyais la cour, je fuyais les cours, je fuyais les regards, je fuyais les gens qui ne regardaient pas, je fuyais les autres, je fuyais le comportement des autres.

Ma prof de sport s'approcha de moi :

-Ambre ? Que fais-tu là ? Tu es très en avance ?

-Oui, madame, désolé, je ne devrais pas être là, lui répondis-je et je ne sais pas si dans mon regard elle vit que je ne pouvais pas retourner dehors alors elle me dit :

-Non, il n'y a aucuns soucis, on se voit tout à l'heure.

-Merci, la remerciai-je quand elle se retourna.

Bizarrement pour moi, ce fut comme si elle me sauvait la vie. En m'évitant de retourner dans la cour, c'était comme si elle me sauvait la vie. Une action si futile que rejoindre la cour me terrifiait à présent. Je ne savais pas combien de temps j'allais devoir éviter la présence des autres mais cela commençait à être long, très long, trop long.

Je compris que la sonnerie avait retenti quand les élèves qui étaient dans le gymnase commencèrent à sortir. Alors je me doutais que mon cours débuterait d'ici une dizaine de minutes puisqu'il fallait que l'on se change. Alors je me dirigeai vers la sortie et tournai vers le vestiaire des filles. Elles étaient déjà toutes là, les filles de mon groupe et les filles de ma classe. Elles parlaient entre elles sans faire attention à moi comme si j'étais invisible. JE NE SUIS PAS INVISIBLE !

TOUT GÂCHEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant