Chapitre 26 : Seule

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« Rien ne ressemble tant au malheur que la solitude. »

Alfred de Musset

2010, Paris, 9e arrondissement, mardi 2 février

Chloé a très rapidement tourné sa veste. Après notre discussion, le lendemain, elle avait changé de place et de casier. Je n'ai pas eu le temps de m'expliquer ou de lui parler même pas eu le temps de comprendre que tout avait déjà changé. Elle me manque, je n'ai plus personne pour me soutenir ou pour parler. Je la croise de temps en temps comme tout le monde mais elle détourne vite le regard comme si j'étais la peste. Au final, je ne parle plus avec aucun de mes anciens amis. Plus personne ne me laisse le bénéfice du doute. Pourtant tous les dimanches, on se retrouve pour un dîner avec nos parents et on fait mine de rien. Pendant les dîners, Chloé n'arrive pas à me regarder ou à m'adresser la parole mais comme d'habitude nos parents ne remarquent rien. Ils croient toujours que nous sommes amis, les meilleurs amis du monde, ils ne sauront jamais que leur fils a tenté de me violer, que pourraient dire le monde sur le fait que le principal héritier des Muller est un violeur ? Personne ne me croirait comme Chloé l'a fait. Je passerai pour la mytho encore une fois.

Je rentre dans le lycée après être descendu du bus, aux oubliettes le skate, d'une part il fait nuit le matin maintenant en plus il fait beaucoup trop froid, alors j'ai privilégié le bus. Dans mon bus, pas grand monde ce matin, personne ne parle, on se voit mais on se parle pas, écouteurs dans les oreilles, comme des enfants aveuglés par le monde.

Je me dirige directement vers mon casier pour chercher mes manuels, je regarde quelque temps les personnes autour de moi, Chloé est quelques mètres derrière moi à son nouveau casier avec Alice, sa nouvelle amie, plus faux-culs que jamais. Mila et Maddy ne sont pas très loin en train de me regarder et de rigoler, de quoi parlait-elle ? Ma curiosité piquait à vif voulait savoir de quoi elles discutaient mais je ne pouvais pas aller m'incruster, j'essayai de passer non loin d'elles, j'entendis quelques brides, « traître », « vengeance » et « amour ». Je savais donc que c'était bien de moi qu'elle parlait.

La sonnerie retentit, direction salle de classe. Je m'installe à ma table, personne ne s'assoira à mes côtés aujourd'hui, personne ne viendra me parler de ses problèmes de cœur en plein milieu d'équations en cours de maths.

Cela me rend triste de ne plus avoir d'amis, de ne plus pouvoir me confier, parler de choses normales sans que l'on me juge.

Je croisai une nouvelle fois Mila et sa copine Maddy, elles me regardaient toutes les deux, toujours en rigolant. Je me demande bien encore ce qu'il peut se passer. La grande question de ses derniers mois.

On se mit chacun à nos places tandis que le cours débuta. Je ne me concentrai pas tellement sur le cours préférant plonger mon regard dans le froid du mois de février. Les arbres sont nus de toutes feuilles. Les routes blanches et le ciel semblent habiter par la fraicheur.

Le prof me sortit de mes pensées :

-Mademoiselle Robert, je vous dérange ?

Je tournai la tête vers lui, « non pas du tout, désolée monsieur » lui répondis-je, en vérité, il me dérangeait je n'avais qu'une envie, et ce n'était pas de faire des équations, mais de partir de la salle et rentrer chez moi. Hélas je ne pouvais lui dire ceci. Il se retourna vers le tableau et je me remis à contempler l'extérieur. Sans que le prof ne me fasse un autre quelconque reproche.

Je quittai très vite la salle une fois le cours terminé, je crois même que j'étais la première sortie. Je me dirigeai vers mon casier pour la deuxième fois de la journée pour prendre le manuel du prochain cours. J'ouvris la porte après avoir glissé le code, la porte ouverte, je trouvai des photos accrochées sur tous les « murs » du casier, des mots aussi, « prostituée », « traître », des photos de moi et mes anciens amis à Halloween, à certains anniversaires, à la sortie du collège. Je me retournai dans tous les sens pour voir si quelqu'un avait pu voir le contenu de mon casier. Il y avait beaucoup de monde mais les gens étaient plus concentrés sur leurs potes et leurs discussions que par mon casier. Ça me rassurait. Mais qui avait pu mettre ce bordel dans mon casier ? Qui avait le code de mon casier ?

Je claquai la porte en prenant le manuel dont j'avais besoin, par chance il avait été épargné, sans même refermer la porte de mon casier à clé maintenant que l'on avait mon code.

Je n'étais plus acceptée par mes amis, par le lycée, ou dans les soirées de mes amis. Je n'étais bien nulle part. Plus personne ne voulait de moi ici. D'ailleurs mes parents n'ont plus ne veulent plus de moi, rien que lorsqu'ils me regardaient, je sentais rien, ni amour, ni une once de sentiment. Je n'avais plus ma place nulle part.

Je rejoins ma classe avec quelques minutes de retard, je frappai à la porte avant que le prof me cria : « entrez ! ». « Bonjour monsieur, désolé pour le retard », lui dis-je en avançant jusqu'à ma place.

-Ambre, avez-vous un billet de retard ?

-Non, désolée. Je peux aller m'asseoir ?

-Non, tu vas aller chercher un billet. Tu as plus de dix minutes de retard, c'est inadmissible.

Je refis le chemin inverse sous les rires de mes camarades menés par Mila et Maddy. Je baissai la tête par reflexe et quittai la salle. Je me dirigeai vers la vie scolaire mais après maintes réflexions, pensées qui me murmurèrent de partir. Ce que je fis. Je quittai le lycée sans un regard vers ce monstre.

Je savais pertinemment que mes parents ne seraient pas là. Je savais aussi qu'un savon me serait passé ce soir. Mais sur le moment je m'en foutais, mon envie et mon besoin était de partir.

Le prof allait m'attendre, ce serait bien le seul.

TOUT GÂCHEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant