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« C'est cool que tu sois venu me voir, c'est une belle surprise. En plus tu sais que j'ai vraiment hésité à y aller ?

Il me l'annonça d'une voix semi-amusée, certainement à l'idée que j'eusse pu faire le déplacement pour rien. Un chaste baiser fut déposé sur ma joue, puis Taehyung recula lentement son visage du mien sans me quitter de ses yeux presque pétillants une seule seconde. Il était ravi, je le voyais. 

Et moi aussi.

Contrairement à ce que j'aurais pu imaginer, je n'étais pas très embarrassé au sujet des sextos. J'avais redouté rougir telle une écrevisse ou détaler tel un lapin, mais rien de tout cela. Car je me raisonnais: ces messages, on avait été deux à les envoyer. S'il ne semblait pas gêné, je n'avais pas non plus à l'être. Et puis, j'avais confiance en lui, ce n'était pas un étranger ou une simple connaissance.

- Je suis... content d'être avec toi.

Il me jaugea longuement du regard. Comme par réflexe, mes paupières se fermèrent lorsque sa main vint ébouriffer tendrement ma crinière désormais affreusement désordonnée. Je le trouvais assez tactile aujourd'hui. Nos récents rapprochements lui donnaient sûrement un esprit d'initiative et d'entreprise, plus prononcé que d'habitude. Au fond, j'aimais bien. Je laissai échapper un sifflement faussement mécontent, avant de lui faire un merveilleux et époustouflant doigt d'honneur.

C'était une démonstration d'affection, rien d'autre. 

- Arrête tes bêtises et-

- Cesse donc tes sottises gnagnagna, l'imitai-je tout en me retenant de lui ricaner au nez.

Et alors que je me préparais à courir très vite, à fuir tel le lâche que j'étais, il m'attrapa habilement par les épaules et me renversa à l'aide de ses jambes, avec une telle maîtrise que je ne pus malheureusement rien anticiper. Mon dos n'était qu'à quelques centimètres d'entamer un flirt avec le sol, de faire sa brusque rencontre; c'est ce qui serait arrivé si sa ferme poigne ne me retenait pas. Mes orbes stupéfaites plongèrent dans les siennes, amusées et moqueuses, qui me détaillaient avec un calme presque insolent.

- Lâche-moi couillon ! Je palis en me rendant compte de mes paroles compromettantes. Un sourire en coin naquit sur ses lèvres, il me narguait ouvertement. Non me lâche pas finalement, remets-moi debout !

- Je t'aurais presque écouté, mais j'ai comme l'impression que tu vas recommencer. 

J'assimilai alors sa nuque à une bouée de sauvetage, je m'y accrochais désespérément par peur qu'il ne me laisse piteusement tomber au sol. Même si au fond j'en doutais, la situation était telle que je n'avais pas les idées claires. D'autant plus que ma position ne me permettait pas de contre-attaquer ou de me relever de moi-même. Il me maintenait en équilibre, de sa propre force, assurant mon impuissance. Mon visage rageur se nicha dans le creux de son cou, irrémédiablement résigné à ne pas me décoller de lui.

- Tu sens bon, grognai-je tout de même pour la forme, tandis que mes narines s'emplissaient merveilleusement de ses effluves reposantes.

Elles auraient presque pu me faire oublier ma position actuelle. Presque.

- J'ai pris une douche après mon cours.

- Ouais parce que ta sueur elle sent le chameau. 

- Fais gaffe ou je te lâche. 

Son murmure, au lieu de me faire paniquer, m'électrisa tout entier.

Je ne répondis rien dans l'immédiat, me contentant de frémir à son souffle qui se répercutait perfidement sur l'épiderme fin de mon oreille. J'étais persuadé qu'il s'en rendait compte, et que ce petit manège durait pour cette unique raison. Taehyung était taquin, mais on savait tous les deux que c'était un simple prétexte pour amorcer un contact physique.

Et son plan parvenait à ses fins. J'avais cette terrible envie qu'il dépose enfin ses lèvres sur mon cou, qu'il s'y balade et qu'il le taquine. Comme la dernière fois.

- J-Je commence à avoir mal au dos.

Je ne trouvai que cette ruse, pas totalement vide de sens, pour me soutirer de ses griffes malveillantes. Enfin, surtout pour m'éviter un regain de désir sexuel en pleine rue de Séoul, un dimanche après-midi.

D'ailleurs, beaucoup d'habitants et de touristes s'étaient retournés sur notre passage, je ne m'en rendais compte que maintenant. L'impression d'être seuls au monde, voilà ce que j'avais ressenti. 

- Espèce de faible, il s'esclaffa en me ramenant à la surface. 

- Fais gaffe je peux mordre, maugréai-je dans ma barbe.

J'étirai rapidement mon corps, sentant mes muscles légèrement assommés par les péripéties que le malveillant venait de me faire subir. Je me devais, pour le peu de dignité qu'il me restait, de bouder encore un peu.

- Un ciné ça te dit ? »

Un large sourire vint outrageusement déformer mes lèvres, sans même obtenir mon autorisation. 

⎡Arabesques intimes⎦ ʈkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant