Douce Etoilée // z.m

1. Habit rouge

Je suis tombé amoureux de son reflet. De ses formes, de ses courbes, fines et voluptueuses à la fois, se dessinant dans une flaque d'eau, se trouvant juste devant le banc sur lequel je déversais des torrents de larmes, qui auraient suffis à eux seuls à remplir cette petite crevasse que toute l'eau de la pluie s'était évertuée à combler. Son portrait y semblait flou, mais je pouvais très nettement y voir, parmi ses quelques traits vagues et pleins d'erreurs, l'illusion parfaite que je m'étais faite de la femme de ma vie. Et même si elle n'avait jamais vraiment eu de silhouette précise, avec une forme de visages, d'yeux, mais aussi une couleur que je souhaitais plus que les autres, que ce soit pour le dernier point cité, comme pour ses cheveux, j'étais persuadé à ce moment-là que celle que je m'étais toujours imaginée dans mes rêves les plus fous était là, juste devant moi, comme un fantôme du passé qui venait me hanter.

Je n'ai pas osé relever la tête, et me retourner pour la regarder, par peur que je rompe cet instant magique, en voyant son véritable visage, ou en voyant sa mine ahurie en découvrant le mien. Qu'elle me reconnaisse, ou quelqu'un d'autre me reconnaisse, le nez rouge, les yeux de la même teinte, une mine décomposée défaite animant mon visage, mon corps, et ma vie, que je me devais de cacher, que ce soit pour mon propre bonheur, ou celui de mon manager d'ailleurs. Qu'elle soit décontenancée par les flashs, par les lumières se braquant sur moi, par les personnes m'arrivant dessus, par les cris qu'ils pousseraient rien qu'à ma vue. Alors j'ai continué d'admirer son image dans les reflets de l'eau, me délectant d'une chose qui allait changer le cours de ma vie : son manteau rouge. Je le vis d'ailleurs très vite partir, alors qu'un bus s'arrêta juste en face de nous, me laissant supposer que c'était celui qu'elle devait prendre tous les matins.