Chapitre 30

46 11 5
                                    

L'incompréhension déformait le visage d'Axelonnie. Elle essayait de rassembler les informations dans sa tête. D'après ce qu'elle avait compris, le Conseil surveillait les transformations pour éviter l'apparition des goules, justement. Cela n'avait donc aucun sens. À la mine perplexe de J.C., elle comprit qu'il en venait au même raisonnement.

— Le Conseil a une idée, de comment c'est arrivé? interrogea le lycan.

Maxime secoua la tête. De manière instinctive, tous les regards se tournèrent vers Stella. Bien qu'elle aimait être le centre d'attention, elle n'appréciait pas ces têtes ahuries tournées dans sa direction. Jambes croisées et lime à ongles entre les mains, elle cessa sa séance de manucure.

— Quoi?

Les deux hommes échangèrent un bref regard pour déterminer lequel des deux allait mettre les pieds dans le plat. Avec son âge avancé, la sirène possédait des connaissances, un savoir qu'ils n'avaient pas. Le souci était la susceptibilité de Stella concernant son âge. Elle supportait mal qu'on le mentionne, à moins que l'initiative ne vienne d'elle. Un détail qu'Axelonnie ignorait et elle ne se gêna pas pour dire tout haut ce que les deux hommes pensaient tout bas.

— Tu es vieille. Tu dois sûrement savoir des choses qu'on ignore.

Aussitôt, Maxime et Jean-Christopher se raclèrent la gorge, autant pour s'empêcher de rigoler que pour rattraper le coup. Ils ignoraient ce qui était le plus hilarant. Qu'Axelonnie traite Stella de vieille? Ou la tête consternée de la sirène?

— Ce que veut dire Axelonnie, c'est que tu es la personne la plus expérimentée ici en matière de surnaturel.

La sirène pencha sa tête sur le côté, les yeux plissés et les lèvres pincées. Elle fixait le sorcier, accusatrice. Il sauvait la mise à la serpillière, encore une fois. Toutefois, la banshee n'avait pas tort. Elle tapota l'accoudoir du fauteuil à l'aide de sa lime un moment, laissant volontairement un silence inconfortable s'installer. Ils étaient tous là, suspendus à ses lèvres et c'était agréable. Finalement, un sourire ourla ses lippes.

— J'ai peut-être une idée de ce qui s'est passé.

Cependant, elle comptait bien les faire mariner dans leur jus, parce qu'elle en avait la possibilité, parce qu'en jouant avec les nerfs des uns et des autres, elle effaçait de leur esprit l'image de la fragile Stella. Parce qu'elle préférait être la garce que la victime ou la chose à plaindre. Parce qu'elle ne méritait pas d'attirer l'empathie.

— Mais avant de vous dire quoi que ce soit, qu'elle minauda, j'aimerais bien me sustenter.

Ses yeux à la fois marron et vert fixaient le sorcier. D'un mouvement de tête, elle désigna la cuisine, là où se trouvait encore le morceau de bras. Maxime hésita un moment.

— Maintenant?

Cette question sonnait comme une supplique. Un môme a qui on fait manger des épinards de force.

— Tout de suite alors, sois un ange, va me chercher de quoi manger.

Il acquiesça, mais il lui était compliqué de réprimer son dégoût. S'il avait chargé J.C. de récupérer un morceau de cadavre à la morgue, c'était bien parce qu'il n'était pas très à l'aise avec ça. Cependant, comment pouvait-il lui refuser ça? Une fois devant la viande, il était comme un con, à ne pas vouloir la toucher. Amusée, la sirène contemplait la scène. Elle n'avait jamais autant aimé les cuisines ouvertes.

— Un souci, mon chou?

— Non, tout va bien.

— Parfait! Je veux bien que tu me découpes quelques morceaux, s'il te plait.

Où que tu sois... je te retrouveraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant