Le chant de la sirène s'élevaient dans les air, il dansait à travers l'obscurité et le chaos, il s'enroulait autour des âmes humaines, semblable à une couverture duveteuse et réconfortante. Les spectateurs de ce concert surnaturel arrêtaient de penser, accueillant ces notes mélodieuses d'un sourire. La peur persistait, toujours ancrée dans leur chair mais elle était camouflée par la voix de la sirène. Axelonnie et Maxime assistaient à la scène, fascinés. La banshee comme le sorcier sentaient le pouvoir de Stella glisser sur leur peau, cette magie débordait. Une main invisible essayait de se faufiler à l'intérieur de leur tête pour manipuler leurs pensées. Les humains présents retournèrent à l'intérieur de la péniche d'un même et seul pas. Cette vision de soldat de chair et malléable arracha un frisson à Axelonnie. Maxime posa une main dans le dos de la banshee.
— Retournons à la voiture en attendant.
— Non, je veux voir ce qui va se passer.Elle ignora les protestations de Jean-Christopher et de Maxime. La curiosité la dévorait bien plus que sa peur. Les goules étaient parties. Pour une raison qu'elle ignorait, les goules avaient fuit, le danger s'en était allé avec eux. Ses pensées s'embrouillaient au même titre que ses émotions. Le lien existant entre elle et Maxime la choquait. Cette magie entre eux, cette connexion... c'était aussi grisant que terrifiant. Dans le fond, elle éprouvait surtout le besoin de s'éloigner du sorcier pour rassembler ses esprits. Elle s'engouffra dans la péniche à la suite de Stella. Aucune musique mais les spots lumineux tournaient encore. Les jeux de lumières épileptiques contrastaient avec l'inertie des humains rassemblés dans la salle. Il y avait à peine une quinzaine de personnes, les autres avaient fuit depuis déjà bien longtemps.
Stella s'approcha d'une jeune femme. Son corps tremblait de terreur, ses vêtements et ses cheveux tâchés de sang relataient l'horrible scène s'étant jouée plus tôt. Pourtant, elle demeurait immobile, ses yeux vissés sur la silhouette de la sirène avec admiration. Stella lui adressa un sourire bienveillant et posa une main sur sa joue.
— Comment tu t'appelles?
— Ombeline.
— C'est un joli prénom. Tu as passé une excellente soirée, n'est-ce pas?
Les yeux de Stella s'intensifiaient, prenant cette teinte surnaturelle, d'un émeraude pure et étincelant. La jeune femme engageait une lutte intérieure, elle voulait crier et pleurer, en proie à une hystérie latente, pourtant elle afficha un sourire des plus radieux.
— Oui.
— C'est juste dommage que cette attaque d'animaux sauvages soit venue tout gâcher.
Les lèvres de la jeune femme se mirent à trembler, son sourire perdant aussitôt de sa bonne humeur.
— Ce sang, ces cris, cette hystérie ambiante, tu sais, c'est normal d'avoir peur. Mais ce n'est rien de plus qu'une attaque de bêtes sauvages. Rien de plus que des bêtes... pas de monstres, pas de créatures, juste des bêtes sauvages.
Les souvenirs de la jeune femmes s'embrouillèrent. Elle se rappelaient de ces créatures massives et rapides mais parfois, l'imagination et la peur déforment la réalité. Ombeline se sentait idiote d'avoir cru un instant à autre chose.
— Quant à cette conversation, bientôt, tu pourra l'effacer de ta mémoire. Je peux compter sur toi?
Elle hocha la tête et Stella scella son hypnose d'un baiser. La jeune femme partit s'installer à une table et la sirène répéta ce manège avec les personnes restantes. A chaque nouvelle hypnose, Stella s'affaiblissait. Son teint tournait au verdâtre. Sa peau luisait de transpiration. Elle n'avait plus rien de charmant. Trop inquiète par l'état de santé de Stella, Axelonnie remarqua à peine l'arrivée de J.C. et Maxime.
— On doit partir, indiqua Maxime à l'intention des deux femmes. La police arrive.
Il restait encore quelques ivrognes mais le temps manquait. Stella s'avança vers ses acolytes d'un pas titubant. Elle regrettait l'époque où elle hypnotisait des foules entières sans le moindre effort... mais bientôt ce pouvoir qui lui a été volé, elle le récupérera. Son regard se posa instinctivement sur Axelonnie, son issue, sa porte vers la réussite. Conscient que la sirène peinait à avancer, J.C. vint à elle et décida de la porter en dépit des maigres protestations de la russe.
Ils quittèrent la péniche, prêt à reprendre le pont lorsqu'un groupe composé de quatre hommes et d'une femme se tinrent face à eux. Ils portaient des tenues différentes et pourtant... les couleurs étaient assorties : un haut rouge et un pantalon noir. Axelonnie remarquait la pâleur presque maladive de leur peau et elle comprit : des vampires. Parmi ces anonymes, Axelonnie reconnu Vincent, le bras droit du roi des vampires. Ce dernier jaugeait avec curiosité l'équipe de bras cassés face à lui.
— Vous venez après la petite fête, comme c'est dommage, ironisa la sirène.
Même dans un état pitoyable, elle trouvait la force d'être détestable. Le grand roux s'avança d'un pas, la tête droite et le dos raide. Il ignora la remarque de Stella et se concentra uniquement sur Axelonnie. Vincent l'étudia un instant puis reporta son attention sur le carnage. Les humains que Stella avait hypnotisés sortaient de la boîte de nuit, hagards. Les gyrophares de polices trouaient l'obscurité. Les forces de l'ordre approchaient.
— C'est toi qui a crié, n'est-ce pas?
Vincent adoptait un ton paternaliste alors pourquoi Axelonnie avait la sensation que sa vie se jouait en cet instant précis? Un simple oui ou non allait sceller son destin. Cette impression profondément ancrée dans ses entrailles, elle ses jambes tremblaient. Aussitôt, Maxime posa une main derrière son dos pour la rassurer et prit les devant.
— Comme vous, on a entendu le cri. Alors nous sommes venus. Ce qui est étrange c'est la lenteur avec laquelle vous êtes arrivés. Votre rôle est précisément d'assurer la sécurité de la population contre les créatures surnaturelles et de protéger le secret de votre existence. C'est le deal.
— Nous avons été retardé, se justifia le bras-droit.
Stella éclata de rire avant de tousser, crachant par la même occasion une gerbe de sang. Cela ne l'empêcha pas de prendre la parole.
— Retenu par la peur de vous faire démembrer. Tu n'es pas réputé pour ton courage, Vincent.
Le vampire, bien qu'attaqué dans son amour propre, s'efforça de ne pas rappliquer. Axelonnie remarqua malgré tout ses poings se serrer. Quant aux autres à ses arrières, ils se tendirent, prêt à attaquer à la moindre consigne du bras-droit.
— La police est là, on devrait partir.
La petite voix d'Axelonnie peinait à se frayer un chemin. Cependant, elle marquait un point, ils le savaient tous.
— Votre humaine a raison. Rentrez chez-vous. Nous nous reverrons bientôt, je pense.
Ces dernières paroles sonnaient comme une menace. Axelonnie déglutit en croisant le regard du vampire. Il savait. Il a compris ce qu'elle était. La main de Maxime toujours dans le dos de la banshee, il la guida jusqu'à la voiture qu'elle avait abandonné sur le parking.
Jean-Christopher installa la sirène dans son auto et décida de la ramener chez elle. Seule avec Maxime, la banshee n'eut d'autre choix que de monter en voiture avec lui. Elle garda le silence, se remémorant inlassablement les récents événements. Partagée entre l'envie de pleurer et celle de se battre, elle était surtout fatiguée et incapable de prendre la moindre décision. Quand la voiture s'arrêta devant l'immeuble sécurisé de Maxime, elle ne tiqua même pas. Chez le lycan, chez le sorcier, dans les deux cas, ce n'était pas chez elle.
— Axelonnie, ça va aller?
La banshee opina de la tête mais ni elle, ni lui, n'étaient dupe. Beaucoup trop de sang. Beaucoup trop de morts. Axelonnie était habituée à prendre la fuite mais cette option n'était plus envisageable, pas avec cette marque dans le cou. Avec tous les événements, personne, même pas elle, n'avait pris le temps de se pencher là-dessus. Samantha l'avait condamné, volontairement ou non, à assister à cette hécatombe.
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Où que tu sois... je te retrouverai
ParanormalToutes les histoires d'amour n'ont pas une fin heureuse. C'est le cas d'Axelonnie qui voit sa vie partir en fumée une nuit d'Halloween. Une dispute qui se transforme en meurtre l'oblige à prendre la fuite. Mais vous savez ce que l'on dit... le passé...