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- Depuis quand tu n'as plus mangé quelque chose ? s'inquiétait Gaëtan qui me suivait durant mon service derrière le comptoir.

- Je me débrouille très bien, répondis-je.

- Est-ce que tu bois au moins autre chose que de l'alcool ? demanda-t-il.

Je posai une bouteille pour lui frapper l'arrière du crâne.

- Oui, Gaëtan. Je bois autre chose que de l'alcool. Je ne suis pas encore totalement alcoolique.

- Cora... hésita-t-il. Laisse-moi te cuisiner un repas, et quand tu auras fini ici, on pourra se poser au bord du lac, ça te va ?

Je considérai sa proposition. Je devais avouer avoir besoin de passer une soirée tranquille, particulièrement si elle était en sa présence, et en même temps, j'avais véritablement envie de lui parler de mon plan, ce qui sous-entendait une soirée bien moins agréable.

- Peut-être, lui accordai-je. Au moins un dîner.

Un sourire éclaira son visage, ce qui me réchauffa le cœur. Il quitta mon comptoir pour filer dans mon appartement, ce qui me laissait enfin la place pour travailler. Je m'exécutai avec un sourire. La soirée était plutôt agitée, par rapport à d'habitude, ou peut-être que c'était juste une impression puisque je n'avais plus travaillé à cette heure-ci depuis un bout de temps, mais le temps passa donc vite avant l'heure de fermeture. Je dus néanmoins réveiller un client.

- Est-ce que vous êtes mort ? demandai-je poliment.

- Hein ? Je suis mort ?

Je secouai la tête de désespoir.

- C'est une question. Est-ce que vous êtes mort ?

- Euh... non ? supposa-t-il.

- Alors vous pouvez quitter mon bar, me réjouis-je, alors qu'il se levait en grognant.

Je m'étirai, et vérifiai que tout était à sa place, ou qu'il n'y avait pas de cigarette encore allumée trop près d'un meuble en bois. Je n'avais pas une très bonne assurance, ni l'envie d'en changer. Je montai donc à l'étage après avoir verrouillé la porte, pour trouver Gaëtan qui terminait de cuire des escalopes qu'il avait sûrement trouvé dans mon frigo, et qu'il assortissait avec des haricots et quelques champignons. C'était un dîner simple, donc, mais je n'avais rien mangé d'aussi bon depuis un petit bout de temps, alors je me jetai sur l'assiette qu'il m'avait préparée.

Il s'assit en face de moi à la table, avec un sourire satisfait. Il mangeait moins vite, je suppose que lui mangeait des repas réguliers, mais apparemment, j'avais toujours besoin qu'on prenne soin de moi. Je m'en voulais un peu, j'en avais marre d'être une sorte de responsabilité pour lui. Je ne voulais surtout pas être un poids pour lui et le freiner.

Ça avait longtemps été comme ça. J'avais totalement dépendu de lui avant mon entrée dans l'Arcane, et même si ça avait été rapide, j'avais détesté ce sentiment de dépendance. J'étais très paradoxale en ce sens.

Gaëtan me proposa ensuite de nous poser près du lac, comme au bon vieux temps, et j'acceptai. Nos vieilles habitudes me manquaient, et ça faisait un sacré bout de temps que je ne m'étais plus rendue au bord du lac avec lui.

Nous y sommes allés à pied, comme j'avais la chance d'avoir un appartement à proximité de l'endroit. J'étais soucieuse d'avoir une bonne nuit de sommeil, et Gaëtan dut me retirer mon téléphone portable pour que j'arrête de regarder l'heure, n'ayant pas de montre.

- Passe une soirée tranquille avec moi, et je t'aiderai demain avec le bar, marchanda-t-il. Ça te va ?

- Comme l'impression de me faire arnaquer, soupirai-je en souriant néanmoins.

L'Arcane : AbsolutionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant