Je demandai à Gaëtan de m'emmener avec lui, la prochaine fois qu'il rendrait visite à sa mère à l'hôpital. Je ne l'avais plus vue depuis si longtemps, et je commençais presque à ressentir de la honte en y pensant. Après tout, avec tout le temps que j'avais bien pu passer avec Gaëtan, elle était très proche. J'avais presque plus d'affection pour elle que pour ma mère, particulièrement depuis mon retour.
Il retourna chez lui dans la soirée, et je pris du temps pour moi-même, tentant de ne pas trop réfléchir. Je devais bientôt voir ma mère, et après une dizaine d'années sans la voir, je n'étais pas sûre de quoi faire. Je stressais pour des détails sans importance, comme comment j'allais m'habiller. Je voulais au fond de moi-même qu'elle voit ce qu'elle avait laissé derrière elle. Je voulais qu'elle regrette ses actions. Je voulais lui montrer que sur tous les plans, je valais mieux qu'elle.
J'hésitai à demander à Gaëtan de venir avec moi, mais je savais que ce n'était pas possible. Ma mère ferait demi-tour en sachant qu'il y avait quelqu'un d'autre avec moi, même s'il n'était pas totalement un inconnu. Je regrettais de ne pas avoir prévu l'éventuelle présence d'une deuxième personne. Je savais que j'aurais du mal à affronter seule cette rencontre, mais d'un autre côté, il s'agissait d'un échange très privé, et je n'aimais pas spécialement non plus l'idée qu'il y ait quelqu'un d'autre avec nous, même s'il s'agissait de Gaëtan.
Je fus toutefois extrêmement reconnaissante pour les messages que je recevais de Kieran et de Gaëtan, qui m'encourageaient.
Il était temps de partir, et je me tenais immobile devant ma porte, me demandant quel mouvement faire en premier. J'étais presque paralysée par la tension que je ressentais, mais une autre part de moi voulait me forcer à avancer et même courir vers le lieu de rendez-vous, qui n'était pas très loin de mon bar. Au lieu de suivre cette partie de mon esprit, je marchai tranquillement vers le lieu de rendez-vous. Je ne savais même pas comment j'y arrivais.
Arrivée là-bas, j'essayai de calmer les battements affolés de mon cœur. Je ne comptais pas faire une crise d'angoisse à ce moment-là, et encore moins en cet endroit, où il n'y aurait peut-être personne pour m'aider. Je n'étais même pas sûre que Katja vienne. Je ne l'espérais même qu'à moitié. Après tout ce temps, je ne savais même plus si c'était une bonne idée, et je finis par me raccrocher à ma mission, me rappelant que je faisais tout ça pour une raison. Pour une meilleure chance de futur.
Parfois, je me disais que je vivais pour travailler. J'aimais mon bar comme personne, et si je n'étais pas la plus grande fan de mon travail dans l'Arcane, pour des raisons évidentes, je l'avais toujours exécuté sans broncher et avec un zèle efficace. C'était ce qui rendrait mon absence dans l'Arcane regrettable, et rendait la proposition de l'Empereur surprenante. Peut-être avait-il un remplacement en tête, peut-être voulait-il m'écarter, vraisemblablement, ou peut-être estimait-il qu'on pouvait se passer de ma présence. Dans tous les cas, une fois que j'en aurais fini avec cette mission, je serais plus ou moins indépendante de l'Arcane, et je n'aurais plus à me soucier de ces histoires.
Perdue dans mes pensées, je ne vis Katja que quand elle fut presque en face de moi. Je me levais précipitamment de mon banc, un peu trop droite pour avoir l'air naturelle. Elle n'avait presque pas changé. Quelques cheveux gris striaient sa chevelure aussi noire que la mienne, et nos yeux verts si semblables se rencontrèrent. Son regard me semblait avoir changé, sûrement plus froid qu'autrefois. Mais j'avais du mal à m'en souvenir. Je la dépassais de quelques centimètres, désormais, et j'en ressentis un peu de fierté.
Elle sourit, mais la chaleur de ce geste ne sembla pas atteindre ses yeux, sans que j'y fasse réellement attention. Je la revoyais enfin., après tant de temps.
- Maman, l'accueillis-je, et ma voix faillit se briser sur ce mot, pourtant si court.
Deux syllabes et trop d'émotion.
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L'Arcane : Absolution
AksiABSOLUTION nom féminin (latin absolutio) Acte par lequel le prêtre pardonne les péchés. Cora, vingt-deux ans, propriétaire d'un bar à la vue de tout le monde, tueuse à gages dans les petites ruelles sombres. Elle vit de ses mensonges et son sang-fr...