Chapitre 21

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Lorsque Leïla sentit sa prise s'affermir et le léger soubresaut contre elle, une haine indescriptible la saisit. À cause de la jalousie d'une gamine pourrie gâtée, ils avaient faillis être séparés pour toujours. Elle eut peur de l'intensité de sa réaction, elle n'avait jamais voulu la mort d'un être humain, mais à cet instant elle avait envie de détruire la vie de la coupable de cette histoire.

Elle réfléchit à son identité. Il n'y en avait qu'une qui était susceptible de commettre ce délit, et qui possédait en prime les compétences nécessaires. Une seule était assez fourbe pour cela, dominée par sa jalousie maladive qui ne la quittait jamais. Une seule était prête à employer le meurtre pour parvenir à ses fins. Elle redressa sa tête et tira légèrement sur les cheveux de Jamal afin qu'il relève son visage vers elle.

« Il s'agit d'Émilira, n'est-ce pas ? »

Son regard se voila et il hocha doucement la tête.

« J'en ai bien peur, les poisons c'est son rayon.

- Et vous avez des preuves ?

- J'en aurai.

Sa voix transperçait d'assurance. Il était déterminé à rassembler le moindre petit indice susceptible de la faire tomber. Il était las de son impuissance et voulait qu'elle paye pour tous les malheurs qu'elle lui avait causé. Déjà depuis leur plus tendre enfance, elle n'en faisait qu'à sa tête, agissant avec égoïsme et cruauté. En grandissant, son caractère ne s'était pas arrangé. Son père lui cédait tout et accédait au moindre de ses désirs.

Jamal était en colère contre elle mais surtout contre lui, cet homme qui était censé l'élever et l'éduquer afin qu'elle devienne une adulte responsable, en avait fait une créature perfide motivée par ses propres intérêts, prête à se tâcher les mains de sang pour arriver à ses fins.

Il n'avait malheureusement aucune preuve, et bien qu'il les détestait, il était sûr qu'elle n'était pas innocente dans le décès de ses parents. Ils étaient morts dans d'obscures circonstances, une maladie inconnue dont personne n'avait jamais entendu parler jusque-là et qui n'avait fait qu'eux comme victimes. Étrangement, ils revenaient d'un voyage au royaume de Cheim, sa terre natale, quand le mal les avait frappé, les foudroyant moins d'une semaine plus tard. Dès le lendemain de l'annonce de leur décès, elle était apparue à la porte palais, tel une fleur tombée du ciel, réclamant une audience avec lui.

Elle avait insisté pour rester et l'aider à organiser les funérailles. Il avait accepté, n'étant pas en état de se disputer avec elle. Durant tout son séjour, elle s'était comportée comme si elle était déjà la reine, donnant des ordres à ses domestiques, les épuisant sous la charge de travail. Il avait été obligé de la renvoyer quand elle avait fait fouetter l'une d'entre elles parce qu'elle était tombée de fatigue éclaboussant le bas de sa robe. C'était Zaïna, le chaperon de Leïla, et elle serait morte ce jour-là, s'il n'était pas intervenu en chassant son bourreau du pays.

Son oncle, le roi de Cheim et père d'Émilira avait fait pression sur lui pour que sa fille intègre la sélection et il n'avait eu d'autre choix que de s'y plier, refusant que sa décision soit à l'origine d'une guerre entre leur deux pays.

Mais aujourd'hui, il regrettait de l'avoir laissée revenir. Son château était sens dessus dessous depuis qu'elle était là et ses domestiques étaient obligés de tirer à la courte paille pour savoir qui allait s'occuper d'elle. Elle n'était jamais satisfaite et piquait une crise à la moindre contrariété. Une légère caresse sur sa joue le sorti de ses sombres pensées.

« Alors ne faite rien tant que vous n'avez aucune preuve solide contre elle. »

Elle le suppliait de ses yeux, espérant qu'il ne fasse rien d'inconsidéré sur le coup de la rage et la colère qui le rongeait.

« Ne mettez pas en péril une alliance aussi importante à cause de moi. »

Il secoua la tête de dénégation.

« Ce n'est pas seulement pour vous que je le fais. C'était sa voiture qui a fauché la femme enceinte et si j'avais bu le thé, je serais peut-être mort à l'heure qu'il est. D'autant qu'elle est suspectée de nombreux autres crimes dont on n'a jamais rien pu prouver. »

Il lui raconta l'histoire de ses parents et cette nouvelle la fit frissonner. Il avait raison, elle ne pouvait pas rester impunie. Malgré tout un mauvais pressentiment l'habitait et son instinct lui soufflait de ne pas intervenir. Elle avait la certitude que s'il la renvoyait un grand malheur s'abattrait sur le royaume. Elle était plongée dans ses pensées et il dû lui prendre sa main, qui avait caressé ses cheveux et qui maintenant pendait dans le vide, afin de la ramener à la réalité.

« Qu'y a-t-il eazizati ? »

Elle tourna son visage vers lui pendant qu'il lui caressait délicatement la joue, songeur.

« J'ai un mauvais pressentiment Jamal.

- À propos de ce qu'il se passe ? »

Elle acquiesça.

« Qu'est-ce que votre instinct vous souffle?

- De ne surtout pas la renvoyer.

C'était maintenant son tour d'être songeur. Ses sourcils se froncèrent sous l'intensité de sa réflexion et il reporta son regard sur elle au bout de quelques minutes. Elle était touchée qu'il lui demande son avis et qu'il l'estime suffisamment pour écouter ses présomptions fondées uniquement sur son ressenti et sur aucune raison valable.

« Je ne peux pas le faire ... Cela serait trop dangereux, pour tout le monde.

- Je sais ... »

Elle était abattue et le désespoir la gagna.

« De toute façon, si mon pressentiment s'avère juste, nous aurons un problème dans tous les cas ...

- C'est-à-dire ?

- Et bien, si vous ne l'épousez pas, un malheur s'abattra ... Éventuellement en tout cas. Mais si vous l'épousez un malheur s'abattra très certainement.

- Nous nous devons de choisir entre Charybde et Scylla ?

- Je le crains ...

- Je me dois de la renvoyer, c'est une question de justice, ce qu'elle a fait est beaucoup trop grave pour être pardonné. Mais ... Je veux bien vous laisser faire le temps que je réunisse toutes les preuves.

Elle était soulagée. Il lui faisait suffisamment confiance pour la laisser gérer une crise de cette ampleur et elle en fut très touchée, son cœur se gonfla d'amour pour lui et elle lui caressa la joue de son doigt.

- Je vous remercie.

Il hocha légèrement la tête et son regard brilla d'une lueur de désir. Il inspira brusquement et se décala d'elle afin de mettre une petite distance entre eux.

« Maintenant, vous devriez aller vous habiller ou je ne suis pas sûr de pouvoir continuer à me comporter en homme d'honneur avec la tenue que vous portez ... »

Elle rougit jusqu'aux oreilles et s'empressa de rejoindre la salle de bain. Avant d'y entrer, elle se retourna.

« Et vous, vous devez retourner dormir ... J'accepte même de vous prêter mon lit, si vous le souhaitez.

Elle n'attendit pas sa réponse pour entrer dans la salle d'eau. Jamal était heureux de la voir à nouveau le taquiner. Cela signifiait qu'elle allait mieux, même si son teint était toujours trop pâle à son goût et que des cernes violettes étaient encore visibles sous ses yeux. Il la regarda partir avec ce maudit drap autour de son corps, qu'il avait tellement envie de lui enlever. Les mois passés à ses côtés n'avaient fait qu'attiser son désir de la faire sienne, dans tout les sens du terme. Et ce fichu drap ne dissimulait pas grand-chose de son magnifique corps de déesse. Il avait dû user de tout son sang froid pour ne pas céder à la tentation de lui faire l'amour dans ce lit qu'elle lui avait innocemment proposé d'occuper.

Il inspira profondément et l'odeur de son parfum emplit ses narines, exacerbant encore plus son désir. Il gémit, au supplice. Il devait à tout prix sortir d'ici ou sinon, il ferait une bêtise, telle que rentrer dans cette satanée salle de bain la rejoindre. Il sortit de la chambre, comme s'il avait le diable à ses trousses pour regagner la sienne. Il se lava et s'habilla avant de s'enfermer dans son bureau et de convoquer Zayed afin de discuter des suites de cette affaire.

T01-L'intrépideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant