Chapitre 5.

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-chapitre un peu particulier, nous sommes directement dans la tête d'Alix qui parle donc à la première personne-

Qu'avons nous vécu depuis quatre ans ? Il est l'heure du bilan et les yeux de Léonard ne quittent pas mes lèvres, avides d'y trouver des réponses à ses questions.

Une quête identitaire toujours inachevée pour ma part, l'espoir peut-être de corriger mes problèmes en me forçant à connaître des expériences sexuelles.

La première d'entre elles au mariage de ma sœur.

Quel enfer.

J'ai repoussé Léo pour me retrouver un an et demi plus tard dans les bras d'un mec puant l'alcool, que je connaissais à peine puisqu'il venait de la famille de Valentin.

Ça a été horrible, envie d'hurler, des torrents de larmes dévalant mes joues. Mais je me suis accrochée, persuadée qu'il fallait que je passe ce cap une bonne fois pour toutes. La douleur a ravivé en moi de violents souvenirs qui se sont imposés par flash.

Les mêmes armes qui m'avaient blessée enfants ont de nouveau eu accès à mon corps. Et même si ce n'était pas le même homme et que celui-ci était sûrement trop ivre pour se rendre compte de mon désarroi, tout semblait beaucoup trop similaire.

Une expérience épouvantable. Que j'ai pourtant choisi de revivre autant de fois qu'il le faudrait pour que ce ne soit plus une séance de torture.

Ado, ma sœur avait une image de « fille facile », elle flirtait beaucoup, tout le monde pensait qu'elle avait énormément d'expérience. Ce n'était absolument pas le cas et c'était en réalité une façade derrière laquelle se cachait plutôt une « sainte nitouche ».

Je suis devenue l'exact opposé.

Car ne vous y trompez pas, quand on est une femme, les gens ont le droit de juger de ce que votre vie sexuelle fait de nous.

Quand vous êtes une femme, si vous n'avez pas de rapports sexuels, vous êtes coincée, ou bien vous respectez des principes religieux dépassés, dans tous les cas, vous n'êtes pas libérée.

Si vous choisissez d'avoir des rapports sexuel avec le même homme trop longtemps, on vous dit "mais tu es folle, il faut se faire des expériences, tu risques de passer à côté de plein de rencontres. Tu n'as pas envie d'autre chose ?" Vous n'êtes vraiment pas une aventurière.

Si vous enchainez plusieurs relations sérieuses, on vous dit que ce n'est pas normal, vous devez être instable.

Si vous avez des relations passagères, des coups d'un soir, vous êtes une salope.

Quel que soit le milieu dans lequel vous évoluerez, quel que soit le choix que vous ferez, des personnes qui savent mieux que vous, vous expliqueront ce que vous devez faire de votre corps.

Mon corps, on a décidé quand j'avais deux ans qu'il ne m'appartenait pas. Que quelqu'un d'autre pouvait en disposer, l'utiliser sans qu'aucun consentement ne m'ait été demandé.

Maintenant, je dois en plus me montrer forte, montrer que je m'en suis relevée, que je suis résiliante. Parce que ce monde n'a pas le temps pour les gens qui souffrent. Ou alors un petit peu, un mois ou deux, et puis après, il faut se secouer quand même, c'est une question de bonne volonté voyons. Si tu vas mal, c'est un peu parce que tu le veux bien, au fond.

C'est sûr que la dépression c'est le pied franchement, je vous conseille l'expérience vraiment, le kiffe total.

D'ailleurs si toutes les personnes qui disent aux dépressifs qu'il est temps de se secouer pouvaient expérimenter la dépression, je pense qu'elles trouveraient ça tellement chouette qu'elles non plus ne voudraient pas s'en sortir.

Temps perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant