Chapitre 1

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Tara

Un soleil éclatant écrase les paysages de vigne, d'oliviers et de petits champs de blé qui défilent devant moi à travers les vitres du taxi. Quel contraste avec Londres ! Le temps y était bien gris lorsque je l'ai quittée quelques heures plus tôt. Formentera est absolument magnifique pour le peu que j'en ai vu jusqu'à maintenant. L'île a un côté sauvage assez dépaysant.

Le véhicule bifurque pour suivre une allée bordée de pins, de genévriers et de cactus. Le chauffeur s'arrête devant l'entrée du complexe hôtelier. Je lui règle la course et il vient rapidement m'ouvrir la portière. Tandis qu'il s'occupe de décharger mes bagages, les yeux protégés derrière de grandes lunettes sombres, je contemple le bâtiment principal. Les rayons ardents de ce début d'après-midi se réverbèrent sur les murs blanchis à la chaux. Le jeu de transparence des nombreuses baies vitrées donne une impression de légèreté à l'ensemble. Je suis étonnée de constater à quel point cette architecture moderne aux lignes épurées s'harmonise parfaitement avec le paysage méditerranéen.

Le chauffeur dépose mes valises sur le trottoir en me souhaitant un agréable séjour. Son anglais est bien plus fluide que mon espagnol.

— N'hésitez pas à faire appel à mon taxi si vous avez besoin de vous déplacer sur l'île, ajoute-t-il, un large sourire aux lèvres, en me tendant sa carte.

Je le remercie et glisse le bristol dans ma pochette à bandoulière. Il cale ma valise de cabine sur la grande et me propose de me les emmener jusqu'à l'accueil.

— Merci, refusé-je, en tentant de maîtriser mon agacement. C'est gentil à vous, mais je devrais y arriver.

Cet homme ne cherche qu'à se montrer serviable. Seulement, je ne supporte plus de voir le regard de pitié des gens. Cela m'est devenu intolérable.

Après l'avoir salué, je saisis la poignée de mon bagage et avance prudemment sur la rampe en direction de l'entrée de l'hôtel. Je franchis les portes automatiques et ôte mes lunettes de soleil avant de me diriger vers la réception. Je ne suis pas surprise de reconnaître de la curiosité et de la commisération sur le visage de l'hôtesse. Elle se reprend néanmoins rapidement et un sourire un peu forcé anime à présent ses traits.

— Buenos dias. Bienvenido a Formentera, m'accueille-t-elle.

— Buenos dias. Gracias. Creo que tiene una reserva en nombre de Tara Daniels, tenté-je avec un accent lamentable.

La jeune femme vérifie l'écran de l'ordinateur.

— Ah, oui, voilà, poursuit-elle en anglais. Le studio au troisième étage. Auriez-vous une pièce d'identité, s'il vous plaît ?

Je la lui présente. Un studio ? Carrément ?

— Votre traversée en ferry a-t-elle été agréable ? m'interroge-t-elle aimablement tout en pianotant sur son clavier.

Je marmonne une réponse vague.

— Contrairement à Ibiza, Formentera est une île plutôt calme et paisible. Vous pouvez louer un scooter ou un vélo, c'est l'idéal pour se déplacer ici, enchaîne-t-elle dans un petit laïus qu'on devine bien rodé. Comme vous avez dû le remarquer, la plage n'est qu'à quelques minutes à pieds. L'hôtel vous propose de nombreuses activités...

À partir de là, je décroche et détourne le regard vers la baie vitrée. Celle-ci donne sur un jardin où trône une grande piscine naturelle qui inspire repos et sérénité. Lorsqu'elle disait qu'elle me trouvait une « mine affreuse », Élisabeth, ma grand-mère, ne plaisantait apparemment pas. Elle a choisi le lieu parfait pour un séjour farniente.

Juste une nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant