Chapitre 6

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Deux semaines. J'ai dû attendre deux putains de semaines avant d'avoir LA réponse. Et durant tout ce temps, je n'avais pas le droit de sortir, Mère Georgia préférait que je me repose et que je ne prenne pas le risque de croiser une personne malade. Et pendant ces deux semaines je ne cessais d'entendre parler de ma possible grossesse et de celle des neuf autres Servantes. Mais surtout de la mienne.

« L'Honorée Servante Lénore Clain, Servante de Connor Blademow, est-elle enceinte ? Selon les dossiers de son médecin, le docteur Amélia Donovan, et les dires de l'Honorée Mère Georgia, qui lui est affiliée, la réponse devrait nous parvenir d'ici quelques jours. Les paris sont lancés, beaucoup se disputent déjà concernant le sexe de l'enfant, acclamant dès maintenant un possible futur gouverneur. »

Estel annonçait ça sans sourciller. Elle avait beau être mon amie, je savais qu'elle ne manquait pas de jubiler sur la potentielle annonce de ma grossesse, pariant elle aussi avec ses collègues et autres amis. Et que ce soit à la radio ou à la télévision, ces mêmes paroles ressortaient régulièrement. À la télé elles étaient accompagnées des images de la Cérémonie. Au bout de quelques jours, dès que j'entendais mon nom j'éteignais immédiatement. Ça me stressait beaucoup plus.

Un après-midi, Connor est arrivé avec deux hommes qui portaient quelques cartons, les déposant dans son bureau. J'étais d'autant plus paniquée en les voyant débarquer.

« Connor, tu n'as pas le droit de déposer tes affaires ici. » Avais-je dit. « Et si je n'étais pas enceinte ?

–Ça ne fait rien, je m'avance seulement avec les cartons, ce ne sont que des affaires qui ne me servent pas. Ils m'encombrent chez moi, ils ne font de mal à personne dans le bureau. Je dois filer, prends soin de toi. »

Et il est reparti aussi vite qu'il était arrivé, emmenant les deux hommes avec lui. Je m'étais alors rendue dans le bureau et était restée dans l'embrasure de la porte, regardant les quelques cartons qui jonchaient déjà le sol. Mère Georgia n'allait définitivement pas aimer ça. Rapidement, Gianna m'avait rejointe.

« Il a confiance en vous. »

Elle avait essayé de me rassurer comme elle le pouvait, consciente de mon stresse.

« Bien plus que je n'ai confiance en moi. »

En me rendant dans le salon, j'entendis la radio venant de la cuisine et une fois encore, la voix d'Estel ne cessait de rappeler que je pouvais être enceinte. Je savais qu'elle n'avait pas le choix et qu'elle ne faisait que lire un texte qu'on lui avait écrit, même si j'étais certaine qu'elle pensait réellement ce qu'elle disait, mais je ne pouvais m'empêcher de la détester pour ça.

Le soir même je me suis couchée plus tôt, me disant que plus je dormais, plus mes journées étaient courtes et moins j'entendais jubiler à mon propos, mais le sommeil n'est jamais venu. J'avais terriblement peur de décevoir la Nation entière parce que tous les regards étaient rivés sur moi et le seraient jusqu'à ce que je donne naissance à un fils. Mère Georgia disait que le stress n'était pas bon et empêchait de tomber enceinte. Alors j'ai su, à ce moment même, que je ne l'étais pas. C'était inexplicable mais j'en étais certaine.

« Je vais tous vous décevoir. »

Ma voix n'était qu'un murmure. Gianna, qui venait de se coucher à côté de moi, posa sa main sur la mienne.

« Impossible. Vous êtes une élue du Saint, le monde vous vénère pour ça. Croyez en vous Lénore, une bonne nouvelle arrivera bientôt. »

Je m'étais contenté de lui sourire pour lui faire croire qu'elle m'avait convaincue, mais je savais que j'allais devenir la plus grande déception de Prioratum. Et ça s'est confirmé quelques jours plus tard lorsqu'en me rendant aux toilettes, je me suis rendue compte que du sang avait tâché ma culotte.

ServanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant