Cold Days In Heaven (A Season In Hell #2)

Chapitre 43

La boue avait un goût vaseux dans ma bouche. Je crachai et toussai en poussant sur mes bras pour m'extirper de la flaque dans laquelle j'étais tombé. À quelques mètres de moi, Lucifer était englué dans le marais, les ailes alourdies de vase verdâtres et de plantes aquatiques visqueuses. Il hurlait comme un animal pris dans un filet.

Ses yeux bleus se rivèrent sur moi et il se figea.

- Tu n'as aucune idée de ce qui t'attend, gronda-t-il. Aucune. Je ferais durer ton calvaire durant des siècles.

- On verra quand tu auras réussi à sortir du marais, rétorquai-je. Quoi que, si tu pouvais me faciliter la tâche et t'y noyer, je t'en serais reconnaissant.

Avec un grognement rauque, il s'élança en avant. Il ne sut pas s'extirper entièrement, le marais le retenant dans un immonde bruit de succion.

Je pris cela comme un signe divin qu'il fallait que je détale au plus tôt.

Je devais retrouver Raziel et Meriel. C'était mon objectif premier. Avec un peu de chance, ils étaient encore avec Michael. À partir de là, il ne nous resterait plus qu'à maîtriser le Séraphin et trouver un moyen de détruire Lucifer.

Je sortis du petit bois dans lequel se trouvait le marais et regardai autour de moi, tentant de me repérer. Rien ne m'était familier. Comment allais-je bien pouvoir retrouver les autres sans savoir où j'étais ? Y avait-il quelque chose dans ma panoplie de pouvoirs qui pourrait m'aider ?

Une voiture passa à toute vitesse sur la route et, par instinct, je fis un bond sur le côté. Pas qu'elle puisse me faire quoi que ce soit.

Je devais m'éloigner. C'était le plus important, pour l'instant. Perdre Lucifer. S'il s'extirpait du marais et que j'étais encore là, j'étais fichu. Une fois que je serais suffisamment en sécurité, je pourrais tenter de réveiller un pouvoir dans ma panoplie toute neuve dans l'espoir de retrouver Raziel et Meriel.

Je marchai jusqu'à un croisement et me glissai dans la première voiture qui s'arrêta. Je me fichais bien d'où j'allais, pour l'instant. Une fois que je serais assez loin de mon point de chute, ça commencerait à avoir de l'intérêt.

Au chaud, à l'abri dans la voiture, coincé entre un bébé et une petite fille qui me regardaient en gazouillant pour le premier, en piaillant pour la seconde, je tentai de me calmer suffisamment pour commencer une exploration intérieure. Je l'avais déjà fait avec Michael. J'avais survolé le cœur de mes pouvoirs d'archange, cette boule de lumière au milieu de ma poitrine. Il ne m'avait pas laissé l'explorer plus en profondeur, toutefois. C'était le moment de remédier à ce manquement.

Sauf que, entre les braillements de la gamine, les cris des parents pour la faire taire et les gazouillis du bébé, j'étais incapable de me concentrer. Je sortis de la voiture dès qu'elle s'arrêta à un feu rouge.

Je n'avais pas pris autant de distance avec Lucifer que je l'aurais espéré mais c'était un début. Je pouvais me cacher dans un coin et tenter de trouver en moi un moyen de retrouver Raziel et Meriel.

J'explorai les environs, une petite ville nichée à flanc de montagne. Je savais que j'étais dans un pays anglophone mais ça ne m'aidait pas tant que ça à me situer sur un planisphère.

Je découvris une grange abandonnée près d'un bosquet. La ferme était visible, aussi inhabitée que la grange, à quelques kilomètres. Une odeur de moisi et de foin humide m'accueillit lorsque je poussai les lourdes portes en bois. Des rats filèrent à toute vitesse se cacher. Je grimaçai et avançai prudemment, à la recherche du meilleur endroit pour m'installer.

Je me débarrassai un coin dans le fond de la grange, dans un noir profond et presque complet si ce n'était pour les fentes dans le volet qui couvrait la fenêtre cassée. Une brise froide qui se faufilait entre les lattes de bois. C'était des plus désagréables mais je devrais m'en accommoder. Ce n'était que temporaire.