Je suis allongée dans mon vieux canapé tout pourri, les yeux fermés, l'avant bras les couvrant entièrement. Ça fait des heures que je suis seule dans l'appartement à réfléchir à la manière la plus... Non, la moins « blessante » certainement d'annoncer à Allen que je veux mettre un terme à cette mascarade.
Ma nuque est poisseuse à cause de l'humidité qui réside ici. L'air conditionné s'est cassé apparemment et passer plusieurs centaines de dollars dans sa réparation ne me réjouit guère. Et même si j'ai reçu mon salaire hebdomadaire, ce n'est pas encore suffisant pour couvrir toutes les charges de réparation ou autres. Tous mes problèmes crapahutent dans ma tête ce qui me crée presque une migraine. Je réfléchis trop. Sortant de ma torpeur, je me rassois correctement, le dos complètement mouillé. Mes doigts frottent vivement mes tempes tandis que je me lève pour aller dans la cuisine. Il me faut quelque chose pour me détendre en attendant qu'Allen arrive. J'attrape un verre pour le remplir d'eau quand mon regard croise la vieille bouteille de whisky que j'avais sortie le soir où il a été viré. Et que ma vie a été chamboulée, cela va de soit. Une fine pellicule de poussière est déposée dessus, prouvant à quelle point je ne prends pas vraiment soin de mon habitat ou alors très peu ces derniers temps. Je souffle sur le bouchon puis le devise pour en verser un fond.
C'est alors que je pose mes lèvres sur le rebord froid du verre que j'entends mon téléphone sonner sur la table basse. En quelques pas, je l'attrape pour regarder qui souhaite faire face, sans le vouloir, à une Élie désœuvrée et sur le point de boire son premier verre. Je fronce les sourcils en voyant le mot d'indiquer puis décroche sans attendre:
" J'ai presque failli attendre jeune fille. La voix rauque de mon père retentit dans le combiné et je souris en l'entendant.
- Salut papa, ravie de t'entendre, désolé, j'étais quelque peu occupée pour répondre ou même appeler ...
- Ça fait des lustres que je n'ai pas entendu la voix de ma cadette et ça me sort une excuse pareille ? Tu ne prends même plus le temps d'envoyer un petit message et m'extirper des conversations agaçantes que je peux avoir avec ta mère ! Comment tu peux me faire un coup pareil ! Je glousse alors qu'il perd peu à peu son air faussement énervé. Tu sais que c'est une épreuve au quotidien et qu'avec ta sœur, ce n'est pas pareil. On ne peut pas se moquer de la même façon...
- Je sais bien papa, je sais bien. À défaut d'être la plus grande et la plus intelligente, je suis définitivement la plus drôle des deux... J'ajoute plus bas. Ne va pas dire ça à Allison, elle ne serait pas ravie de savoir que j'ai dit ça.
- Ce que tu viens de dire partira dans la tombe avec moi, je te le promets. Un petit silence s'installe entre nous tandis que je m'assois plus confortablement, mon verre dans une main, mon téléphone dans l'autre. Mise à part ça, je comprends ton silence radio, j'ai cru comprendre que tu voyageais beaucoup à autre bout du pays et prendre des nouvelles du vieux croûton que je suis, c'est clairement moins fun que de la jouer Sherlock Holmes.
- Sherlock n'était pas un journaliste papa.
- Ne me prends pas pour une truffe ma fille, je connais mes classiques !
- Comme si je pouvais en douter ! Nous rions en cœur. Mais attends, comment tu sais que je pars régulièrement pour New York ? Oh non, laisse moi deviner, c'est maman qui a appelée Allen pour avoir de mes nouvelles.
- Tu me ôtes les mots de la bouche Élie. Je l'entends souffler longuement, il doit probablement encore fumer une cigarette en cachette mais je ne préfère pas le lui faire remarquer. Bref, je voulais te dire que je suis très fier de toi et que ta mère aussi.
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Café Noir et Sucrette [Tome 2]
ChickLitQuelques mois après l'histoire racontée par Olivia Lawford, l'assistante d'un grand dirigeant d'une entreprise dans l'audiovisuel, Mediatics, à New York, voici celle d'une apprentie journaliste, Elie Cobb, de l'autre côté du pays, à Portland, Oregon...