32.

39 7 2
                                    

Willy

– Tu y arrives ? demandé-je à Chris, toujours en train de fabriquer une clé avec un fichu bout de bois.

Je trouve cela sordide, mais s'il y croit, après tout pourquoi pas. Seulement, je ne me fais guère d'illusion, une fois dans la serrure sa branche taillée finira par craquer. Et on restera dans cette cellule comme trois pauvres idiots qu'on est.

Non, en fait, je suis le seul idiot. Je râle beaucoup depuis qu'on est enfermé dans ces espèces d'égouts répugnants. Je râle, alors que je culpabilise énormément.

Je me souviens la nuit où j'ai parlé aux trois types de mon dortoir. Ils semblaient sincères et dénués de toute hypocrisie. Mais hélas, cela a été le contraire. J'ai été trahi. Gloria a su que des étudiants s'étaient enfuis. Qui aurait pu le savoir, hormis ces trois mecs et la sœur de Dane ?

J'ai eu un moment de faiblesse et d'égarement. Je me suis laissé emporter par l'honnêteté de la nuit. Il paraît que quand on discute la nuit, on est plus enclin à raconter les choses facilement. C'est la magie du monde nocturne et moi, je n'ai pas réussi à fermer ma bouche. Au lieu de ça, j'ai eu la langue bien pendue et on s'est fait piégé.

Je n'ose pas le leur dire. Je pense d'ailleurs ne jamais leur révéler ma faute. Je suis déjà emprisonné sous le sol, je ne veux pas en plus de cela être repoussé par mes amis qui avaient foi en moi.

Pour ne rien arranger, Dane s'est sacrifié de sorte à ce qu'on ne paye pas tous les pots cassés.

Je suis impardonnable. Je ne suis rien de plus qu'un crétin. Je suis maudit à tout jamais.

Pour soulager ma conscience donc, j'essaie au moins de réfléchir à un plan censé et non pas à un plan où un vulgaire morceau de bout de bois repose.

– Je sais ce qu'on pourrait faire et qui prendrait beaucoup moins de temps. Je pense même que c'est la meilleurs des idées qu'on ait eu. Alors tu devrais ranger ton arbre et me laisser faire.

– Pourquoi tu tiens tant à nous aider, toi qui est resté en arrière tout ce temps ? demande Chris, soupçonneux.

– Parce qu'on est dans le même bateau. Je n'ai pas le droit d'aider moi aussi ?

– Non, ce n'est pas ça le problème. Tu n'as jamais cherché à nous aider, ni même à faire quoique ce soit quand on était à Culpa pour te rendre utile. Brian, Dane et moi, on a fait tout le sale boulot. Et toi, Willy ? Dis-moi, qu'est-ce que tu as fait ?

– Les mecs, arrêtez, on recommence à s'en prendre aux uns et aux autres. Ne commettez pas cette erreur ! intervient Brian.

– Qu'est-ce que tu as à te reprocher pour te montrer si intéressé d'un seul coup ? continu Chris, ne me lâchant pas du regard.

– Je n'ai absolument rien à cacher. Si vous ne voulez pas d'aide, alors allez vous faire voir !

– Ne le prend pas autant à cœur Wade, intervient Brian afin de calmer la situation. Ce n'est pas grave s'il n'a rien fait Chris, chacun fait ce qu'il peut. Quand on sortira d'ici, il nous aidera peut-être à fuir, ou à faire autre chose. Toute personne a son utilité ! Ne le blâme pas si vite, je t'en prie Chris.

Ce dernier me fixe d'une air malsain. Il n'a pas confiance en moi. Je le sens. Il ne l'a jamais été d'ailleurs. Il a toujours prévenu Dane. Je le sais. Je les ai surpris à plusieurs reprises. Mais peu m'importe, tout ce que je voulais et que je veux encore, c'est de trouver Alibi. Après ça, il auront leur vie, et moi la mienne.

– Fais ta vie. Si on arrive à sortir d'ici, libre à toi de nous suivre ou pas. Mais je te préviens, ne nous trahis pas.

– Qui a parlé de trahison ? lancé-je, pour le narguer.

– Oralement, personne. Mais ton visage te trahit tout seul. Je sais quel genre de type tu es. Je l'ai très vite compris.

– Ah oui ? Rien qu'en m'observant ? Je pensais que tu étais un insensible, pas un télépathe.

– Ce qui est marrant, sourit Chris, c'est que même Brian n'a jamais su ce que tu pensais tout bas. Tu es fort. Donc pour moi, tu caches quelque chose. Tu n'es pas ce que tu prêtant être. Tu es un charlatan, un profiteur, un traître et un mani...

– Chris ! l'arrête Brian. Stop. Il faut qu'on se serre les coudes. Peu importe ce qu'on est. On se fiche pas mal de quel genre de personne se cache réellement au plus profond de nous. On a tous nos secrets, alors laisse le tranquille.

– Très bien ! s'écrit Chris, en levant les mains en signe de capitulation. À vos ordres, monsieur l'avocat du Diable.

En effet, j'ai un secret. Et il vaut mieux pour moi qu'il ne soit jamais découvert. Le fait de les avoir trahis pourrait me faire défaut si je dois fuir d'ici. Pire même, ils pourraient à la moindre occasion qui se présente, me livrer à Gloria rien que pour sauver leurs peaux.

La Bête HumaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant