Chapitre 3: Derrière les barreaux.

41 14 0
                                    

Anis se lève plus tôt.
Il attend l'arrivée des gardiens qui réveillent tout les autres détenus.
Quelques corvées lui sont assignées.

Au réfectoire, il s'assoit tout seul et ne parle pas personne. Ses codétenus le regardent agacés.
- Il fait trop le gars qui ne se mélange pas. Commence le toxicomane

- Ça se voit que qu'il n'est pas habitué à cette ambiance. Il veut s'effacer le plus possible. Rajoute moris le cleptomane.

Une autre table de détenu observe Anis. Le chef de la bande est assez curieux.
Ce dernier a toujours inspiré la crainte.
Des rumeurs et mythes courent sur l'énorme balafre présente sur sa joue droite.
Il est aussi respecté qu'un président dans la prison.
Le président se décide et se dirige vers Anis.

- Tu es qui ? Demande t-il en piochant du poulet dans l'assiette du gamin.

Anis le fixe deux secondes avant de répondre :
- Anis. Anis Rihoum.

- Hummm...Un petit nouveau. Tu m'as l'air d'un écolier. Et pourquoi tu es là ?

- J'ai tué mon beau père.

- Bah dit donc! Le cran tu le manges.

- Et toi?

Le président des détenus est surpris.

Il rigole.

- Tu me demandes qu'est-ce que j'ai fais? Fait il.

- Oui. Répond L'ado sans aucune hésitation.

Le président efface le sourire sur son visage.
Il met une claque à Anis. Les autres détenus observent tous.

- Qu'est-ce qui te fait penser que tu peux me poser des questions? C'est moi qui pose les questions et pas l'inverse. J'espère que c'est bien clair.

Il jette ensuite l'assiette d'Anis au sol.

- Nettoie. Ordonne t-il avant de s'en aller.

Les gardiens ne lèvent même pas le petit doigt.
Trois mois passent et anis s'habitue vite à cette nouvelle vie. Il se lève toujours plus tôt que les autres, effectue ses tâches sans jamais rien dire et reste éveillé longtemps avant de trouver le sommeil. Il reste des heures assis à même le sol. Le regard vide et sans vie. Dans cette petite cellule crasseuse.
Il revoit sa mère dans ses souvenirs. Il ne lui reste plus que ses souvenirs. Alors il les chérit autant qu'il le peut. Le président des détenus continue de lui donner des ordres: laver ses vêtements,débarrasser son assiette, lui nettoyer les pieds...
Et lorsque qu'il a un peu de temps, il lit des vieux journaux qui traînent dans la cuisine de la prison.
Puis un jour, Anis entend le gardien Jonas crier son nom.

- Vient avec moi. Y'a quelqu'un pour toi. Ordonne t-il d'un ton ferme.

Il l'emmène dans un couloir éloigné.

- Où on est? Ce n'est pas ici pour les visite. Fait anis observateur.

Le gardien sort quelque chose de sa poche.
Il le tend à Anis. C'est un roman de poche. L'ado ne comprend pas.

- Qu'est-ce ce c'est?

- Ça ne se voit pas ? C'est un livre. Je t'observe souvent. Tu as l'air d'aimer la lecture. Alors je t'offre ce vieux livre.

- Et pourquoi ? Pourquoi ce cadeau ?

- Si tu n'en veux pas dit le moi. Ne me fais pas regretter d'avoir voulu faire un bon geste.
- Non c'est bon. Je l'accepte.

Il regarde Jonas reconnaissant avant de rajouter :
- Merci.

- Mouais...c'est juste pour te distraire.

Un deuxième gardien arrive. Jonas fait semblant de sermonner Anis. Le gamin cache le livre dans ses vêtements. Jonas le remmène ensuite au réfectoire.
Anis attend d'être dans sa cellule pour lire. Le toxico se gratte le dos. Les deux autres détenus se racontent de vielles anecdotes. Moris sort du bas de son lit un paquet de biscuits. Il s'en gave sans perdre de temps. Il raffole des sablés à la vanille. Sa femme lui en amène à chaque fois qu'elle lui rend visite. Il demande toujours après son fils de six ans. Elle lui répond sans cesse qu'il voudrait venir le voir. Mais moris n'est pas d'accord.
Cet endroit n'est pas fait pour les enfants lui répète -il très souvent. Et puis, comment dire à sa femme qu'il a honte que son fils le voit dans cet état ? Et dans cet endroit si pouilleux ?
22h30 minutes.
Certains chuchotent dans leur cellule et d'autres se sont déjà envolés pour <<le pays des rêves>>. On entend les moustiques chanter ça et là.

Anis sort le livre. Il observe longuement la couverture. Comme s'il tenait un trésor entre ses mains.
« Les vagues de Virginia Woolf »
Il débute lentement sa lecture. Dans cette cellule chaude et silencieuse. La 602.
Il n'oubliera jamais ce chiffre. Très vite, la lecture devient son passe temps de soirée favoris.
Quant il lit, anis quitte la cellule. Woolf lui permet de penser à autre chose. Elle lui permet de s'imaginer autre part. Elle lui permet de rêver. De rêver ne serait ce que d'un espoir de liberté. Même seulement dans son esprit. Oui! Anis n'était pas seulement emprisonné physiquement. Il l'était aussi dans sa pensée. Rongé par tant de ténèbres. Rongé par ses idées sombres et envahissantes.
Les journées sont les mêmes. Tristes et décourageantes. Jusqu'au moment où il peut lire et s'évader. Jusqu'au moment où il peut se saisir de chaque mots du livre.
Soudain,il arrive à la dernière page. À la dernière phrase. Au dernier mot. Au dernier point. Et puis il recommence. Comme si ce livre représentait une inspiration quotidienne. Une source intarissable de lumière.

Un samedi après-midi :Heure des visite
Anis fait quelques tours dans la grande cours. Il transpire de plus en plus.
Le président des détenus l'observe assis près des arbres.
Anis l'intrigue.

- Il ne parle et ne se plaint jamais. Dit il a ses chiens de garde. Il m'étonne.

- J'ai entendu dire qu'il lit beaucoup. Réplique un autre patron de la tôle s'introduisant dans la conversation.

- Il a fait quoi déjà ? Tuer son oncle ?

- Tuer son beau père. Il l'a tabassé avec un pilon. Précise l'un d'eux.

- Apparemment il en a eu marre de voir sa mère se faire bousiller la geule par son homme. Rajoute un autre.

Anis s'arrête et souffle un moment avant de poursuivre sur une marche endurante.
- Il a fait ce qu'il fallait. Il l'a bien corrigé. Pense le président des détenus.

L'heure des visites est sur le point de clôturer.
Moris dit au revoir à sa femme. Le toxico serre très fort la main de sa sœur. Cette dernière lui tend un sac à dos.
- N'oublie pas de rester le plus sage possible pour qu'on réduise ta peine. Lui conseille t-elle.
Monica vient toujours voir son frère dès qu'elle en a l'occasion. Elle ne peut tout simplement pas l'abandonner. Il est une partie d'elle.
En effet, Geovanni n'est son grand frère de quelques secondes. Ils ont les mêmes yeux, la même bouche, le même sourire et les mêmes fossettes.
Moris se dirige vers la 602 lorsque le président des détenus s'approche. Moris tient un sachet bleu dans les mains. Le sachet contient une serviette neuve, trois savonnettes, du coton tige, un Tupperware remplit de spaghettis et un grand coca cola.
Le président se sert à volonté.
Il ne lui laisse qu'une savonnette.

Tu n'es pas condamné. Tome 1: Obscurité Où les histoires vivent. Découvrez maintenant