TAYLOR ADDISON - L'éveil du papillon [Tome 1]

CHAPITRE 2

Des tourbillons de couleurs remuent autour de moi en un mouvement saccadé. Je n'écoute que les battements de mon coeur tout en suivant Juliette me tenant la main. Ce n'est peut-être pas ma première fois cependant celle-ci est différente. J'éprouve le besoin urgent de prendre la fuite. Ce sentiment comprime ma poitrine avec violence et je pourrais presque me mettre à vomir devant tout le monde. J'ai toujours eu un instinct développer ce que Juliette appelle mon super pouvoir cependant je n'ai jamais eu autant de difficulté à l'ignorer. J'ai presque toujours raison lorsque j'éprouve un danger.

Mon amie continue d'avancer à travers la foule tout en me tenant la main ignorant le combat intérieur auquel je fais face. Je m'efforce de rester concentrer, mais une peur terrible m'effraie de plus en plus. Juliette et moi parvenons à rejoindre la grande terrasse bondée de monde. Mon ancienne équipe de cheerleading est bien évidemment présente accentuant mon mal être. C'est peut-être à cause de ça que je me sens aussi nerveuse. Je suis présente uniquement pour leur prouver que je ne suis pas une faible, mais n'est-ce pas ce que je suis ? J'aimerais être au fond de mon lit et prier intérieurement que ce cauchemar s'achève enfin.

Juliette lâche délicatement ma main pour rejoindre le buffet en secouant sa chevelure châtaine. Je me contente de passer devant mes anciennes coéquipières cependant Kate profite de l'occasion pour faire une remarque à l'ensemble des personnes l'entourant.

— Elle tente de racheter une réputation en se pointant ?

Ils ricanent méchamment espérant que ce comportement me déstabilise. Je baisse les yeux les yeux me brûlant et mes joues chauffant sous la honte. J'avais l'espoir que mon équipe décide de me soutenir et ignorer les propos de Kate malheureusement je me trompais lourdement. Un garçon me pousse involontairement en passant près de moi. Je perds l'équilibre et tombe dans la piscine sous les yeux de mes camarades. Les rires éclatent lorsque je sors la tête de l'eau le souffle court.

— Taylor ?

Juliette balance les verres qu'elle tenait dans la main puis saute à son tour dans la piscine. Elle est bien plus qu'une amie, elle se comporte comme une soeur que j'aime tant. Ma meilleure amie lève la main puis lève son majeur en direction des spectateurs.

— Un problème ? L'eau est excellente, elle permet de remettre les idées en place.

Je nage en direction de l'échelle puis sors la première, trempée de la tête aux pieds. C'était une mauvaise idée de me rendre à cette fête et prétendre que tout va bien. J'entends la voix de Juliette m'appeler, mais je continue de marcher. Hors de question de traverser toute la maison pour rentrer chez moi. J'ouvre le portail menant à l'allée tout en continuant d'ignorer les appels de mon amie. Une part de lui la remercie d'avoir sauté dans la piscine pour me rejoindre, mais ce plongeon n'aurait jamais dû avoir lieu. J'aurais dû rester dans ma chambre et ne pas la suivre à cette fête.

Je pousse le petit portillon me menant hors de la maison puis me retrouve sur la route. Des larmes roulent le long de mes joues tandis que je m'enfonce dans la nuit. Une main attrape fermement mon bras me forçant à me retourner. Aussi trempée que moi, Juliette fronce les sourcils en me faisant face.

— Tu aurais pu m'attendre tout de même !

— Non merci.

Elle écarte une mèche trempée de son front tout en continuant de m'observer. Je la repousse délicatement afin de poursuivre ma route.

— Ne sois pas idiote je vais te ramener en voiture. Tu vas être malade en te baladant toute trempée !

Je hausse les épaules.

— Je sécherais en marchant.

— Est-ce que tu serais en colère contre moi par hasard ? Je ne suis pas responsable de ce qui est arrivé, Taylor.

Je soupire puis me retourne. Juliette ne pouvait pas prévoir ce qu'il allait se produire. Je me sens idiote de lui en vouloir pour une raison aussi stupide.

— Pardonne-moi, la journée a été particulièrement longue. Je ne sais même pas comment j'arrive à ne pas craquer.

— C'est parce que tu es la meilleure ! Ils ramperont bientôt à tes pieds pour que tu reviennes dans l'équipe.

— Oui peut-être.

Notre conversation est interrompue par un bruit sourd effrayant. Une imposante obscurité prend lentement forme camouflant peu à peu la route ainsi que Juliette. Je m'accroche volontairement à son bras espérant ne pas la quitter dans ce brouillard. Les battements de mon coeur me font mal à la poitrine. Une odeur de putréfaction s'élève lentement dans l'air provoquant un haut-le-coeur.

Je recule précipitamment en sentant le souffle d'une autre personne près de mon oreille. Je lâche involontairement le bras de Juliette la perdant dans toute cette noirceur. Une silhouette apparaît brillant d'une étrange aura orangée. Je contemple cette lumière quelques minutes avant de revenir sur terre lorsque le hurlement de ma meilleure amie déchire la nuit.

— Taylor !

Je me retourne partant à la recherche de Juliette. Je m'enfonce de plus en plus guettant les bruits autour de moi afin de repérer mon amie. Malheureusement, je trébuche et ne parviens pas à me relever. Mon corps est immobilisé par une force invisible que je ne comprends pas. La voix suppliante de Juliette s'éteint peu à peu dans la nuit emportant avec lui le brouillard obscur.

***

Recouverte d'une fine couche de neige, c'est ainsi que me retrouve la police. Étendue sur le trottoir les paupières grandes ouvertes, je suis incapable de bouger et de prononcer le moindre mot. Un hurlement silencieux est coincé dans ma bouche refusant délibérément de sortir. J'entends des voix autour de moi débattant sur mon sujet. Des hommes en uniforme tentent de me faire parler, mais aucun son ne sort de ma bouche. J'ai conscience de tout ce qui m'entoure, mais je suis incapable de remuer ne serait-ce que le petit doigt. Suis-je spectatrice de ma propre mort ?

Un homme dépose une couverture autour de mon corps tout en discutant avec une femme. Je ne comprends pas les termes employés, mais il est probablement question de me mettre au chaud le plus vite possible. Le froid s'empare de moi me coupant presque la respiration. Mes pensées prennent soudainement une autre direction. Je me relève rapidement ignorant les protestations des personnes autour de moi. La couverture tombe de mes épaules, mais ce n'est pas la chose la plus importante. Pourquoi personne ne s'inquiète pour Juliette ? Pourquoi Diable suis-je la seule préoccupation de toutes ces personnes ? Une femme tente de m'emmener un peu plus loin, mais je reviens immédiatement à ma place regardant autour de moi. Mes émotions prennent de nouveau le contrôle m'enveloppant d'une inquiétude indescriptible. Je ferme les paupières puis pousse un hurlement semblable à celui de mon amie.

Un battement d'ailes détourne mon attention. Je discerne un petit papillon transparent virevolter librement autour de moi. Je tends la main cependant celui-ci disparaît aussitôt me poussant à croire que ce n'est qu'une simple hallucination. J'avais raison au sujet de cette soirée, nous n'aurions jamais dû nous y rendre.

— Nous allons vous emmené à l'hôpital, mademoiselle.

La femme à la seringue tente de me rassurer ce qui ne fonctionne malheureusement pas. Je me contente de hocher la tête espérant avoir l'occasion de questionner la police au sujet de Juliette. Est-elle retournée auprès des autres ? J'ai toujours l'espoir que ma meilleure amie soit en sécurité cependant une petite voix dans ma tête me souffle que ce n'est pas le cas. Il s'est passé quelque chose de très grave malheureusement personne n'en a conscience.

03/10/2020