CHAPITRE 5

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Le reste de la journée s'est déroulée le plus normalement possible. Malheureusement la rumeur de ce qui est arrivé ce matin s'est répandue comme une traînée de poudre. La petite nouvelle est cinglée, il ne faut pas l'approcher. J'ai passé l'heure du déjeuner toute seule face à mon repas à entendre les chuchotements autour de moi. J'ai tenté de me fondre dans la masse en restant la plus discrète possible malheureusement c'était peine perdu.

Ne supportant pas le sentiment anxieux remuant en moi, je me suis décidée à affronter mon enseignant. Il mérite des excuses pour mon comportement loufoque et ridicule. Celui-ci range des feuilles dans sa sacoche. Je toque timidement à la porte avec un sourire crispé.

— Mademoiselle Addison.

Il se tourne vers moi en me souriant chaleureusement. Aucune trace d'une quelconque colère. Au contraire celui-ci semble particulièrement calme.

— Je suis sincèrement désolée d'avoir quitter votre cours de la sorte. J'ai laissé mes émotions me submerger et je n'ai pas su comment les gérer.

— Jamais je ne pourrais reprocher à un élève d'exprimer ses émotions. Cependant il est important que vous ne gardiez pas tout pour vous.

Il replace correctement son nœud papillon en ne cessant de sourire. Jamais je n'ai eu un professeur aussi bienveillant.

— La psychologue scolaire est disponible en cas de besoin. Je ne connais pas toute l'étendue de votre histoire cependant je ne peux vous conseiller que de retirer le masque que vous portez en société.

J'ouvre la bouche prête à répliquer cependant il ne m'en laisse pas le temps.

— Aucune sanction pour cette fois-ci, mais je compte sur vous pour ne plus fuir lors du prochain cours.

— Merci, Monsieur.

Je replace correctement mon sac sur mon épaule puis m'éloigne presque en courant. Je ne peux pas me permettre d'arriver en retard à mon rendez-vous avec le psychologue. Le cabinet de celui-ci n'étant pas très loin du nouveau lycée, j'ai préféré m'y rendre à pieds. Mes parents ont suffisamment de choses à faire.

Je quitte l'établissement en un éclair traversant la rue menant au cabinet du Docteur Gilbert. Je rallume mon portable puis découvre une multitude de notifications provenant des réseaux sociaux. Pour être honnête, je n'ai jamais été une adepte du portable. La plupart du temps il reste dans ma poche et je n'y prête pas attention. Certaines personnes de mon ancien lycée ont tenté de prendre contact avec moi cependant je n'ai jamais répondu. Je ne veux pas m'accrocher aux souvenirs de Juliette. Les affiches dans les rues commencent lentement à s'effacer avec le temps. Le visage souriant de mon amie révèle une joie passée qui me manque terriblement.

***

Lorsque je pénètre dans le cabinet du Docteur Gilbert, celui-ci est vide. Je m'installe sur une chaise en plastique blanche puis patiente en silence. Une odeur de médicament flotte dans l'air accompagné de désinfectant. Ce n'est pas l'odeur la plus agréable qui soit, mais elle est supportable. Mon psychologue fait finalement irruption au bout de cinq minutes d'attente. Contrairement au centre, il ne porte pas de blouse blanche, mais une simple tenue de civile. Il m'accueille dans le bureau en me souhaitant la bienvenue.

Le cabinet en lui-même baigne dans une jolie couleur beige. C'est plutôt simple, mais efficace pour des rendez-vous. Je prends place sur un petit fauteuil confortable blanc. Mon psychologue installe une feuille blanche devant lui puis prend un stylo.

— Comment vas-tu aujourd'hui ?

— Bien.

Le mot menteuse hurle dans mon esprit en boucle, mais c'est nécessaire. Le plus grand professionnel ne pourrait jamais comprendre ce que j'éprouve.

TAYLOR ADDISON - L'éveil du papillon [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant