CHAPITRE 3

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Des parcelles de blancs et de noirs peuplent mon existence jour après jour. Mon monde n'est qu'une boucle d'obscurité tournant encore et encore. Installée sur le petit fauteuil de la fenêtre, je regarde les feuilles virevolter et tomber délicatement sur le sol. L'automne s'est installé depuis trois mois maintenant et contrairement à cette nuit cauchemardesque, aucune chute de neige s'est de nouveau abattue sur la ville. Il m'arrive de douter de mes propres souvenirs. Personne ne parvient à expliquer cette neige tombée bien trop tôt. Les températures étaient trop douces pour que de la neige tombe. Aucune explication scientifique explique ce qui est arrivée.

Les plus courageux affrontent les températures froides en chahutant dans le parc. Mon psychologue souhaiterait que je rejoigne les autres dans la salle commune, mais c'est au-dessus de mes forces. J'aime ma solitude et mes nouvelles habitudes. Ce centre n'est peut-être pas ma maison, mais je suis patiente depuis deux mois maintenant. Mes parents n'ont pas supporté de me voir broyer du noir le mois suivant la disparition de Juliette. Ma meilleure amie est portée disparue depuis cette soirée. Ma psychiatre me répète que mon cerveau s'est imaginé cette noirceur afin de me protéger. J'aurais tenté de m'interposer entre Juliette et l'agresseur, mais l'homme m'aurait violemment repoussé et je serais tombée. Pendant les cinq premières séances, j'ai tenté de la convaincre que j'avais vu cette noirceur, mais peu à peu, j'ai accepté la théorie de ma psychiatre.

Le centre n'est pas aussi monstrueux qu'on pourrait le croire. Il y a beaucoup d'activités à faire et sommes plus ou moins libres de nos mouvements. Je ne suis pas droguée de médicaments contrairement aux hôpitaux. J'ai un traitement pour mon sommeil, mais uniquement pour ça. Les patients que je croise sont plutôt normaux et ne hurle pas contrairement aux films d'horreurs. Mes parents ont cependant payé une petite fortune pour me trouver une place. Le centre est un endroit calme et reposant. Le personnel soignant ne tente pas de nous transformer en zombie bien au contraire.

La disparition de Juliette tourne en boucle dans mon esprit ce qui ne m'aide pas à lier une quelconque amitié avec d'autres personnes. Les recherches se poursuivent, mais pour combien de temps ? Elles ne dureront pas indéfiniment je le crains. L'affaire Richards deviendra une affaire de plus non classée. Je n'imagine pas le chagrin que la famille de mon amie éprouve et la douleur s'aggravant un peu plus chaque jour.

— Taylor ?

Je me retourne rapidement puis écarquille les yeux en voyant sur le seuil de ma chambre, mes parents. Ils tiennent un énorme bouquet de fleurs accompagné d'une jolie carte. Je quitte précipitamment mon fauteuil puis me précipite vers eux en souriant. Ils viennent me rendre visite chaque semaine en m'apportant à chaque fois des fleurs différentes. Ce n'est pas facile pour eux de voir leur unique fille enfermée dans un institut pour troubles psychologiques cependant il faut admettre que je ressemble un peu plus à l'ancienne Taylor. Mon teint n'est plus aussi blafard qu'auparavant et je reporte des vêtements normaux du moins ceux qui sont autorisés dans l'enceinte du centre.

— Que faites-vous ici ? demandé-je.

Habituellement je suis prévenue de leur visite. Nous nous sommes vues en début de semaine et étions supposées nous revoir la semaine prochaine. Est-ce une surprise organisée volontairement par le centre et mes parents ?

— Nous avons eu excellente nouvelle à t'annoncer, ma chérie, déclare mon père.

Ils échangent un regard complice puis attrapent tous les deux mes mains.

— Madame Duncan est prête à te laisser rentrer à la maison si tu acceptes de continuer ton traitement et ton suivi psychologique. Cependant ce n'est pas à nous de décider à ta place si tu es prête à rentrer à la maison.

TAYLOR ADDISON - L'éveil du papillon [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant