~20~ Renald

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Il attendait nerveusement sur le fauteuil en cuir dans la salle d'attente qui précédait la salle du trône. Ces deux salles étaient séparées par les immenses portes en fer de 5 mètres datant de la construction du palais. Cela fait maintenant 5 heures que j'attends. Ces 5 heures où j'aurais été précieux dans mon hôpital. Des vies auraient pu être sauvé entre temps. Mais si l'Empereur saisit l'urgence de la situation alors d'innombrables vies seront sauvées. Alors que le docteur était en pleine réflexion, les deux portes s'ouvrirent en grand et un des gardes impériaux tonna, tournant le dos à Renald :

-Le docteur Renald Desman !

Tout au bout de la salle, il put voir en haut de quelques marches le fameux trône en marbre sur lequel était assis l'Empereur Walden Mormaint. Le regard de tous ses membres du gouvernement présents l'invitèrent à s'approcher. Le silence se fit. Pesant. N'y tenant plus, le docteur commença en se courbant poliment :

-Tout d'abord merci d'avoir accepté cette entrevue...

-Il est de notre devoir d'écouter le peuple, l'interrompit sobrement l'Empereur. Maintenant expliquez nous la raison de votre venue !

-Bien. Merci Empereur Walden Mormaint ! Il faut dire que si je me suis permis de vous voir c'est que l'heure est grave... Au début les cas étaient très rares... Mais depuis deux mois, les patients se sont faits plus nombreux dans nos hôpitaux ! Et... Depuis maintenant quelques jours... Cela s'est accéléré à une vitesse que l'on n'a pas vu venir, nos hôpitaux sont débordés, on en vient à choisir qui accepter de soigner car il n'y a plus de places pour tout le monde. Pas assez de lits... Pas assez de personnel... Et trop de malades... Les premiers signes sont une violente quinte de toux, puis on se met à cracher du sang... D'un rouge sombre... Noir. Des tâches noires font peu après leur apparition au niveau du ventre. Chez les plus fragiles, c'est au bout de seulement une journée après les crachats de sang. Chez les plus robustes cela peut aller à une semaine ou deux. Mais les tâches finissent toujours par arriver, et la toux ne fait que s'accentuer jusqu'à vous couper le souffle, vous avez besoin à ce moment là d'un respirateur sans quoi vous vous étouffez. Écoutez je... Peut-être que si vous nous donnez les équipements et le matériel nécessaires... Ou même nous donner plus de budget et on s'en occupera si vous le souhaitez... On ne demande qu'à s'en sortir, c'est pareil sur les 9 Royaumes !

-Mais vous arrivez à en guérir, n'est ce pas ?

Le regard de Renald n'avait pas quitté le sol marbré, comme si en fuyant le regard on oublierait cette question.

-Je vous ai posé une question, docteur Reyald...

-Renald, Votre Altesse, corrigea discrètement son conseiller Alistair.

-Oui, je vous ai posé une question, docteur Renald ! Insista-t-il. Quel est le taux de létalité pour cette... maladie ?

Renald murmura un chiffre.

-Plus fort ! S'écria un sénateur.

-100%..., dit-il en relevant la tête.

-Que... Je ne suis pas sûr d'avoir bien entendu finalement, déclara Walden en regardant ses ministres et sénateurs d'un air de confirmation.

-Nous ne financerons pas des équipements ou du personnel pour une maladie incurable ! Intervint le ministre des finances.

-Il faut voir le problème à sa source, dit quand à elle Sventia, la ministre de la santé. Renald la connaissait bien, il l'avait croisé lors de réunions passés. Elle me connaît. Elle me comprendra et m'aidera. D'où vient cette maladie ?

-La pollution, Mme Sventia, la pollution. Elle détruit les poumons et quand il n'y a plus d'air dans les poumons... Il n'y a plus de vie. La liste d'attente pour les greffes est bien trop longue pour espérer une chance, même aux premiers...

La ministre regarda gravement l'Empereur. Celui-ci regarda son ministre des finances qui lui confirma :

-Notre situation économique et militaire ne nous permet  actuellement pas de venir en aide aux personnes atteintes d'une maladie... Incurable. Nous ne pouvons rien faire.

-C'est le peuple qui meurt, Mon Empereur... C'est Xandora avec lui qui va mourir. Tout ce qui a été bâti va s'effondrer, les hôpitaux s'effondrent. Et quand un hôpital s'effondre, c'est la population...

-On vous a très bien compris, merci, mais vous l'avez entendu, nous ne pouvons vous aider dans cette maladie !

-La pollution ! C'est elle le problème ! Stoppez les usines de Nysteria et la situation s'améliora dans les jours à venir !

-Mais vous êtes fou, ce sera la fin de l'Empire ! S'écria Hidro, le ministre de guerre. Sans usines, pas de commerce et plus d'argent ! Tout le monde se retrouvera à la rue et en ces temps de guerre, Kandall gagnera ! Quel serait le message, mon Empereur ? Une abdication ?

-Abdiquez dans cette guerre et vous n'aurez plus mon appui, intervint Oswalda. C'est donc elle l'héritière, la dernière Asterian.

Walden se tourna vivement vers elle.

-Que me conseilles tu donc, ma fille ?

-Relâchez le, dit-elle en s'avançant vers Renald. Et il répandra sur tout l'Empire que vous vous fichez de la vie du peuple. Voulez vous d'une guerre civile en même temps qu'une guerre contre Alcatram ? Lui demanda-t-elle en se tournant vers le trône.

Walden secoua négativement la tête. Alors Oswalda se retourna vers Renald.

-Alors enfermez le, tuez le, je ne sais ! Mais diable, qu'il ne gêne plus le bien de l'Empire ! La guerre contre Alcatram débute, le peuple ne verra que ça et vous soutiendra... Mais il est encore trop tôt pour se soucier de cette maladie !

Un simple hochement de Walden suffit à ce que deux gardes s'emparent de Renald.

Les rumeurs étaient donc vraie. C'est cette tyran qui dirige l'Empire !

Les portes se refermèrent, il arriva escorté dans l'ascenseur. Vers le niveau -32. Le docteur était tellement sous le choc qu'il n'eut même pas le réflexe de dire quoi que ce soit à l'Empereur. À quoi bon, de toute façon Oswalda avait décidé de mon sort, plus aucun retour en arrière n'était possible. J'aurais dû rester à l'hôpital. Mon absence va cruellement se faire ressentir. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent et les deux gardes dorés à l'insigne de Xandora l'emmenèrent à travers un long couloir de pierre, semblable à une cave excepté le fait que des cellules étaient de part et d'autre de l'allée. Au bout d'un long chemin interminable, un geôlier d'apparence misérable apparut.

-Vous inquiétez pas, mon brave, on a toujours une chambre de libre ! Dit-il en s'esclaffant, dévoilant une rangée de dents jaunes pourries.

Renald ne pu s'empêcher de grimacer du fait de l'haleine immonde du gardien de prison. Celui-ci s'en aperçut et ne parut pas très bien le prendre. Le chemin continua sur une centaine de pas, le docteur n'aurait su le dire avec précision tellement il était encore sous le choc. Puis le geôlier s'arrêta, mit son pouce sur un scanner, et une porte s'ouvrit. Avec un signe de tête les deux soldats jetèrent le prisonnier dans sa nouvelle cellule. Quand il se releva, la porte était fermée. Mais il y avait une vitre qui s'ouvrait de l'extérieur. Le geôlier l'ouvrit et lui déclara en riant :

-3 mètres carrés pour vivre, profites en, d'après ce qu'on me dit, tu devrais également profiter de ta tête !

Il referma la petite vitre et le silence revint. Pesant. Renald s'assit. Et contempla les murs de pierres sombres. Humides. Jamais je n'aurais crû en finir ainsi. Faire mon métier et le payer au prix de ma vie.

La Marche du Chaos : Livre I Le chant de la colèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant