~22~ Oswalda

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L'Empereur s'approcha du balcon, au 5ème étage. La foule s'était rassemblée sur la place impériale, au cœur même du palais qui a été ouvert pour l'occasion. Il est 11h59 selon la montre de l'héritière. Dans quelques instants, Walden commencera son discours tant attendu. Enfin le peuple n'a été prévenu qu'au dernier moment dans les journaux du matin. Le gouvernement a été prévenu qu'hier soir. Et moi, Oswalda Asterian, descendante d'Aracorn, héritière de L'Empereur, je n'ai été prévenue qu'en même temps que les autres. Sans me consulter. Je sais seulement qu'il parlera pour calmer les manifestations d'hier, mais fera-t-il une annonce importante ? Prendra-t-il une décision ? Je ne le sais. Et je n'aime pas ne pas savoir. Normalement je suis au courant de tout ce que fait Walden, c'est Alistair qui lui a donné cette idée, et venant de lui, j'appréhende encore plus !

En pensant cela, elle souri au conseiller de l'Empereur qui le lui rendit. Si tes conseils contredisent mes objectifs, il va y avoir des morts. Et je sais que tu les connais, mes objectifs.

Le fauteuil roulant de Walden s'avança sur le balcon, au centre d'Alistair, d'Oswalda et le reste de son gouvernement. Il se racla la gorge, abaissa le micro à sa hauteur, et clama alors que la foule s'était tue, car les rumeurs les plus folles circulaient sur l'importance de ce discours: il faut dire que l'Empereur n'avait pas l'habitude des annonces en public, la dernière datait d'il y a deux ans. J'espère sincèrement que la moitié de ces rumeurs sont infondées, s'inquiéta-t-elle.

-Xandoriennes, Xandoriens, commença Walden, sa voix s'amplifiant à l'aide des dizaines et des dizaines d'enceintes dispersées à travers toute la place et même au delà du palais. Vous n'êtes pas sans savoir que la République d'Alcatram nous a déclaré la guerre. Bien sûr, nous allons la leur livrer, cette guerre ! Ses yeux bleus pétillaient d'une jeunesse vigoureuse qu'il n'avait plus retrouvé depuis des lustres. Les cris de la foule vinrent soutenir leur dirigeant. Nos armées de nos différentes contrées vaincrons cette révolte d'une nation que nous avons toujours vaincu sur nos terres par le passé ! Mais... Nous devons faire face à une autre menace, au sein même de Xandora...

Le peuple au même titre qu'Oswalda retint son souffle, s'attendant à ce qu'il allait dire.

-Vous n'êtes pas non plus sans savoir qu'une maladie dévaste nos amis, notre famille, nos voisins... À quoi bon livrer une guerre si les survivants sont condamnés à disparaître ?

Oswalda, habillée comme à son habitude de rouge, remarqua qu'Alistair, vêtu lui de noir, souriait, sans se cacher. C'est ce qui lui a dit. Il a fait monter à la tête de l'Empereur les idées de pollution d'Aldresdan.

-J'ai entendu vos appels, vos cris, votre colère vis à vis de ces morts et du fait que le gouvernement ne se concentrait que sur cette guerre lointaine, sans se soucier de ce que subissait son peuple !

Des mouvements d'assentiments se répandirent à travers la foule.

-J'ai écouté les médecins qui m'alarmaient sur cette situation... Et à juste titre !

Il va faire libérer Renald. Au delà de cette simple libération, ce qui inquiétait Oswalda était le fait que l'Empereur n'écoute plus et désobéisse à ce que disait sa fille adoptive.

-En attendant de trouver un remède à cette maladie, nous avons trouvé une solution. Grâce à nos scientifiques, des voyages vers La lune qui est habitable sont rendus possibles ! Ce que je veux vous dire, c'est que nous pouvons construire des vaisseaux qui d'ici un mois, seront aptes à voler vers notre futur paradis. Il y a de la place pour tout le monde mais bien sûr, vous pouvez choisir de rester ici en attendant de vaincre cette maladie ! La voix du vieux Walden se stoppa net, guettant la réaction de son peuple.

Mais cette foule semblait interloquée, surprise. Les Xandoriens n'imaginaient nullement que leur technologie avait à ce point avancé. Il faut dire qu'elle s'était stabilisée depuis plusieurs siècles. Mais en effet, il y a un mois, les voyages vers d'autres systèmes étaient tout simplement impossibles. Et la découverte d'Eldane était arrivée au bon moment. Au moins, cela calmera le peuple, et on en a besoin, surtout en ce moment. Je ne sais pas s'ils se doutent qu'ils ne pourront pas tous partir. En tout cas je l'espère. Si mon peuple fuit cette terre, sur qui régnerai-je ? Je n'irais nullement m'enfermer dans des boîtes vers un cailloux dont l'issue est incertaine. Mon avenir se joue ici. Et Walden l'Infirme incite son peuple à fuir ? Il faut que tout cela cesse. En se tournant, elle vit qu'Alistair était satisfait. Sale petit...

La foule finit tout de même par manifester son enthousiasme par des cris et des applaudissements. Leur souverain pouvait finalement les sauver de cette maladie. Même si cette solution paraissait inimaginable, s'il le dit, c'est que c'était possible ? Alistair applaudit l'Empereur à son tour, bientôt imité par tout son gouvernement. Oswalda fût obligée de suivre. Ah ça oui, tu dois être content. L'Empereur t'écoute de nouveau et applique ce que tu lui dis, mais il a de l'affection pour moi, et cette carte m'est très utile si je veux l'utiliser. Malheureusement, il est allé trop loin. Il ne va être qu'encombrant pour mes idées.

Quand Walden et son gouvernement furent rentrés, sa fille adoptive vint le féliciter personnellement.

-Bravo mon père pour cette courageuse décision, je dois avouer que je suis très surprise car vous ne m'en avez pas fait part mais...

-Je ne vous ai pas froissé, je l'espère ? Il fallait que je sois seul pour prendre cette décision mais si je ne vous en ai pas fait part, ça n'enlève en rien l'amour que j'ai pour vous, ma fille ! Dit-il en lui tapotant la main.

-Oui, bien sûr, je le comprends tout à fait. Mais êtes-vous sûr que cette solution d'envoyer 60 milliards de Xandoriens est... Disons, réalisable ?

-Je ne vais bien sûr pas envoyer tout mon peuple, ce discours les a calmés, c'était le but. Rien ne vaut l'espoir pour tenir. Mais il y a une part de vérité. Je vais commencer par accepter les plus nobles d'entre nous à faire partie des listes pour ce voyage vers d'autres contrées inexplorées. Ensuite, viendra les plus modestes mais je pense que cette guerre et celle maladie fera chuter notre démographie. Si je le pouvais, j'enverrais tout le monde dans ces vaisseaux, mais ca ne se fait pas aussi vite. Car vous le savez, selon les médecins, il n'y a pas de remèdes face à cela. On fonce droit vers la fin de Xandora si nous ne fuyons pas cette planète !

Oswalda se redressa alors et conclut :

-Bien. Je suppose que vous savez ce que vous faites, vous avez les épaules pour, c'est d'ailleurs bien pour cela que vous êtes notre Empereur !

-Oui, d'ailleurs prends exemple, car ton tour viendra ! Même si je sais que tu me surpasses déjà dans certains domaines. Puis Walden la regarda longuement avant de rajouter : tu seras une bonne Impératrice, je n'en ai nul doute !

-Merci, mon père, lui répondit-elle. Et mon tour viendra en effet. Plus tôt qu'on ne le croit.

Alistair les regardait de loin avec discrétion. Habillé toujours de sombre, il passait souvent inaperçu quand il le souhaitait. Ce discours était exactement celui qu'il voulait. Son Empereur écoutait de nouveau ses conseils, il en était satisfait, car il l'aimait, Walden. Il était pour lui comme une sorte de père. L'intervention d'Oswalda était comme s'il remplaçait son fils par elle. Et c'est ce qu'il avait fait. Mais Alistair lui demeurait fidèle. Le sénateur ne voulait que son bien, et il savait que ce qu'il faisait était la bonne solution. Mais Oswalda avait remarqué Alistair. Et elle lui souria une nouvelle fois, pour lui remarquer qu'elle l'avait vu. Elle souriait aussi car elle savait que maintenant, les choses ne pouvaient que radicalement avancer. Elle n'avait plus le choix. Il fallait passer aux actes.

La Marche du Chaos : Livre I Le chant de la colèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant