- Mais je ne peux pas la marquer si je ne ressens rien !
- Je n'en ai rien à faire fils, tu l'assumeras. Elle a entraîné les chasseurs sur notre territoire, à nos trousses, tu l'as aidé. Tu aurais pu être exilé mais je ne veux pas te punir de cette façon. Je veux que chaque matin où tu te réveilleras et que tu la verras tu te souviennes de l'erreur que tu as faite aujourd'hui en nous obligeant à déclarer la guerre et à nous montrer face aux chasseurs.
- Mais c'est une humaine... C'est contre-nature...
- Je prépare sa transformation pour cette nuit. Je dois réunir les sages, demain nous devons attaquer les chasseurs.
J'en avais marre. Marre que l'on parle de moi sans me considérer. J'étais là mais c'était comme si ce n'était pas le cas.
- Je n'ai pas mon mot à dire?! Vous ne vous êtes pas demandés si je voulais rester humaine ?!
Sur ces mots, l'Alpha me lâcha et disparu derrière la brume qui enveloppait le village. Comme s'il n'accordait aucune valeur à mes paroles. J'étais encore à l'entrée, sur le sol quand il m'avait lâché et je sentais le regard de Sam sur moi... Un long silence s'installa. Le garçon huma l'air comme plus tôt dans la journée et lança un long soupir. Je m'adossais contre le premier mur qui me vint sous la main, les bras croisés, en le fixant. Je me rendis compte de sa beauté. Jeune, brun, le visage fin mais masculin, le corps développé. Je lui donnais 25 ans. Il me regarda à son tour.
- Quoi ?! Demanda-t-il froidement avec agressivité.
- Rien, rien... T'es aimable toi ! Repliquais-je sur le même ton.
- Tu as ruiné ma vie ! Tu crois que ça me fait plaisir de te marquer ?!
- Me marquer ? Lançais-je avec incompréhension.
- Laisse tomber. Tu ne fais pas parti des miens, tu ne comprendrais pas.
- Essaie quand même.
- Plus tard. J'ai des choses à faire.
Il s'éloigna de moi avant de se retourner.
- Tu viens ? Je ne vais pas t'attendre toute ma vie non plus.
Je courus pour le rattraper mais il avait recommencé à marcher bien avant que je le rejoigne. Nous nous dirigeâmes vers une sorte de tente imperméable à l'intérieur de laquelle un vieil homme battait du métal avec une enclume.
- C'est le père de mon père, me cracha Sam. Ne parles pas.
J'essayais de lui sourire mais il ne m'adressa aucune marque de gentillesse.
- Alors c'est elle ? Demanda le papy avec un sourire mesquin sur le coin des lèvres. Tu vas la marquer quand ?
- Jamais. Pas question que je la touche, souffla le jeune homme avec conviction.
Le vieil homme haussa les épaules en me scrutant de la tête aux pieds. J'aurais tellement voulu disparaitre...
- Dommage pour toi, je suis sûr que tu n'aurais pas eu trop de mal à la marquer, elle est mignonne comme tout.
Sam resta silencieux. Je ne comprenais toujours pas ce qu'était leur marquage, mais je savais que ça ne me plairait pas. Le vieillard se retourna et décrocha une armure pour loup d'un pilier de bois qui tenait la tente. Il la tendit vers son petit-fils.
- Elle te convient ?
Le garçon posa sa main sur le bras du métallurgiste et fit un sourire béant.
*
Nous avions traversé une bonne partie du village quand je décidais de relancer le sujet.
- C'est quoi le marquage ?
- Une vieille coutume.
- Elle consiste en quoi ?
- Je ne veux pas en parler, bougonna-t-il.
- J'ai besoin de savoir... Je me retrouve ici, face à des créatures que je ne pensais même pas réelles et on me dit que je dois rester. Pourquoi ? J'ai le droit de savoir !
- C'est l'accouplement qui unit deux loups ! Voilà, t'es contente ?!
Je restais sans voix. Pourquoi avait-il fallu que je me cache dans la forêt? Pourquoi étais-je tomber sur lui alors qu'il était en train de se transformer ? Je voulais tellement comprendre... Pendant que nous marchions en silence, je croisais les bras sous l'effet du vent froid. La nuit commençait à tomber et la température avait dégringolée. Je frissonnais et claquais presque des dents. Sam me regarda et je ne compris pas tout de suite ce qu'il faisait. Il enleva sa veste et me la tendit. Quand il vit que je ne réagissais pas, il soupira d'impatience et me la posa sur les épaules d'un geste furtif. Je le remerciais discrètement, et il ne me répondit pas.
- Tu n'as pas froid ? Demandais - je surprise.
- Non.
Quand il remarqua que j'attendais un semblant d'explication il leva les yeux au ciel et poursuivit.
- Je suis une bête.
- Ne te dénigre pas...
Il pouffa quelques seconde et me regarda.
- Je ne me dénigre pas. J'en suis une.
Je restais silencieuse une nouvelle fois. Nous arrivâmes finalement devant une demeure plutôt modeste et il s'arrêta devant la porte. Je fis comme lui.
- C'est ma maison, et la tienne par la même occasion.
Il m'attrapa la main et clencha la porte avec vivacité.
- Je peux te poser une question Sam ?
- Oui. De toute façon il va bien falloir que l'on se parle à un moment donné, me répliqua -t-il en entrant dans la maison.
- Pourquoi tu n'as pas déjà de...
Femme ou louve ? Je ne savais pas vraiment quel terme employer face à lui.
- Pourquoi tu n'es pas marié?
Il me dévisagea avec insistance, sans répondre à ma question. Je crus qu'il ne m'avait pas entendu. J'allais réitérer ma phrase quand il répondit.
- Parce que je n'ai pas encore trouvé la bonne personne, souffla-t-il d'un ton presque inaudible. Et je ne la trouverais jamais maintenant. Et toi tu n'as pas de copain ? Tu es jeune pourtant.
- Avec les garçons ça n'a jamais été vraiment sérieux...
Sam s'asseya de tout son poids dans le canapé et me regarda, intrigué, ses yeux jaunes luisants face à la petite lumière du plafond.
- Les relations longues ne t'intéressent pas ?
- Je crois que je n'ai pas trouvé la bonne personne...
Il me sourit rapidement. Je crois qu'il ne m'avait jamais adressé un visage aussi aimable depuis qu'il me connaissait. Il tapa avec le plat de sa main sur l'accoudoir du canapé et se releva.
- La nuit est tombée. On doit aller sur la place publique pour ta transformation.
Il me fixa quelques instants avant de me poser une question, dont je n'avais même pas soupçonné l'utilité.
- Tu t'appelles comment déjà ?
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LIEN DE SANG Sang de loups (T1) /!\ En Réécriture
LobisomemUne simple partie de cache - cache avec mes amis. Et puis j'ai vu cette chose que jamais je n'aurais cru possible de voir. Ce monstre, en train de tuer un inoffensif humain... Cette bête que personne ne croit réelle... Alors j'ai couru, aussi vite...