CHAPITRE 53 : Abandon.

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Je courais toujours à travers la forêt, évitant les flèches d'argent qui fusaient de tous les côtés. La voix dans ma tête m'indiquaient quel chemin prendre et instinctivement je lui faisais confiance. Les martèlements des sabots me parvinrent jusqu'aux oreilles et me donnèrent une sensation nouvelle : la peur d'abandonner ma meute face à la mort. Mes pas m'amenèrent jusqu'à la lisière du bois. Une vaste plaine se profilait à l'horizon. Je n'avais pas le choix, je devais la traverser. Mais c'était une erreur stratégique. Je le savais. Les arbres ne me protégeraient plus, l'ombre ne serait plus mon alliée. Je fixais cette plaine verdoyante et restais immobile quelques instants. J'entendais les chiens aboyer et se rapprocher de moi. Je savais que je ne survivrais sûrement pas à cette course. Mais le principal à mes yeux était de protéger ma meute de toute attaque. Le sang n'avait que trop coulé. Mes pattes s'étendirent dans les airs, ainsi que mon corps et je m'élançais dans l'herbe avant que les cavaliers ne me rattrapent. J'avais vraiment peur pour les miens. Je revoyais les corps sans vie de Tom et de June allongés sur le sol et en paix. Et pour la première fois de ma vie sous forme de louve, des larmes tombèrent de mon visage. Parce qu'il n'y avait pas que mon côté humain qui avait été touché, il y avait le lien de meute, ce lien de sang qui nous uni tous. Mes poils formaient des amas de terre et de sang. Je sentis une décharge de douleur dans mon épaule qui me fit tomber en avant. Une large traînée de sang s'échappa de ma clavicule et s'épandait sur le sol. Mon sang. C'était mon sang. J'étais touchée. Je me relevais avec difficulté et arracha la tige en acier de la flèche à la simple force de mes crocs, mais la pointe resta sous ma peau. Je me remis à courir, mais j'allais de moins en moins vite à mesure que le sang m'abandonnait. Je devais faire vite. Les chiens n'étaient plus qu'à quelques mètres, j'étais seule face à la mort, sans aucun témoin sauf le silence de cette plaine. Comme si ce moment était spécial, sacré. Comme la fin d'une grande aventure. Le ciel devint noir et la pluie s'abattit sur nous, se mêlant au sang de ma plaie. Je me retournais rapidement et remarquais qu'il ne faudrait plus beaucoup de temps aux chasseurs pour me rejoindre et pour me mettre à mort. Je bifurquais légèrement sur la gauche pour creuser l'écart, mais ça ne servait à rien, je n'allais pas assez vite pour m'en sortir. Au loin je vie une sorte de rivière avec des énormes rochers où je pouvais espérer me cacher. Mais mon sang me trahirait. Je me mis à contourner les rochers avec agilité et puissance, surpassant ma douleur. J'entendis les flèches siffler dans l'air plus loin, signe que j'étais toujours traquée. Une flèche me dégomma dans le flanc et je poussais un petit couinement. J'avais vraiment compris qu'ils ne me laisseraient jamais m'en sortir. Je courrais de plus en plus vite, ne prenant même pas la peine d'enlever l'arme de mon corps. Je sautais par-dessus un énorme rocher et je retrouvais entourée de plusieurs chasseurs. Ils m'avaient tendu une embuscade. Ils savaient que je choisirais les rochers pour m'échapper, ils nous connaissaient parfaitement. Je pris une grande inspiration et fixa chacun de mes agresseurs pour jauger leurs armes et savoir si j'avais une chance de m'en sortir. Je ne voyais pas comment je pouvais faire. Dès que les autres chasseurs arriveraient, je serais morte. Je sentis le sol sous chacune de mes pattes.

"Fais sortir tout ce qu'il y a au fond de toi Malory. Fais toi confiance. Tu es ta seule défense."
"Et comment je fais ?!"
"Tu crois que tu t'en es sorti indemne de la bataille avec Alpha Lake ? Tu crois que tes yeux sont devenus comme ils le sont par pur hasard ? Concentre toi et réfléchis."

Je me mis à grogner contre les chasseurs en montrant mes crocs. J'en avais marre de cette voix qui faisait des énigmes, même quand ce n'était pas le moment. Je fixais déjà depuis un certain temps une pierre, attendant l'attaque des humains.

"Observe et sers toi de ce que tu vois."

Je me concentrais donc un peu plus sur le rocher, jusqu'à ce qu'il explose en dizaines d'énormes morceaux, écrasant deux chasseurs sous leurs poids. Je ne savais même pas comment j'avais fait ça. Je sautais sur le dernier chasseur et le tuais en fracassant son corps sur le sol rocailleux. Je remontais vers la rivière et me mis à courir dans l'eau. Je devais rejoindre la forêt avant que les chiens ne me repèrent. Je savais qu'ils perdraient ma trace si je restais dans l'eau. Je finis par arriver à la lisière de la forêt et disparu dans la pénombre. J'humais l'air alors que les chiens avaient arrêté d'aboyer. Je me dirigeais vers le champ de bataille. Mais personne n'était là. Je jaugeais tous les corps sur le sol et m'arrêtais devant June et Tom. Je redevins humaine et fermais les yeux de June avant de partir. Ils avaient dû retourner sur le camp.

*

La première personne que je vis fut Sam. Il se tourna vers moi et malgré son visage triste et fatigué, me sourit. Je me mis à courir vers lui en hurlant son nom. J'avais eu tellement peur pour lui. Il me serra dans ses bras avec chaleur et enfouie son visage dans mon cou. Je voulais juste sentir son odeur, regarder ce doré de ses yeux, entendre son souffle, toucher sa peau et goûter ses lèvres.

LIEN DE SANG Sang de loups (T1) /!\ En RéécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant