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Mardi 13 Juin, 10 h 50, Turtle Lake, Dakota du Nord.

Quand je me suis engagée sur le petit chemin de terre bordé d'arbres qui précédait l'entrée en agglomération de Turtle Lake, j'ai souri, désabusée. Incroyable. C'était encore mieux que ce que j'avais imaginé. Des champs à perte de vue, une densité de population quasi nulle et des fermiers pour seuls voisins. Et j'exagérais à peine. La petite maison que j'avais achetée quelques semaines plus tôt grâce à l'argent de mon compte off-shore était au fond de ce chemin, rencognée derrière un bosquet de chênes touffus. J'en avais fait l'acquisition sur un coup de tête, sans en parler à personne, au cas où j'aurais à fuir, un jour ou l'autre. À croire qu'un sixième sens bienveillant m'avait poussée à prendre mes précautions... La seule habitation à proximité était une ferme, et elle se trouvait à une bonne centaine de mètres de la mienne.

J'allais être tranquille.

Je me suis insérée dans l'allée avec mon antique Ford fraîchement achetée et je l'ai garée devant le vieux chalet qui allait me servir de refuge. C'était une bicoque qui allait avoir besoin d'un sacré coup de peinture, mais je n'avais pas peur de me salir les mains.

Je suis descendue en réprimant l'élan d'espoir qui commençait à grandir en moi. Je ne devais pas me réjouir trop vite. Dona était une femme dangereuse et les risques qu'elle découvre le pot aux roses n'étaient pas aussi bas que je l'aurais espéré.

J'ai inspiré profondément l'air pur de la campagne et posé les mains sur mes hanches.

Une chose à la fois, me suis-je dit en m'avançant vers la maison. J'aurais toujours le temps de m'inquiéter plus tard. Pour l'instant, je devais aménager.

J'ai glissé la clé, que j'avais fait livrer dans une boîte postale au sud de Paris, dans la serrure, et je suis rentrée dans la maison. J'ai grimacé en découvrant l'étendue des dégâts. Le « meublé » ne comportait en tout et pour tout en fournitures qu'une vieille table en bois qui tenait sur trois pieds, un canapé aux coussins défoncés et une télé à l'écran brisé. Je me suis adossée au chambranle en secouant la tête. La femme qui avait acheté le bien pour moi m'avait prévenue. Mais je n'avais voulu recevoir aucune photo ni rien qui puisse être intercepté. Je lui avais dit que je prendrais plaisir à retaper la baraque et à la décorer. Mais je n'avais pas pensé au fait que j'allais devoir également déménager les anciens meubles, complètement inutilisables.

— Parfait, ai-je sifflé entre mes dents en soulevant mon sac de sport et en m'aventurant dans la vieille demeure.

Tout, du plancher au manteau de la cheminée, en passant par les quelques bibelots qui traînaient et les meubles délabrés était recouvert d'une couche de poussière si épaisse que je ne voyais plus la couleur des objets qu'elle tapissait. Des toiles d'araignée monstrueuses s'étalaient dans tous les coins et j'ai aperçu du coin de l'œil des rats et des souris détaler en me voyant arriver.

Ça pour la retaper, j'allais devoir la retaper. Première chose à faire, cependant : dératiser. Et d'après mon expérience, il n'y avait rien de mieux que d'inviter le prédateur naturel du parasite qu'on souhaitait annihiler pour s'en débarrasser sans trop d'effort.

Je me suis fait la note mentale d'adopter un chat ou deux. Dans le coin, avec toutes ces fermes, les chatons à sauver ne devaient pas être rares. J'allais également avoir besoin de me fournir en matériaux. Donc, je serais forcée de me rendre en ville pour acheter le nécessaire. Ça ne me ravissait pas, mais de toute façon je n'allais pas me nourrir en mangeant les racines des arbres qui bordaient ma propriété. Il allait bien falloir que je me résolve à sortir de chez moi de temps en temps. Du moment que je cachais mes bras et mon visage, il n'y aurait pas de souci.

On a cold Nebraska nightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant