Lundi 19 juin, 8 h, Turtle Lake, Dakota du Nord.
J'ai fini mon café en une gorgée et attrapé mon sac à main au passage. J'ai jeté un dernier coup d'œil à mes trois monstres, qui comataient dans leur arbre à chat, rassurée de voir qu'ils allaient bien. Quand je les avais récupérés la veille, chez le vétérinaire, ils étaient totalement réveillés, mais aussi carrément flippé. Une fois de retour chez eux, ils s'étaient dirigés en chancelant jusqu'à leur niche, aux pieds de l'arbre, puis s'y étaient installés tant bien que mal, gênés par leur collerette. Mais s'ils avaient réussi à monter dans l'arbre ce matin et à dormir paisiblement dans un des paniers, c'est qu'ils devaient aller mieux. J'ai également consciencieusement évité de laisser mes yeux errer près de la table du salon, là où reposait mon journal. Je n'avais pas peur de son contenu écris, mais bien de ce petit bout de papier glacé qui était coincé entre la couverture souple et la première page. La culpabilité a fait son grand retour et mon envie de faire quelque chose de dangereux s'est fait tout à coup pressante. Mais je les ai toutes deux repoussées avec fermeté et je me suis concentrée sur la journée à venir.
Je suis sortie et j'ai réprimé un frisson, saisie par l'air frais et piquant de ce lundi matin. J'avais rendez-vous au garage de Seth à 8 h 30, mais j'aimais bien être en avance. Ça me donnait l'impression de maîtriser la situation.
Lorsque je suis garée devant, j'ai remarqué que le Pick-Up de mon futur boss était déjà là. Je ne l'avais pas entendu passer devant chez moi, ce qui voulait dire qu'il était parti de chez lui très tôt, quand j'étais encore profondément endormie. Il était fait en acier, ou quoi ?
Je suis rentrée dans le vieux garage dans lequel étaient alignées 4 voitures, dont une surélevée à un mètre cinquante du sol. Seth n'était visible nulle part alors je me suis éclairci la gorge. Un bruit de ferraille a retenti dans le fond et je me suis avancée prudemment, sans réussir à me défaire de ma bonne vieille paranoïa. Qu'est-ce que je regrettais de ne plus avoir mon 9 mm ! Il fallait absolument que j'obtienne un permis de port d'arme et que je me procure un nouveau Glock. Je devais en faire une priorité.
— Sarah ? a appelé Seth depuis l'arrière d'un véhicule.
— Oui ! me suis-je exclamée, soulagée.
Je me suis approchée de la Ford sous laquelle il était couché et il a reculé son espèce de planche à roulettes pour sortir sa tête de sous le châssis.
— Salut ! m'a-t-il salué avec bonne humeur. T'es en avance.
— Je voulais faire bonne impression.
— Pour faire bonne impression, il faut arriver pile à l'heure.
— Va dire ça à l'ancienne citadine qui a peur de se retrouver coincée dans les embouteillages.
Il est complètement sorti de sous la voiture et s'est relevé en secouant la tête, amusé :
— Ah ça... des embouteillages à Turtle Lake, tu vas pas en trouver souvent. Bon, prête pour ton nouveau boulot ?
— Comme jamais. Juste une question : tu comptes me faire bosser sur un établi entre deux batteries graisseuses ?
Seth a remué des sourcils et j'ai retenu un sourire in extremis. Mon voisin me donnait un peu trop la banane à mon goût.
Il s'est avéré que le garage comportait un petit local fermé où Seth avait aménagé un coin secrétariat. Il y avait un ordinateur, un agenda et des tonnes de casiers comportant factures, bons de commande, relevés de compte et j'en passe, le tout non classé, bien évidemment. Mon boss m'a expliqué qu'il passait une partie de ses nuits dans ce cagibi pour essayer de gérer la paperasse du garage, mais que ce n'était pas son truc. Je le croyais sur parole. J'allais passer ma période d'essai à tout mettre en ordre, à mon avis.

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On a cold Nebraska night
RomanceLorsque Raska apprend qu'elle est enceinte, elle n'a pas d'autre solution que de fuir le monde violent dans lequel elle évolue en simulant sa propre mort. Elle disparaît alors aux yeux des individus dangereux qu'elle côtoie tous les jours. Quittant...