A cette même période, à l'Ouest du Japon, se trouvait une grande forêt. La forêt des esprits. Crainte de tous, elle ne semblait pourtant n'être qu'une légende. Les villages avoisinant évitaient de la traverser, sauf lorsque cela leur était nécessaire, pour le commerce notamment.
Plus bas, sur une petite route parsemée de cailloux et située sur une bute de terre, surplombant les rizières d'un village, un petit convoi s'avançait. Il n'était composé que de trois personnes uniquement, qui transportaient des affaires dans de gros sacs en toile, sur le dos de leurs chevaux. Un homme marchait, et dirigeait le premier cheval qui peinait à avancer sous le poids des sacs, et devant, trottinait un deuxième cheval qui lui, transportait une femme et une petite fille. Ils avançaient silencieusement, écoutant les paysans qui s'occupaient des rizières, et le vent qui faisait bruisser le feuillage des arbres.
La femme rejeta sa chevelure noire en arrière, et ajusta le petit cerceau qui lui entourait le haut du crâne, passant derrière sa tête et sur son front. Elle reprit convenablement les rennes de sa monture et s'assura que son bébé était bien assis devant elle. Celui-ci se mit brutalement à pleurer. L'homme les rattrapa et prit sa petite fille brune dans ses bras pour la calmer. Le cheval qu'il avait abandonné resta derrière lui et brouta tranquillement l'herbe au bord du chemin.
- Elle a faim, et je t'avoue que je me sens un peu lasse moi aussi.
L'homme leva la tête vers le visage pâle de sa femme qui n'avait pas mangé depuis un ou deux jours.
- Je vais voir s'ils ne vendent pas un sac de riz dans ce village.
Il désigna les quelques habitations regroupées derrière les rizières, ou s'activaient les villageois autour de ce qui semblait être un marché.
- Non je vais y aller, reste avec Hana.
La jeune femme descendit gracieusement et sans encombre de son cheval, malgré son long kimono qui minimisait ses gestes. Elle caressa la joue de son enfant et souffla :
- Je reviens vite ma petite Hana, je vais chercher de quoi manger, on en a tous besoin.
- Ne prend que le strict minimum, il nous faut économiser le plus possible, la mit en garde son mari.
Elle hocha docilement la tête et dévala le petit sentier en pente qui reliait les carrés de rizières au chemin principal. Elle fut saluée par les paysans avec leurs grands chapeaux de paille pointus pour se protéger du soleil brûlant, et circula entre eux pour enfin atteindre le marché. Elle se fit toute petite et chercha des yeux un vendeur de riz, et tomba sur une femme à l'allure un peu vulgaire qui se tenait assise en tailleur, avec un kimono rose très décolleté et un bandeau blanc autour des cheveux.
- Bah alors ma petite dame, vous êtes perdue ?
La jeune femme se sentit rougir et s'adressa à la vendeuse timidement :
- Je voudrais un sac de riz s'il vous plait.
Elle pâlit devant le prix qu'on lui annonça mais ne déclina pas sa demande.
- Et voilà un sac de riz ! Mais dites moi, vous n'êtes pas d'ici vous, je me trompe ?
L'intéressée ne voulait pas que la discussion s'attarde trop, surtout à son sujet. Elle prit rapidement le sac et s'empressa de répondre :
- Non, je viens du Nord. Merci.
- Qu'est ce que vous venez faire ici alors ?
- Je fuis la guerre.
- Toute seule ? Et vous avez déjà fait tout ce chemin jusqu'ici ?
De nombreux curieux s'amassaient déjà autour des deux femmes, attirés par la voix forte de la vendeuse de riz.
- Non, je suis avec mon mari, mais nous comptons nous installer à l'Est, le plus rapidement possible.
- Ah oui ? Et par où allez-vous passer ?
- Par la forêt pour ne pas perdre de temps.
Des exclamations de surprise fusèrent parmi la foule. La jeune femme se sentit au centre de l'attention, et elle se recroquevilla d'avantage.
- On voit que vous venez de loin, commença la jeune vendeuse.
- Si vous allez vers l'Est vous devrez traverser la forêt des esprits, poursuivit un homme à sa droite, en fixant intensément la nouvelle venue. Je vous conjure de ne pas y aller. On raconte qu'elle est peuplée d'animaux sauvages gigantesques comme il y en avait à l'aube des temps. On dit qu'ils auraient même un Dieu, un grand cerf à tête humaine !
La jeune femme frissonna, et prit soudainement congé des villageois en serrant son sac de riz contre elle. Elle rejoignit rapidement son mari qui s'exclama :
- Te voilà enfin ! Je te croyais perdue.
Elle lui tendit le sac de riz sans rien ajouter et grimpa à nouveau sur son cheval :
- Trouvons un endroit où reprendre des forces.
- Nous arriveront bientôt à la forêt, il y aura là-bas de quoi boire et faire un feu pour le riz.
La femme hocha la tête, ne souhaitant pas faire part des mises en garde des villageois à son mari. Au fond d'elle elle ne voulait pas y croire, même si elle avait peur.
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Origines (Princesse Mononoké)
FanfictionLa couverture est un de mes dessin/montage 🥰 Venez re-découvrir un monde que vous connaissez déjà, mais sous une toute autre forme. Ici, piraterie, esclavage et prostitution s'enchaînent dans la vie de Dame Eboshi. Mort, destruction et...