28/ Course

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      — San, tu es prête ?

     La petite fille à quatre pattes comme ses frères sur la ligne de départ hocha la tête. Son et Sun courbèrent leurs pattes, prêts à partir, mais Sin resta assis, contemplant sa sœur qui avait beaucoup grandi.

     — Alors partez !

     Les deux louveteaux s'élancèrent et San voulu en faire de même, mais Sin l'arrêta. Elle vit ses deux frères partir au loin à toute vitesse, bondissant par-dessus les racines, esquivant les troncs, et elle leva la tête vers le dernier louveteau :

     — Qu'est ce que tu attends nous allons perdre !

     — Je n'en suis pas sûr, répondit-il mystérieusement.

     Il lui fit un signe de tête et elle le suivit, marchant toujours avec ses mains et ses genoux.

     — Tu peux te mettre debout tu sais, commença Sin alors qu'ils marchaient toujours vers le Sud et non vers l'Est où se trouvaient l'arrivée de leur course.

     — Je suis debout, minauda San en essayant de passer par-dessus une grosse racine glissante.

     — Sur tes deux pattes arrière.

     — Pourquoi ferais-je ça ? Ni toi ni Moro ne marchez sur deux pattes !

     — Toi tu peux le faire. Et cela te permettrai de gagner la course. Tu as de grandes jambes, tu pourras les doubler en empruntant même un petit raccourci.

     San fronça les sourcils. Il lui arrivait parfois, inconsciemment, de se mettre sur ses deux pattes arrière, mais elle ne savait pas à quoi cela pouvait bien lui servir. Elle avait toujours marché comme ses frères et sa mère. Depuis déjà plus de huit ans. Elle s'arrêta près d'un arbre et s'appuya sur le tronc pour pouvoir se lever. Lorsqu'elle fut totalement debout, elle remarqua qu'elle dépassait Sin de quelques centimètres, sachant que lui, était toujours sur ses quatre pattes. Elle sourit, et observa le monde tel qu'elle le voyait à présent : de beaucoup plus haut.

     — Oh je suis plus grande ! plaisanta-t-elle.

     — Oui et plus intelligente surtout, fit remarquer son frère. Tu les vois là-bas, qui se talonnent ?

     Ils s'étaient rapprochés d'une falaise d'où ils avaient une vue beaucoup plus dégagée sur la vallée. Sin désignait les deux autres louveteaux qui couraient à la lisière de la forêt, quelques mètres plus bas.

     — On peut les rattraper, affirma Sin.

     San se pencha en avant pour voir la falaise escarpée et vertigineuse qui se tenait devant elle. Elle pinça les lèvres et son frère s'exclama :

     — Grimpe sur mon dos vite !

     San n'avait jamais vu un loup monter sur le dos d'un autre loup. Cependant elle se rendait bien compte qu'elle n'était pas un loup comme les autres. Pourtant, sa famille l'acceptait quand même, donc elle ne s'en souciait guère. Elle écarta les jambes et bondit sur le dos de son frère, s'étant déjà bien habituée à n'utiliser que ses deux pattes arrière.

     Elle s'agrippa à la douce fourrure blanche de Sin, qu'elle n'avait pas elle-même à son plus grand regret, et il sauta d'un seul coup dans le vide. Elle ne cria pas, et s'accrocha d'avantage. Sin tendit fermement ses pattes et elles rebondirent sur la paroi rocheuse verticale. Il finit par laisser glisser ses pattes sur la pente, et bientôt, ils arrivèrent en bas.

     Le bout de la course se situait dans une clairière non loin d'eux à présent, et San descendit du dos de son frère pour se mettre à courir en direction de l'arrivée. Elle se surprit elle-même quant à l'agilité de ses deux jambes et à leur rapidité. Bien plus efficaces qu'à quatre pattes c'était certain. Ravie, elle arriva même à semer Sin. Elle sautait de rochers en rochers, atterrissant toujours avec grâce et souplesse, exactement comme ses frères. Elle finit par apercevoir Son et Sun à quelques mètres sur sa droite, et elle accéléra autant que possible, ne se souciant plus du troisième frère. Elle esquiva les dernières branches, se protégeant avec ses bras, et atterrit, essoufflée, dans l'herbe verte et soyeuse de la prairie.

     Son et Sun arrivèrent en trombe et la trouvèrent allongée sur le dos, son corps formant une étoile, au milieu de leur point d'arrivé.

      — Comment as tu fait ?

     — Par où es tu passée ?

     — Où est Sin ?

     L'intéressé arriva quelques instants plus tard, trainant un peu ses pattes qu'il avait éraflées contre la rocaille.

     — J'ai gagné, s'écria San, heureuse d'être pour une fois, supérieure à ses frères.

     C'est alors que Son et Sun, virent pour la première fois, leur sœur qu'ils savaient humaine, se mettre debout. Elle les surplombait de toute sa hauteur, et ils savaient très bien qu'elle avait un esprit déjà beaucoup plus développé que le leur. Cette petite humaine accomplirait de grandes choses, et ses frères lui devaient le respect.

     C'est ainsi que San montra pour la première fois sa supériorité aux animaux et même aux Dieux, en tant qu'humaine.    

Origines (Princesse Mononoké)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant