32/ Bataille

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Il faisait complètement nuit lorsqu'Ashitaka entendit les premiers cris. De mauvaises odeurs venaient lui titiller les narines et il s'éveilla péniblement. Son père et sa mère également avaient ouvert les yeux. Le jeune apercevait leurs mines interloquées dans la pénombre.

- Que se passe-t-il donc ?

Le chef de la tribu se leva pour aller jeter un œil à l'extérieur ; et Ashitaka se précipita aux côtés de sa mère. Lorsque la porte s'ouvrit, les cris s'intensifièrent, et Ashitaka identifia l'odeur comme étant de la fumée. Quelque chose était en train de brûler ! L'homme rentra en trombe dans sa demeure et fixa sa femme avec des yeux paniqués :

- Les femmes et les enfants vont se réfugier dans la montagne. Vous passerez par le côté Est du village, et vous essaierez d'être le plus rapide possible !

La mère d'Ashitaka ouvrit la bouche pour essayer de balbutier quelque chose mais elle fut coupée par son mari qui lui saisit le bras pour la faire sortir de leur maison. Ashitaka les suivit et s'écria à l'adresse de son père :

- Mais qui y a-t-il ?

- L'Empereur.

Ashitaka frissonna. Ainsi, l'inévitable guerre allait se dérouler aujourd'hui, en cette nuit fraiche de printemps. De nombreuses torches étaient allumées, mais l'odeur de brûlé provenait de l'extérieur. Les villageois couraient partout, les femmes et les plus jeunes avaient commencé à former un petit groupe qu'ils rejoignirent au pas de course. Le chef des Emishi saisit son fils par l'épaule et lui murmura, tandis que sa mère se mêlait aux autres femmes de la tribu :

- C'est à toi de t'occuper d'eux d'accord ? Trouvez une grotte dans la montagne, restez-y le plus longtemps possible. On viendra vous chercher lorsque les troupes de l'Empereur auront été chassées.

Ashitaka fronça les sourcils :

- Hors de question, moi aussi je me battrai, Kaya peut très bien les y conduire tous, elle est très débrouillarde, et moi ma place est ici !

- Ce n'est pas négociable Ashitaka. Tu iras avec les autres et tu resteras en vie c'est clair ?

Le jeune guerrier se dit qu'il ne valait mieux pas contester l'autorité de son père lorsqu'il employait ce ton là. Il hocha la tête, se promettant néanmoins de venir en renfort au cas où les Emishi se retrouveraient en mauvaise posture. Son père lui fit un dernier signe de la main avant de prendre en main les troupes pour vaincre l'Empereur, tandis qu'Ashitaka prenait en charge les femmes et les enfants pour les conduire à l'abri.

Dans la nuit, le chaos régnait. Les enfants pleuraient, les soldats hurlaient et couraient dans tous les sens pour maintenir les fortifications qui protégeaient leur village. Le groupe mené par le jeune homme s'éloigna du tumulte pour sortir à l'arrière, à l'opposée de troupes qui arrivaient en masse de l'Ouest. Le jeune homme ouvrit une petite porte découpée dans le bois qui constituait les hauts remparts du village et fit passer une à une les personnes qu'il devait protéger. Il ne pu s'empêcher pendant ce temps de contourner les piquets de bois planté dans le sol pour aller observer les soldats au service de l'Empereur qui les attaquait. Ils essayaient de forcer l'entrée du village et de faire tomber leur fortification, en brûlant les poteaux de bois collés les uns aux autres. Ashitaka serra la mâchoire mais se résigna à faire demi-tour pour escorter son groupe dans la montagne.

Ils marchèrent de longues minutes sur des chemins escarpés sur le flanc de la montagne. Ashitaka ne cessait de jeter des regards inquiets à la fumée qui s'échappait du feuillage des arbres qu'ils surplombaient, marquant l'emplacement de leur village en flamme. Il ne savait pas vraiment pourquoi son père avait refusé qu'il se batte. Après toutes ces années à l'avoir entraîné pour qu'il devienne un bon chef de guerre, il lui interdisait maintenant de prouver sa valeur ? Avait-il finalement aussi peur pour la vie de son fils ? Il était vrai que dans l'immédiat, le chef du village n'avait pas réfléchi. Il s'était juste juré de protéger la vie de sa famille, et jamais il n'aurait songé à envoyer son fils dans ce combat mortel. Ashitaka avait peur, mais s'il devait se battre et mourir pour son peuple il n'hésiterait pas une seconde.

Kaya marchait à ses côtés, et il lui prit amicalement la main. Elle l'observa surprise, et il afficha un sourire légèrement angoissé. Elle resserra la pression sur sa main pour le rassurer et ils poursuivirent leur marche en silence. Ils arrivèrent sur un plateau de terre battue au bord d'une falaise, où se découpait une grotte dans la roche. Ils s'installèrent tous au fond, chaque femme prenant un enfant sur ses genoux, pour essayer d'amener un silence des plus total. Ce silence était néanmoins très angoissant. Ashitaka s'avança à petits pas vers l'entrée de la grotte. La tension était palpable parmi tous ceux qui se trouvaient derrière lui. Il sortit de l'ombre et entendit soudain un sifflement passer juste à côté de son oreille. Il se recula d'un bond et la balle s'écrasa sur le rocher à sa gauche. Les femmes se mirent à crier en se terrant encore plus au fond de la cavité humide et Ashitaka dégaina son arme.

Le soldat sorti de sa cachette à son tour et se précipita vers le jeune guerrier, son sabre pointé vers lui. Ashitaka attendit qu'il soit assez proche et contra son coup avec sa propre épée. Un combat acharné s'ensuivit, et au plus grand désarroi du jeune homme, d'autres homme armés jusqu'aux dents firent leur apparition. Il essaya d'en retenir deux en même temps mais les autres s'approchaient déjà dangereusement des villageoises. Il entendit d'autres épées tinter et tourna la tête pour voir Kaya se lancer aussi dans une rude bataille. Il hésita à lui ordonner de fuir, mais voyant son adresse et son habileté, il la laissa lui venir en aide. D'autres adolescents avaient ramassés leurs armes ou des bouts de bois et s'élançaient pour retenir les assaillants.

Ashitaka parvint à faire tomber ses deux adversaires dans le vide et se précipita alors en haut de la grotte. Il fut poursuivit par un soldat à qui il régla son compte avec difficulté en lui transperçant le ventre. Essoufflé, il parvint à grimper au sommet de la grotte, d'où il pu achever chaque soldat d'une flèche dans les entrailles.

On le félicita et on le remercia lorsqu'il revint parmi ses protégés. Kaya avait enroulé un morceau de tissu sur l'éraflure qu'elle avait au bras, et tous les autres s'occupaient des éventuels blessés. Il s'assit pour reprendre son souffle, épuisé, en remerciant mentalement son père de l'avoir envoyé ici, sans quoi, tout le monde serait certainement mort.

Origines (Princesse Mononoké)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant