33 - Partir.

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      Pascal descend lentement de son coupé, dans trois semaines c'est les vacances de Pâques, il partira pour la Normandie. Épuisé, il s'adosse à son véhicule, depuis le nouvel an, ses nuits sont chaotiques, il navigue entre insomnies et cauchemars.

Depuis sa rupture, plus rien n'a de sens, il se sent las et blasé et il a un besoin vital de s'éloigner. Il aperçoit enfin Florent sortir du garage, ce dernier se fige quand il le voit et vient vers lui. Maigre consolation, le mécano a l'air aussi détruit que lui avec ses valises sous les yeux et ses yeux rougis de fatigue.

-Pascal, tu voulais me parler? Sa voix rauque de fatigue est tellement lasse.

-Oui, on peut aller dans ton bureau?

-Euh...là? Tous les gars sont là et...Ce n'est pas trop possible, avoue le mécano.

Le cœur brisé, Pascal comprend que le beau quinqua ne veut pas s'afficher avec lui. Il ne manquerait plus qu'on le soupçonne d'être une «tapette»! Cette pensée le fait trembler de colère, il est révolté et déçu, une fois de plus.

-On va au café, ce ne sera pas long. Sa voix glaciale claque dans l'air et Florent le suit, résigné.

Les deux hommes s'installent dans un coin tranquille au bar près du garage.

-Je suis désolé Pascal, ce n'est pas contre toi...

-Quoi? Ta lâcheté? Parce qu'il s'agit de ça n'est-ce pas? De la lâcheté! Le psy ne veut pas s'énerver mais c'est plus fort que lui, Florent s'est bien moqué de lui. Tu connais mon passé non? Tu crois vraiment que je suis du genre à me cacher? Même pour toi, je ne le ferais pas! Vocifère le plus vieux. Tu as bien couché avec moi et aimé ça non? Assume mon gars!

Pascal hurle les derniers mots et plusieurs têtes se tournent alors vers les deux hommes. Florent affronte ces regards le menton levé et l'air fier, pas question de baisser les yeux! Il n'aura jamais honte d'être sorti avec le sexy prof, jamais. Il ne souhaite pas s'afficher devant ses collègues, c'est tout.

-A se demander si tu comptais bien parler de nous un jour! Continue Pascal, amer.

Un silence polaire tombe brusquement sur la table, les deux hommes se mitraillent du regard et Florent fini par baisser les yeux en soufflant longuement. Après de longues minutes de silence, il observe, impuissant, le regard de son partenaire s'humidifier.

-Pascal s'il te plait, comprend moi.

-C'est fini Florent, je viens pour mettre les choses au clair, on a assez joué tous les deux. Ton fils va mieux et ne nécessite plus un suivi aussi intensif. A la rentrée il retournera à la Fac et moi aussi, nous nous verrons là-bas, je ne viendrais plus jamais chez toi et surtout, je ne te reverrais plus. Je suis désolé, je t'ai tendu la main plusieurs fois et tu refuses de nous laisser une chance, je suis fatigué d'être le seul à se battre pour nous.

Non, non, non...Il ne peut pas me faire ça, pas comme ça! Je l'aime trop, je suis trop fier et trop con aussi!

-J'ai perdu Thierry, je te perds toi aussi, je crois bien que je suis maudis, c'est ainsi. Je ne veux plus souffrir, il faut que tu me comprennes.

Le plus âgé se lève et le regarde, ses yeux brillent de larmes contenues.

-Prend soin de toi et de Lucas, tu vas me manquer, conclut-il en se levant.

Sa voix se brise sur les derniers mots et il se dirige aussitôt vers la sortie, sans se retourner.

Florent baisse la tête sur son café froid, des années.

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