Chapitre 34 (version éditée)

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Le mois qui suivit combla Olivia. Elle eut l'impression de vivre dans un autre monde aux côtés de Narcisse, isolée de tous, mais heureuse. Les époux passaient presque tout leur temps ensemble. Quand Narcisse peignait ou dessinait, Olivia lisait. Ils montaient pendant des heures, conversaient et se découvraient peu à peu. Plus les jours défilaient, plus leur ménage s'épanouissait et les sentiments qu'ils se vouaient mutuellement ne faisaient que croître.

La comtesse avait essayé de les visiter à maintes reprises, cependant, elle s'était toujours trouvée face à une porte close. Gérald, sur ordre de Narcisse, n'avait eu de cesse de la congédier.

Pour la première fois depuis leur mariage, Olivia se sentait en harmonie avec son époux, et elle avait foi en leur couple. Ensemble, ils construisaient l'édifice de leur avenir, pierre après pierre.

Appuyée contre le chambranle de la porte qu'elle venait d'ouvrir, la jeune femme contemplait son mari, étendu sur le sofa du petit salon situé au premier étage. Il s'était assoupi et, sur son ventre, une créature rousse roulée en boule dormait elle aussi paisiblement. À leurs pieds, Nina veillait.

Durant ce long mois d'août qui touchait à sa fin, Narcisse avait passé énormément de temps à s'occuper du renardeau, lequel avait par ailleurs un peu perdu de son apparence juvénile. L'animal le suivait partout désormais, si bien qu'Olivia se demandait s'il parviendrait à reprendre sa liberté. Elle-même s'était beaucoup attachée à lui, le trouvant attendrissant. Nina, quant à elle, avait vu dès le début ce nouvel arrivant comme un compagnon de jeu à l'énergie débordante, et à la grande surprise d'Olivia, leur cohabitation était parfaite.

Afin de ne pas réveiller son époux, la jeune femme referma doucement le vantail puis descendit les marches pour gagner le hall. Elle salua Gérald en l'informant de sa destination et sortit.

C'était le milieu de l'après-midi, et le soleil, encore haut dans le ciel, entamait tout juste son déclin. Olivia se dirigea vers le pré où Layl paissait tranquillement. Avant d'ouvrir la barrière en bois de l'enclos, elle appela l'étalon noir par son nom.

À peine eut-elle posé un pied sur l'herbe, que l'astre de feu, impitoyable, avait brûlée par endroits, qu'elle l'entendit lui répondre d'un hennissement strident. Un sourire se dessina sur ses lèvres quand elle vit son cheval arriver vers elle au galop, crinière au vent, l'encolure arquée et la queue en panache.

Il pila à sa hauteur, les naseaux humides, et renâcla en la fixant. Olivia passa sa main le long de son chanfrein concave et la fit descendre sur le velours de son museau. Le souffle chaud de Layl vint caresser ses doigts en une brise délicate.

La jeune femme appuya alors son front contre la tête de l'étalon et ferma les yeux. Celui-ci n'esquissa pas le moindre mouvement, comme s'il se délectait des attentions de sa cavalière.

Passé ce moment de douceur, elle l'abandonna quelques minutes pour aller chercher son filet dans la sellerie avec l'idée d'honorer une vieille promesse. Elle demanda à Xavier, qu'elle croisa en chemin, de bien vouloir harnacher Ritournelle et se mit en quête de Marianne. Elle trouva la femme de chambre en train de dépoussiérer le grand salon, parfaitement concentrée sur sa tâche.

— Madame, l'accueillit la domestique en faisant volte-face.

— Marianne, que diriez-vous de laisser tomber votre labeur pour aller vous promener à cheval avec moi ?

Marianne eut du mal à cacher la joie qui illumina instantanément ses traits, mais plaida tout de même :

— Je n'ai pas terminé d'épousseter la devanture de la cheminée ni de polir le serviteur en laiton et le chenet...

NARCISSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant