Dans la voiture des Richard, les deux retraités s'appliquaient à rassurer Natasha. Elle était aux cents coups à la pensée de sa grand-mère, pauvre vieille invalide, faible et perdue dans cette savane qu'était le vaste monde. Soudain, Firmin glapit :
— Oh, mer... douille ! Ta pouffiasse rapplique, Armand !
Ses deux compagnons relevèrent la tête, tétanisés. C'était vrai : la vieille dame revenait cahin-caha sur ses pas – ou plutôt sur ses roues – pour rentrer à la maison. Ce faisant, elle remarqua l'automobile et son conducteur – Natasha avait eu la présence d'esprit de se pelotonner sur le plancher, et Armand, derrière un dossier.
— Ohé ! Firmin ! appela la vieille dame.
Dans le véhicule, ce fut un véritable branle-bas de combat.
— Zut de flûte !
— Sauve qui peut !
— Démarre, Firmin ! Démarre !
— Peux pas ! Ce moteur de malheur cale pile quand il ne le faut pas ! »
Consterné, il se prit la tête dans les mains en se vautrant sur le volant. Il haleta d'une voix éraillée :
— Natasha, va-t'en ! Ne reste pas ici ! Déjà, ça va être difficile d'expliquer ce qu'on fiche sapés comme ça... mais si en plus, on doit justifier ta présence, on ne va jamais sortir de l'auberge !
— Reçu cinq sur cinq !
La figure crispée dans un rictus angoissée, elle ouvrit la portière et s'extirpa à quatre pattes du véhicule. Par chance, elle se trouvait du côté que Colette-Bernadette ne pouvait voir. Cachée derrière la voiture, elle s'accroupit et courut derrière un platane, d'où elle observa la suite des événements.
Dans la voiture, Armand peinait à respirer. Il rougissait, transpirait, haletait... soudain, il se pencha vers son frère :
— Écoute, Firmin... je peux pas ! Je ne peux pas rester ici !
— Hein ?
— Je... je suis fatigué, j'en peux plus ! J'arrive plus à respirer ! J'ai les oreilles qui bourdonnent, j'ai froid, j'ai chaud, je grelotte...
— Ah, non ! Tu ne vas pas me faire un malaise ! Ce n'est pas le moment !
— Je crois qu'il vaut mieux que je m'en aille...
— Quoi ? Tu m'abandonnes ! Je te signale que si on est ici, c'est à cause de toi !
— Heu... faut bien surveiller la petite ! On peut pas la laisser seule ! Je... Je la ramène à la maison !
— Espèce de lâche !
— Bon... on t'attend là-bas, hein ?
— Mais, dégonflé ! Je lui dis quoi, moi, à ta greluche ?
Pas de réponse. De la même manière que Natasha s'était enfuie, son frère s'était éclipsé comme un fantôme.
— Eh, oh ! Firmin !
L'intéressé tressaillit et se retourna brusquement. Bernadette toquait contre sa vitre, son fauteuil roulant à côté de la portière. Ouvrant et fermant la bouche tel un poisson rouge, il baissa sa fenêtre et lui adressa un sourire peu convainquant.
— Oh, bonjour ! Comment allez-vous, Berna... heu, Colette ?
— Très bien, mon cher Firmin, très bien... mais en fait, où est votre frère ?
— Mon frère ? Quel frère ?
— Armand, bien sûr !
— Ah, oui, c'est vrai ! Enfin, en même temps, c'est le seul... sinon, oui ? Vous disiez ?
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Attention, Mémé méchante !
HumorSa famille la délaisse ? Pas de soucis pour Bernie : elle prend l'identité d'une autre ! Mais une simple farce peut si facilement dégénérer... La vieille Bernadette Bujold s'ennuie : son mari est décédé, ses neveux la délaissent, le garde assig...