Attention, Mémé méchante !

Chapitre 25 : À Fond la caisse

 Colette faisait tranquillement son tour de quartier, quand elle arriva au bout de la rue. En plissant les yeux, elle distingua une demi-douzaine de personnes qui détalaient : sa fille, sa nièce, ses voisins et Bernadette. Alors qu'elle klaxonnait pour les appeler, elle les vit s'engouffrer dans une camionnette semblable à la sienne.

 — Nom d'une pipe ! Mais qu'est-ce qu'ils fichent ? 

 Réalisant qu'ils se trompaient de voiture, elle leur klaxonna après de plus belle et décida de les prendre en chasse. Mais elle n'en eut pas le loisir : quelqu'un tapa sur sa portière avant qu'elle ne prenne de la vitesse. L'angoisse lui tordant le ventre, elle ouvrit... avant d'écarquiller les yeux. Quatre cagoulés se tenaient devant elle.

 — Kikou Riquette ! On a la beuh ! T'ouvres ?

 — Pardon ? articula-t-elle, estomaquée.

 — Wesh les mecs ! Regardez, s'pas ma meuf!

 — Wallah, c'est guatamolesque ! 

 Abasourdie, elle les vit trembler, tortiller les anses des sacs qu'ils tenaient... et finalement, l'interroger :

 — Dites ! Z'auriez pas vu une turvoi, genre la votre, filer...

 — Une camionnette de facteur, dites-vous ? Si ! Elle fonçait vers cette direction.

 — Ouvrez et suivez-les.

 — Pardon ? Mais il en est hors de question ! Je ne suis pas un taxi !

 — Balec ! On est pas là pour chiller ! 

 Il laissa entrevoir, l'espace d'un instant, la lame d'un couteau dans sa poche. Blême, Colette les laissa entrer.

 — J'aime mieux ça. Maintenant, t'as intérêt à déchirer ! 

⁂

 La camionnette de Riquette démarra sur les chapeaux de roue, laissant sur le trottoir Manon, Armand, Bernadette, Firmin et Natasha.

 — Bon. Ça, tomber sur des trafiquants de drogue, c'était pas prévu au programme. Maintenant, on fait quoi ? On attend l'arrivée des flics ? 

 Dès que Riquette s'était aperçue que ses passagers appelaient la police, elle avait jugé préférable de prendre la poudre d'escampette. Ainsi, abandonnés dans la nuit sombre, les complices avaient renfilé leurs cagoules pour se tenir au chaud.

 — Sinon, on peut essayer de rentrer à pied...

 — J'ignore si mes vieilles jambes tiendront le coup. On est loin ?

 — Aucune idée. La rue ne me dit rien. Je ne peux même pas chercher sur Google Maps : mon téléphone capte pas le réseau. Et je ne vois pas dans quel quartier on peut être... 

 Firmin leva les yeux au ciel, croisa les bras et soupira. Il répéta pour la énième fois :

 — Félicitations ! Je vous l'avais bien dit, que ça allait mal finir ! Je vous l'avais bien dit, que c'était un plan foireux ! Si on m'avait écouté, on ne serait pas perdu, à minuit passé, dans le froid, avec...

 — Attendez ! Regardez ! couina Manon, sautillant sur place. Là-bas ! Une voiture ! 

 Elle pointait du doigt une lumière mobile. Les phares d'un véhicule. Tous coururent à sa rencontre :

 — Ohé ! Attendez !

 — S'il vous plaît ! Arrêtez-vous !

 — On est vieux, on est fatigué !