3- Lise 20 ans et Martial 2 ans

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Martial et moi, nous avons atterri dans un refuge mère-enfant. Ce qui est bien, c'est que j'ai de l'aide pour m'occuper du bébé, puisque nous avons une crèche intégrée dans le bâtiment. J'ai pu m'entrainer pour les championnats de kitesurf en passant mon diplôme de coiffeuse, j'ai même poursuivi avec une formation d'esthéticienne.

Je savais cependant que je ne pourrais pas rester éternellement dans ce havre de paix. Normalement j'avais droit à une année, mais ils m'ont prolongé car Martial a failli mourir. Il étouffait alors que nous ne comprenions pas ce qui se passait. Le médecin a diagnostiqué des problèmes graves de santé. Mon bébé est asthmatique et déjà reconnu invalide, ce qui me terrifie pour son avenir.

Désormais, j'ai appris à vivre avec la maladie et les traitements. Martial n'est pas comme les autres, il est minuscule et sa courbe de croissance est toujours dans la limite basse. Je ne serai pas la mère d'un costaud. Son handicap nous a permis de bénéficier d'une allocation supplémentaire et d'un droit de priorité pour trouver un logement social. Après deux années, ils m'ont trouvé un appartement dans un immeuble moche, dans le style Tchernobyl. De nombreuses villes de Normandie dévastées pendant le débarquement de la seconde guerre mondiale ont été reconstruites à la va-vite et le résultat est hasardeux. Je vais donc souffler les bougies de mon anniversaire de vingt ans chez moi. Je suis un peu triste, car j'étais bien au refuge et j'y serai bien resté, mais comme me l'a expliqué la responsable, il y a d'autres femmes et d'autres bébés, qui ont plus besoin d'aide que moi.

L'avantage de l'immeuble, c'est qu'il donne sur le port de Cherbourg, et la vue est superbe puisque je suis au sixième étage sans ascenseur, mais avec un bébé de deux ans ça va être rude.

L'appartement est grand, il a deux chambres et un salon, j'ai même un balcon.

Surtout je suis dans le centre-ville a côté du salon de coiffure et d'esthétique Marité où je travaille. La crèche est à cent mètres et la plage ou je m'entraine au kitesurf est à coté aussi.

Si ce n'était la santé de Martial, les choses s'arrangent.

J'ai pu participer au championnat de France de kite et j'ai gagné. Ç'était vraiment chouette. J'ai même été sélectionnée pour les championnats du monde, mais je ne me voyais pas laisser mon bonhomme à la santé si fragile. Je suis heureuse avec mon titre de championne nationale, ce ne sera jamais plus, la vie ne l'a pas voulu ! mais ce n'est pas si mal !

Quelquefois il m'arrive de me dire que si Martial n'avait pas été là, j'aurais pu être championne du monde... mais peut être aussi que je me serai plantée en beauté.

J'adore mon travail, embellir ces femmes et je m'épanouis que ce soit à faire des coupes ou des colorations, mais aussi dans les soins esthétiques, et sans honte, je suis la reine du poil.

Mes clientes m'adorent.

Cependant, ces deux dernières années je ne suis jamais ressortie avec quelqu'un, comme si j'étais dégouté des hommes. Le traumatisme de mon accouchement non-voulu alors que j'étais trop jeune et le souvenir de ce porc m'ont écœuré et il suffit que je me rappelle ce type pour avoir encore envie de vomir. Dans le salon et à la crèche je vis principalement dans un univers féminin qui me convient.

Il n'y a que lorsque je fais du kite, que j'affronte des hommes, mais je me débrouille beaucoup mieux que la plupart des imbéciles dans l'eau, et je les sème rapidement en allant au large.

Mes amies du salon, les clientes me conseillent d'essayer de retrouver quelqu'un, mais cela ne sera pas possible. Je n'ai vraiment plus envie.

Lise et Carla [GL]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant