1- Lise guerin 18 ans - 1 avril

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─ C'est le premier avril aujourd'hui vous avez le droit à un joli petit poisson d'avril ! C'est aussi comme un œuf de paques en avances. C'est une date sympa non ?

L'infirmière sourit de toute ses dents comme dans un film d'horreur et elle me parle comme à une débile. Si elle croit que c'est comme ça qu'elle va me remonter le moral, elle est mal barrée. Exaspérée par sa connerie, je me réfugie sous les couvertures, dégoutée de la vie. On vient de me remonter enfin dans ma chambre.

─ Madame vous voulez voir votre bébé ? insiste t'elle, en remettant du produit dans ma perfusion. Elle parle d'une voix fausse et je sens qu'elle se retient de me secouer comme un prunier.

─ Ne m'appelez pas madame ça me saoule ! J'ai mal, j'ai trop mal... je suis détruite.

─ Mais non mad... pardon mademoiselle ? Vous voulez voir votre bébé ? demande encore l'infirmière et on ne peut pas lui reprocher d'abandonner.

─ Jetez-le à la poubelle !

Je lui ai coupé le sifflet, et je ne cède pas ensuite malgré son insistance, il n'est pas question qu'elle m'amène cette horreur. Chaque fois qu'elle insiste, me parlant de ma responsabilité, du personnel débordé, je lui donne la solution : le mettre à la poubelle. Je vois qu'elle s'arrache les cheveux et enfin elle part en grommelant mais j'ai parfaitement entendu les mots « trainée !... Monstrueuse ! ».

Le monstre ce n'est pas moi ! J'essaye de me calmer et je pleure sous les couvertures. Je n'en voulais pas de l'alien moi !

Je n'ai pas eu d'enfance, je ne veux pas d'enfant, il parait que j'ai fait un déni de grossesse parce que quand j'ai réalisé, j'étais déjà enceinte de sept mois. J'ai supplié en pleurs mon médecin de m'autoriser à avorter pour me débarrasser de cette atrocité, mais il a refusé.

Cela fait donc trois semaines que je sais, je voudrais me couper le ventre pour arracher le monstre en moi. Il était prévu pour le mois de mai, hier j'ai fait du kite toute la journée dans le froid et quand je suis sorti de l'eau, la douleur m'a coupé en deux. J'ai dû tomber dans les pommes et je me suis réveillée à l'hôpital. Ils allaient commencer la césarienne car j'ai perdu les eaux.

J'ai accouché à l'aube de ce jour dès blague, donc le premier avril, la vraie blague de ma vie pourrie.

J'ai refusé de le prendre dans mes bras, de le regarder, choquant tout le personnel qui s'est occupé de moi en salle de travail. Pour se venger ils m'ont fait mal pour me recoudre.

Je veux mourir.

─ Madame Lise Guérin ?

─ P'tain j'ai dix-huit ans vous arrêtez avec vos madames de merde !

─ Très bien, je dois vous appeler comment ?

─ Lise !

─ Pardon Lise, je suis Madame Dambreville, l'assistante sociale de l'hôpital.

Je hoche la tête, les assistantes sociales, je connais bien, je ne connais que ça.

─ On m'a demandé de venir vous voir, car vous avez accouchez hier matin et vous rejetez votre bébé ? Vous refusez de vous en occuper, vous n'avez pas voulu lui donner un prénom ?

─ Je n'en veux pas !

─ J'ai récupéré votre dossier, puisque vous êtes pupille de la nation.

─ Oui je suis orpheline, enfin plutôt ma mère m'a jeté. Je reconnais en soupirant.

On m'a trouvé errant dans la rue, je devais avoir six ou sept ans, de ma petite enfance, je me rappelle du froid et de la faim. Quand les services sociaux m'ont récupéré je n'avais jamais été à l'école et ils m'ont cru retardé parce que je ne savais pas lire et écrire. Je n'ai jamais été douée scolairement, je n'arrive toujours pas à lire correctement.

J'ai bien mené ma barque à l'orphelinat, j'y étais bien moi, mais ils m'ont fait partir en début d'année. Ils m'ont trouvé un appartement, car ils ne gardent les enfants que jusqu'à seize ans. J'ai eu la chance de gratter un an de plus.

Je suis en apprentissage pour passer mon CAP coiffure et je fais mon stage chez les Perrier.

Je m'entrainais surtout pour passer les championnats de kitesurf et je suis bien classée. J'avais toutes mes chances.

─ Le père de l'enfant ?

─ Mon connard de patron, il va nier, mais c'est lui, je ne veux pas y retourner !

─ L'assistante sociale qui s'occupe de vous habituellement l'a contacté, et il a nié immédiatement être impliqué. Bien trop vite. Bref !... C'est un véritable aveu, alors que vous n'aviez rien dit, donc ...voulez-vous que nous fassions quelque chose ?

─ Non il ne m'a pas violé. Je souffle en mettant mon oreiller sur ma tête c'est tellement injuste. Je voudrais battre des pieds pour défouler ma colère, mais mon ventre me fait si mal !

Renaud Perrier, le mari de l'esthéticienne, m'a tourné autour comme un sale porc ! Il ne me plait pas du tout, mais j'ai cédé et je couche avec lui quand sa femme n'est pas là.

L'assistante sociale s'est assise sur le bord de mon lit et me caresse les cheveux.

─ Lise il faudra en parler. Je me doute que ce n'est pas le moment, mais s'il vous a forcé ou !

─ grmmmmHHHHH ! je hurle d'exaspération dans mon oreiller.

Elle est gentille on dirait qu'elle comprend, mais elle doit en voir tellement des cas comme le mien.

─ Je m'appelle Florence, je suis désolée pour tout ce que vous avez eu à subir Lise. Vous devriez en parler.

Je secoue la tête.

Non pas moyen !

Elle me retire l'oreille de la tête.

─ Donc le bébé vous ne le gardez pas ? Vous voulez le faire adopter ? Nous nous lançons ainsi ?

─ Oui s'il vous plait, vite ! Débarrassez-moi de cette horreur !

─ Le personnel hospitalier l'a appelé Martial, comme vous ne vouliez pas lui donner de prénom.

─ C'est moche !

Lise et Carla [GL]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant