deux.

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« Qui nous dit que t'es pas juste une groupie qui se joue de nous là ? Demanda Elyo, les lèvres posées sur l'opercule en carton dégueulasse des boissons Mcdo

J'haussais les épaules avant de finir ma petite boite de 4 nuggets. C'est vrai ça, Elyo, peut-être qu'en fait je perdais volontairement du temps avec un groupe de cassos dans l'espoir d'avoir un billet. Mais il me prenait pour qui, lui ? Le temps c'était de l'argent, alors je sélectionnais précautionneusement les activités qui ponctuaient ma vie.

— Franchement, répondis-je la bouche pleine, même moi je sais pas si je suis là dans l'espoir de me taper l'un d'entre vous ou juste pour éviter de manger mcdo toute seule.

Je sentis une tape à l'arrière de mon crâne et je tombais sur le sourire de Lesram, fier de son action. Je finis ma bouchée et frottai mes mains l'une contre l'autre, le fusillant du regard. Ça faisait moins d'une heure que nous étions sur le parking à l'arrière du zénith, j'avais garé ma voiture à côté de leur camion Mercedes et nous nous étions assis au sol, à l'abri des regards curieux. Un certain "Matou" nous avait rejoint, le DJ d'après ce que j'avais compris. Il avait été sur scène avec PLK, mais de l'endroit où j'étais, je ne l'avais pas bien vu.

Le courant passait bien mais c'était sans grand étonnement, je savais apprivoiser des mecs de quartier, c'était mon milieu à moi aussi. On ne se racontait pas nos vies, on connaissait déjà les galères de chacun, quand tu viens du quartier, tu sais. Pas besoin de storytelling et de belles anecdotes pour se mettre en avant, on avait tous vécu la même hess.

Je poussai d'un coup d'épaule celui qui avait osé me toucher et il m'ébouriffa les cheveux. Le feeling passait vraiment bien avec Lesram, qui ne devait certainement pas s'appeler comme ça en réalité.

— La première option, elle est cool, intervint Ormaz en pouffant

Je vis les yeux de Mathieu bondir sur son pote alors qu'il léchait la feuille de son cône. En parlant de lui, il n'était pas très bavard. C'était assez drôle puisque c'était lui qui m'avait demandé de les attendre mais j'osais pas rebondir sur le début de discussion que nous avions eu dans le hall du zénith, alors je le fuyais un peu. Maintenant que la redescente avait eu lieu, je me sentais d'attaque à affronter mon échec, j'étais de meilleure humeur et je n'avais plus envie de m'apitoyer sur mon sort. Selva avait repris le dessus sur Andrew. J'étais à deux doigts de leur proposer une sortie en boite ou dans un bar pour faire la fête jusqu'au lendemain mais je me ravisais en pensant à mon départ pour la capitale qui devrait avoir lieu incessamment sous peu. 

— Bon, t'as capté qu'on était dans la musique, que notre taff c'est ça, mais toi, tu veux faire quoi de ta vie ? Lança Zeu
— De l'argent, ricanai-je même si j'étais vraiment trop sincère

C'était vrai, depuis toute petite je rêvais de pouvoir vivre normalement, sans devoir calculer la moindre dépense ou compter les pièces rouges qui trainaient dans mon porte-monnaie pour m'acheter de la bouffe. Mais en même temps, j'avais la folie des grandeurs et j'étais pas certaine d'un jour pouvoir me contenter d'un smic.

Mon voisin de droite, soit Lesram, attrapa mon poignet de sa main gauche et cala ma main dans son autre main pour me la serrer comme si j'étais une marionnette, tandis que les autres se marraient.

— Bienvenue au club, dit-il
— Mais là, dans la vie tu fais quoi ? Demanda Elyo curieusement
J'étais étudiante, je viens de finir mes études, expliquai-je. J'ai passé le concours pour devenir professeure des écoles mais j'ai foiré les oraux.

Ils réagirent bruyamment, sûrement étonnés par l'avenir professionnel que je m'étais imaginé. Tout le monde réagissait pareil quand je disais ça. Mais je m'étais rangé, moi. C'était fini les conneries.

KAIROS | PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant