Retiens moi*

1.Lexy

- Maman ! Dis-lui de se taire ! je supplie ma mère affairée à l'évier, même si plus rien ne reste à laver.

- Maman ! Maman ! m'imite mon insupportable frère.

- Estéban ! Laisse ta sœur tranquille ! lui ordonne enfin ma mère. Tu n'as pas des devoirs à terminer ?

- On est samedi, maman ! lui rappelle effrontément mon frère. J'ai tout le week-end pour les faire ! Contrairement à certaine personne je n'ai pas le droit de sortir, moi ! Alors que d'autres vont en soirée, moi je vais passer ma soirée, ma très longue soirée, à regarder « the voice » avec ma chère maman !

- Toujours en train de se plaindre ! je lui lance. Ce n'est pas de ma faute si tu n'as pas de copain !

- Ce n'est pas ma faute si tu n'as pas de copain ! m'imite-t-il à nouveau.

C'en est trop ! Je me lève de ma chaise et m'approche dangereusement de lui. Mais ma sœur s'interpose entre lui et moi faisant croire qu'elle prenait quelque chose sur la table.

- Zen soeurette ! 

Je grogne et je monte dans ma chambre afin de m'avancer dans mes devoirs. Ça me calmera.

Estéban a quinze ans. Il est capricieux depuis que mon père est parti, il y a cinq années de cela. Ma mère travaille à l'usine du coin. Elle fabrique des pièces de voiture pour une grande enseigne. Elle fait les deux huit. Mais les week-end, elle adore les passer avec ses chers enfants. Elle parait toujours fatiguée depuis qu'il n'est plus là et Estéban est de plus en plus dur. L'adolescence surement. Il est souvent puni. Comme ce week-end ! Il sèche les cours, il répond aux profs et ma mère est souvent convoquée pour lui. Il ne se rend pas compte de l'état de nervosité dans lequel elle se trouve et elle ne lui montre pas non plus.

Je file à la douche et m'installe à mon bureau lorsque mon téléphone vibre.

- Mal ! Il n'est que onze heures ! je lui reproche en grognant. 

- Oh que non, ma belle ! me répond-elle nerveusement. Il est déjà onze heures!

Ma meilleure amie, Malika. La fille la plus populaire du lycée où nous sommes en dernière année. C'est la fille la plus joyeuse et pleine de vie que je n'ai jamais vu, après ma sœur ! C'est elle qui devrait être sa meilleure amie ! Elles se ressemblent plus qu'avec moi ! Je n'aime pas sortir, je n'aime pas les gens ni leur parler ! Leur vie ne m'intéresse pas le moins du monde et les soirées sont pour moi une réelle torture ! Alors pourquoi Malika m'a choisi, moi ? On dit que les opposées s'attirent !

- Il faut que tu sois prête dans cinq minutes ! m'ordonne t-elle. J'ai réussi à avoir une invit' avant que tout le monde n'arrive ! Mets ton maillot !

- Mais non ! je lui réponds en fronçant les sourcils. Je suis déjà habillée et je n'ai pas du tout envie d'aller...

Mais trop tard. Pour Malika, les minutes sont des secondes et j'entends la porte d'entrée s'ouvrir accompagnée de sa douce voix qui salue ma famille. Je l'entends grimper les escaliers à vive allure et ma porte s'ouvre tandis qu'elle continue à frapper. Quel intérêt ? M'exaspérer !

- Tu vas halluciner ! s'exclame-t-elle en levant les bras.

Elle porte une jolie robe courte décolletée rouge avec des fleurs blanches. On aperçoit son maillot blanc sous son vêtement léger. Le blanc va parfaitement avec le brun de sa peau. Elle a pris le temps de se maquiller. Quelle importance si elle va se baigner ? Mais Malika a tout prévu ! C'est du waterproof qu'elle m'a répondu une fois. Tout est calculé avec elle ! Rien est laissé au hasard !

- Ça se passe dans la villa de Dean ! Tu vois qui s'est ? me demande-t-elle tandis que mon regard se fait de moins en moins illuminé.

Dean est un con ! Il est prétentieux, vulgaire et c'est un vrai con ! Sachant que notre journée risque de se passer chez lui, j'ai encore un peu plus envie de tomber malade !

- Ses parents sont absents tout le Week-end ! continue-t-elle en fouillant dans mon armoire. Il a invité ses potes à passer l'aprèm dans la piscine et moi... enfin nous...

Je souffle fortement pour qu'elle comprenne. Je n'ai aucune envie de me retrouver à jouer les potiches au bord d'une piscine !

- Y'aura Mathis... chuchote-t-elle en faisant un léger sourire comme si cette information avait l'ombre d'une chance de me faire changer d'avis. Oh ... d'accord ! râle-t-elle. On passe chercher Bastien ! Ça te va ?

Je retrouve un peu le sourire et attrape le maillot qu'elle me tend.

Bastien est mon meilleur ami ! Il a été présent lorsque mon père est décédé. Il m'a réconforté, écouté, prêté son épaule pour que je lui pourrisse son pull et il est aussi mon meilleur allié lorsque Malika m'entraine partout et qu'elle m'y laisse seule pour faire ... sa Malika !

Elle est dans la section Journalisme. C'est une future reporter. Elle est très douée.

Bastien se situe plus dans la partie sportive. Il fait du foot avec l'école et également avec son club. Il est blond aux yeux bleus. Le genre de gars qui plait aux filles. Mais pas à moi, fort heureusement ! Nous nous connaissons depuis que nous sommes nés. Nos parents sont amis. Alors nous avons joués ensembles mais jamais nous ne sommes vus comme autre chose que des frères et sœurs ou des amis purs sangs.

- D'accord... lâche-t-elle désespérée. Lexy, si tu continues à te faire accompagner par Bastien dans toutes tes soirées, tu finiras vieille fille ! Il fait fuir tous les prétendants !

- Tu parles comme si tu avais cent ans ! je la coupe. Ce sont tous de gros nazes !

Elle me regarde l'air sceptique. Et pourtant, je ne suis pas loin de la réalité. Il y a certainement des mecs bien dans l'histoire... Mais où sont-ils ? Dans les soirées où me traine Malika, ce sont souvent les mêmes personnes : soit les plus populaires du lycée ou les plus populaires du campus. Dans tous les cas, Malika ne s'intéresse qu'au people et moi, je ne le suis pas !

- Je vais t'en faire rencontrer un, là...

- Oh, non ! Pitié Mal ! je la supplie. Ne me fais pas ça !

- Mais le gars, il est différent ! ajoute-t-elle. Tu verras !

Et là, je sais que quoi que je dise, elle me présentera le gars et comme d'habitude celui-ci tentera de lancer une conversation qui ne m'intéressera pas. Mais je sais que malgré mes protestations, elle le fera quand même.