chapitre 35 : Les cavernes de Mandos

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Un homme, le visage caché par la pénombre, entra. Elanor le regarda avec inquiétude, il était de taille moyenne et portait une toge sombre.

Par réflexe, elle se recroquevilla contre la paroi, peu rassurée par cet inconnu.

- Qui êtes-vous ? lui demanda-t-elle.

En silence, l'homme se dirigea vers elle.

- Que me voulez-vous ?!

Alors que toutes sortes d'idées d'horreur lui passaient par la tête, Elanor fut prise de court lorsque l'homme se saisit de sa chaine, la détacha puis la força à se lever.

- Veuillez me suivre.

Sa voix était terne, mais ferme et autoritaire.

Elanor resta muette et obéit. Sans cérémonie, le gardien la traina hors de sa cellule.

Ils débouchèrent dans un couloir étroit où s'alignait de nombreuses cellules similaires à celle d'Elanor. Elle avança d'un pas nerveux, observant ce nouvel environnement qui ne présageait rien de bon.

Les portes étaient toutes closes, et l'on ne pouvait voir à l'intérieur. Mais elle devina qu'il y avait d'autres prisonniers et qu'elle n'était pas seule. L'homme qui la conduisait n'avait rien d'un gobelin ou d'un orque. Qui était-il ? Alors qu'elle ralentissait, l'homme tira d'un coup sec sur la chaine, et elle accéléra le pas. Elanor se demanda soudain dans quel pétrin elle s'était fourrée.

Le bout du tunnel se terminait par une ouverture qui donnait sur une autre partie de la forteresse. Ils franchirent le seuil et pénétrèrent dans une vaste grotte, et elle en resta sans voix.

C'était un endroit monumental.

La caverne était ronde et creusée de galeries et d'escaliers sinueux, grimpant à des hauteurs vertigineuses. La Moria faisait pâle figure comparé à ce qu'elle voyait maintenant. Quelques hommes en toge grise, semblables à celui qui la conduisait, erraient sur des chemins, parfois avec des prisonniers ou parfois seuls.

Elanor examina les lieux avec une horreur mêlée de fascination. Quel était cet endroit ? Elle regarda le gardien avec hésitation, et put alors le dévisager correctement, grâce à la lumière qui était un peu plus forte.

Il avait une peau pâle, et le crâne rasé. Ses lèvres étaient blanches, et il n'avait aucune expression notable, hormis l'indifférence. Elanor ne sut dire à cet instant s'il était humain, ou une créature d'un autre monde. Elle n'osa lui demander.

- Où sommes-nous ?

L'individu se retourna, et elle rencontra pour la première fois ses yeux bleus glaciales.

- Vous êtes dans les cavernes de Mandos, lui répondit-il.

- Pourquoi suis-je ici ?

Une lueur étrange tremblota dans les yeux du gardien.

- Vous le saurez bientôt.

Ce fut la seule et unique réponse qu'il lui adressa, et la conversation se termina là. Le gardien la tira de nouveau en avant, et ils descendirent jusqu'au bas de la grotte.

Les cavernes de Mandos... N'avait-elle pas déjà entendu cela quelque part ? De vieux contes lui revinrent en mémoire. N'était-ce pas dans ces cavernes qu'allaient les morts avant d'être jugés ?

Elle était morte ? Cette révélation lui fit un choc, et lui donna une sensation bizarre.

Ainsi, c'était donc ce qui s'était passé. Elle était tombée dans les mines de la Moria. Et elle n'avait pas été capturée contrairement à ce qu'elle avait pensé, mais on l'avait gardé en captivité... jusqu'à son jugement.

Son voyage s'arrêtait là, et elle n'allait plus revoir ses amis. Jamais. Elle avait échouée.

Ses épaules se mirent à trembler, et elle suivit tant bien que mal son gardien en trébuchant.

L'homme la conduisit au bout de la grotte. Plusieurs autres gardiens trainaient des prisonniers à l'intérieur ou à l'extérieur de leurs cellules. Elanor n'aurait pu mettre un nombre sur la quantité de cellules qui se trouvaient dans cet endroit. Cette caverne était démesurée, et il y avait des couloirs partout, qui s'enfonçaient profondément dans la roche.

Au moment où ils mirent pieds à terre et traversèrent le fond de la caverne, un homme dans la foule attira soudainement son attention. Elanor faillit s'arrêter net.

- Boromir ?

Le Gondorien était reconnaissable entre mille. Il portait les mêmes vêtements depuis la Moria, excepté qu'il avait en plus une broche et une cape grise nouée autour de son cou.

Et il avait le teint blême.

Que faisait-il ici ?

Elanor comprit alors. Il était mort, réalisa-t-elle.

Comment ? Quand ?

Que c'était-il passé ? se demanda-t-elle. Il avait dut leur arriver malheur peu après qu'elle soit morte. Est-ce que les autres étaient aussi ici ?

L'angoisse la prit soudainement à la gorge, et elle voulut héler Boromir, les questions se bousculant dans sa tête. Hélas, on la poussa en avant, et le Gondorien disparut de sa vision.

Lorsqu'elle tourna de nouveau la tête, il n'était plus là.

Les larmes aux yeux, elle mit un certain temps à se convaincre que tout ça n'était pas un rêve.

Abattue, elle suivit son gardien qui la conduisit dans un immense hall, soutenu d'énormes piliers aussi massif que ceux taillés par les nains dans la Moria. Des dizaines, ou peut-être une centaine de personnes attendaient en file indienne, devant une énorme porte noire.

Impressionnée, Elanor observa ce spectacle. La plupart de ces personnes étaient de la race humaine. Hommes, femmes et enfants, il y avait de tout et de tous les âges. Elle aperçut deux nain, et plusieurs hobbits, et vit finalement un seul elfe perdu parmi tous.

La porte gigantesque qui était au bout du hall, montait presque jusqu'au plafond et projetait une ombre menaçante sur eux. Une rangée de gardes, armés de lances et d'une armure opaque qui dissimulait leur visage, encadrait les prisonniers sur toute la longueur de la salle. Elanor sentit qu'on lui détachait la chaine, et le gardien la laissa rejoindre la foule après un signe de tête. Au moment où le gardien la laissa, l'abandonnant à son sort, la porte s'ouvrit dans un grondement à faire pâlir un orque.

La personne qui se trouvait tout au bout de la file, une vieille dame aux cheveux blancs et aux habits très modestes, pénétra dans la pièce en tremblotant. En retenant son souffle, Elanor observa la scène, et crut défaillir lorsqu'elle vit la porter se refermer en un claquement.

La plupart des gens tremblaient ou sanglotaient, ne sachant pas ce qu'ils allaient trouver de l'autre côté. Elle commença aussi à ressentir de la nervosité lorsqu'elle vit qu'aucun de ceux qui étaient rentrés ne ressortaient.

Le temps passait, et le ballet incessant des personnes entrant dans l'autre pièce fut interminable.

Mais la file diminua peu à peu, et elle se retrouva bientôt devant la porte. Celui qui était devant elle, un nain broussailleux entra, et il s'écoula de longues minutes. Peut-être les plus longues de sa vie.

Puis la porte s'ouvrit, et ce fut son tour.

L'envoyée des Valar - livre II (LOTR-Seigneur des Anneaux)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant